26 juin 2008
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SI FOU SI WEST
C’est un come-back fracassant que nous propose l’ex-icône des années 80 que l’on croyait engloutie dans les abysses de l’oubli après un triomphe fulgurant d’une poignée de mois. La cigale a bossé comme une fourmi et sa maturité nourrie de ses échecs a eu raison de ceux qui l’avaient enterrée bien vite. Deux heures durant, le Trianon vibre au son d’une carrière de près d’un quart de siècle. Renversant !
A l’instar de l’homme d’une de ses plus belles chansons, « Anna », elle avait pris le large. Mais elle, elle est revenue. Salutaire exil. Enfin débarrassée de ces obsessionnels oripeaux -cette lassante bichromie à l’origine de son plus gros tube et qu’elle arborait sans cesse, de la pointe des chaussures à celle de son hirsute chevelure- Jeanne Mas est de retour. Sereine, rassérénée. Comme Polnareff, elle est allée se frotter aux ambiances si folles si west de la côte californienne...
Panama sur une chevelure de la blondeur des blés, bottes de rodéo aux pieds, cintrée dans une robe affriolante, ceinturon surmonté d’un énorme médaillon, elle effectue une de ces entrées simple mais fracassante dont elle a le secret. En dix secondes, la salle est debout. Folie totale. Allez faire rasseoir tous ceux ont prié si fort pour qu’elle revienne… L’évidence s’impose : le public ne l’a pas oubliée et le voilà arrimé pour deux heures d’un voyage musical naviguant sur près d’un quart de siècle.
L’ancienne dignitaire du Top 50, celle qui paraissait indéboulonnable avec son look ravageur, ses chansons aux mélodies redoutables et aux textes d’une indéniable élégance a bien changé. Flop à Bercy en 1989, dérapages verbaux incontrôlés à la sortie d’un album qui disait tout sans qu’il lui fût besoin d’en rajouter, compilations à la pelle pour réhydrater les terres desséchées de l’oubli dans lequel elle s’enterrait, albums médiocre (« Désir d’insolence ») ou inutile («Les Amants de Castille » d’après « Le Cid »), Olympia catastrophique en 2001 : Jeanne Mas a connu le gadin, ramant derrière une mode des années durant, elle qui en lança une à ses débuts. Voilà quatre ans, on ne donnait pas cher de sa pérennité dans ce monde impitoyable du show-biz.
Balavoine, toujours…
Qu’est ce qui a donc changé ? Tout et rien à la fois. Elle ne parle plus et ça passe… Elle ne cause plus, elle chante. Et on le sait, Balavoine le savait, Berger le disait, Jeanne Mas a une voix. Elle n’est pas de ces hurleuses assourdissantes ou de ces miauleuses qu’on aurait envie d’euthanasier pour abréger leurs souffrances. Sa voix, que l’on reconnaît entre mille, ne s’est pas altérée, bien au contraire. Elle ose aujourd’hui lui faire parcourir un delta de tessitures plus large. Elle n’hésite pas à s’accompagner simplement d’un violon et piano pour une version inattendue – et grandiose – de son incontournable « Johnny Johnny ». Elle affronte « Tous les cris les SOS » de Balavoine, accompagnée d’une batterie discrète rappelant les sonorités de l’album « Loin des yeux de l’Occident » à laquelle la chanson n’appartient pourtant pas. Dans ces moments-là, drapée dans une ample robe évanescente, c’est une déesse qui électrise le Trianon.
Ses incontournables tubes et des chansons nouvelles entrecoupées de quelques bonnes surprises (« Carolyne », « Angela ») mis en beauté par des musiciens au top, une prestation scénique époustouflante que Maître Rouveyrollis a habillée de son regard éclairé de poète des lumières, une sibylline ironie par rapport à son nouveau statut d’expatriée rappelant qu’elle a aussi beaucoup d’humour : Jeanne enflamme cette salle mythique de sa communicative envie de chanter. Elle offre un cocktail détonnant, cette femme d’aujourd’hui et, on peut le dire désormais, de demain. Son avenir n’est plus un long passé et on espère la revoir vite, chargée de cette même audace avec un concert où, pourquoi pas, elle aura remplacé quelques tubes par des titres enfouis et oubliés, de « Alexandre M. » aux « Marilyn », de « Y’a des bons » à « Si fou si west »…
Jeanne Mas revient ! (Paris)
Avec Todd Connelly (Basse), Matt Lesser (Batterie), Willis Clow (Guitare), Jennifer Argenti (Violon), Christophe Viollent (piano)
Producteur : Yvon Chateigner / Edina Music
Au Trianon jusqu’au 29 juin 2008
Photos © Franck Bortelle
C’est un come-back fracassant que nous propose l’ex-icône des années 80 que l’on croyait engloutie dans les abysses de l’oubli après un triomphe fulgurant d’une poignée de mois. La cigale a bossé comme une fourmi et sa maturité nourrie de ses échecs a eu raison de ceux qui l’avaient enterrée bien vite. Deux heures durant, le Trianon vibre au son d’une carrière de près d’un quart de siècle. Renversant !
A l’instar de l’homme d’une de ses plus belles chansons, « Anna », elle avait pris le large. Mais elle, elle est revenue. Salutaire exil. Enfin débarrassée de ces obsessionnels oripeaux -cette lassante bichromie à l’origine de son plus gros tube et qu’elle arborait sans cesse, de la pointe des chaussures à celle de son hirsute chevelure- Jeanne Mas est de retour. Sereine, rassérénée. Comme Polnareff, elle est allée se frotter aux ambiances si folles si west de la côte californienne...
Panama sur une chevelure de la blondeur des blés, bottes de rodéo aux pieds, cintrée dans une robe affriolante, ceinturon surmonté d’un énorme médaillon, elle effectue une de ces entrées simple mais fracassante dont elle a le secret. En dix secondes, la salle est debout. Folie totale. Allez faire rasseoir tous ceux ont prié si fort pour qu’elle revienne… L’évidence s’impose : le public ne l’a pas oubliée et le voilà arrimé pour deux heures d’un voyage musical naviguant sur près d’un quart de siècle.
L’ancienne dignitaire du Top 50, celle qui paraissait indéboulonnable avec son look ravageur, ses chansons aux mélodies redoutables et aux textes d’une indéniable élégance a bien changé. Flop à Bercy en 1989, dérapages verbaux incontrôlés à la sortie d’un album qui disait tout sans qu’il lui fût besoin d’en rajouter, compilations à la pelle pour réhydrater les terres desséchées de l’oubli dans lequel elle s’enterrait, albums médiocre (« Désir d’insolence ») ou inutile («Les Amants de Castille » d’après « Le Cid »), Olympia catastrophique en 2001 : Jeanne Mas a connu le gadin, ramant derrière une mode des années durant, elle qui en lança une à ses débuts. Voilà quatre ans, on ne donnait pas cher de sa pérennité dans ce monde impitoyable du show-biz.
Balavoine, toujours…
Qu’est ce qui a donc changé ? Tout et rien à la fois. Elle ne parle plus et ça passe… Elle ne cause plus, elle chante. Et on le sait, Balavoine le savait, Berger le disait, Jeanne Mas a une voix. Elle n’est pas de ces hurleuses assourdissantes ou de ces miauleuses qu’on aurait envie d’euthanasier pour abréger leurs souffrances. Sa voix, que l’on reconnaît entre mille, ne s’est pas altérée, bien au contraire. Elle ose aujourd’hui lui faire parcourir un delta de tessitures plus large. Elle n’hésite pas à s’accompagner simplement d’un violon et piano pour une version inattendue – et grandiose – de son incontournable « Johnny Johnny ». Elle affronte « Tous les cris les SOS » de Balavoine, accompagnée d’une batterie discrète rappelant les sonorités de l’album « Loin des yeux de l’Occident » à laquelle la chanson n’appartient pourtant pas. Dans ces moments-là, drapée dans une ample robe évanescente, c’est une déesse qui électrise le Trianon.
Ses incontournables tubes et des chansons nouvelles entrecoupées de quelques bonnes surprises (« Carolyne », « Angela ») mis en beauté par des musiciens au top, une prestation scénique époustouflante que Maître Rouveyrollis a habillée de son regard éclairé de poète des lumières, une sibylline ironie par rapport à son nouveau statut d’expatriée rappelant qu’elle a aussi beaucoup d’humour : Jeanne enflamme cette salle mythique de sa communicative envie de chanter. Elle offre un cocktail détonnant, cette femme d’aujourd’hui et, on peut le dire désormais, de demain. Son avenir n’est plus un long passé et on espère la revoir vite, chargée de cette même audace avec un concert où, pourquoi pas, elle aura remplacé quelques tubes par des titres enfouis et oubliés, de « Alexandre M. » aux « Marilyn », de « Y’a des bons » à « Si fou si west »…
Franck BORTELLE (Paris)
Jeanne Mas revient ! (Paris)
Avec Todd Connelly (Basse), Matt Lesser (Batterie), Willis Clow (Guitare), Jennifer Argenti (Violon), Christophe Viollent (piano)
Producteur : Yvon Chateigner / Edina Music
Au Trianon jusqu’au 29 juin 2008
Photos © Franck Bortelle