Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Retrouvez nos critiques théâtrales sur :
Les informations sur nos cours d'improvisation théâtrale à Paris :

Musarder



Inscrivez-vous
au Club des abonnés (gratuit)




Découvrez nos cours d'improvisation théâtrale

Tous niveaux - 7e année

Les inscriptions sont ouvertes pour les cours d'improvisation à Paris qui débutent en septembre. Au choix, en français ou en anglais.



Nouveau !

Rejoignez notre cours d'impro en anglais :



Coaching prise de parole

           

Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

27 octobre 2006 5 27 /10 /octobre /2006 11:27
AUX ORIGINES DU CRIME

«Non, non, nulle dame vivant après moi
Par mon excuse aura prétexte à s’excuser».


La pièce débute par une première scène feutrée, qui tranchera d’autant plus avec le déroulement du reste de la pièce. Un couple s’installe, un verre à a main, dans une ambiance tamisée et cosy. L’homme propose à la femme de lui raconter une histoire…. Et pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit du viol de Lucrèce, épisode de l’histoire romaine qui conte la manière dont Tarquin envoûté par la vision de Lucrèce, épouse de son compagnon d’armes, s’échappa du combat et profita de l’hospitalité de cette dernière pour la violer.

Ce poème dramatique écrit en 1594 par Shakespeare, sonde les origines du crime et plonge dans les tourments des deux protagonistes. Tour à tour ceux-ci expriment les tournoiements de leurs pensées et le fragile équilibre entre la part d’ombre et celle de lumière. Tarquin tout d’abord dans un somptueux monologue, ici à la seule lumière d’une torche, sorte de métaphore du désir brûlant qui le possède et qui rend ses traits encore plus inquiétants, expose les raisons du terrible acte qu’il s’apprête à commettre. De par sa raison, il connaît l’atrocité du geste et toutes ses répercussions mais il ne semble pas pouvoir lutter contre le feu qui l’anime. La beauté de Lucrèce est une telle provocation que sa convoitise ainsi attisée ne peut se consumer que dans le viol. Quant à Lucrèce, puisque sa beauté est sa perte il ne lui reste pour seule arme que les mots. Elle essaie alors de faire appel au sentiment d’honneur de Tarquin…. En vain l’acte barbare s’accomplit.
Vient pour elle le moment d’affronter sa honte. Son corps souillé semble ne plus lui appartenir, de pur ne subsiste en elle plus que son âme. Face à ce dépouillement Lucrèce ne voit d’issue que dans le suicide et la vengeance que devra accomplir son époux Brutus.

Violence radicale

Les vers de Shakespeare touchent au plus profond de l’être avec une violence et un lyrisme d’une grande beauté. La violence radicale surgit tant dans l’exposition qui est faite du désir sexuel de Tarquin que dans la décision sans révocation possible du suicide de Lucrèce. Cette brutalité des actes nous apparaît crûment mais transcendée par la force lyrique des mots.

De son côté Marie-Louise Bishofberger parvient par une mise en scène minutieuse à apporter un éclairage au texte et à lui donner des accents de modernité sans nuire à l’intention initiale. L’introduction originale faite à la pièce et les quelques intermèdes qui viennent la ponctuer sont comme des parenthèses qui insufflent de la légèreté tout en aidant à mieux saisir le propos.
La scénographie sobre et le jeu de lumières tout en contraste passant du tamisé à l’obscurité la plus totale, du blanc immaculé au noir souillé, offre une esthétique élégante et stylisée.
Quant à l’interprétation, on restera longtemps sous le charme de Pascal Bongard qui incarne avec un naturel désarmant plusieurs personnages. Tout d’abord il prend les traits démoniaques d’un Tarquin violemment rongé par le désir, puis dans un registre plus facétieux il se transforme en un messager et en vieille nourrice de Lucrèce. Sa présence qui emplit la scène d’accents tour à tour menaçants ou malicieux porte le texte à un haut niveau de ressenti. Véronique Sacri prête à Lucrèce un visage fort et fier mais son désespoir résigné et sa soif intransigeante de vengeance ne nous sont pas entièrement communiqués.

Le Viol de Lucrèce
est une pièce emplie de souffle où beauté et puissance de la langue rejoignent la plastique du décor. La mise en scène raffinée et construite sert les intentions de l’auteur en les habillant d’une forme de distanciation et d’apartés qui permettent au spectateur d’en percer le sens.

Anne CLAUSSE (Toulouse)

Le Viol de Lucrèce, de Shakespeare
Adaptation et Mise en scène : Marie-Louise Bishofberger
D’après la traduction d’Yves Bonnefoy
Scénographie : Raymonde Couvreu
Avec : Pascal Bongard, Véronique Sacri

Théâtre National de Toulouse 1 rue Pierre Baudis
Tarifs : 20/12/8 Contacts : Tél: 05 34 45 05 05
Du 17 au 21 octobre 2006, puis en tournée (14 & 15 novembre au Théâtre du Luxembourg).
Partager cet article
Repost0

commentaires

Chronique FraÎChe