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Festival d'Avignon

14 septembre 2006 4 14 /09 /septembre /2006 00:00

Pascal Coulan est jusqu'au 19 octobre 2006 au Petit Casino à Paris à 22h30. Adresse : 17 rue Chapon 3e Métro : Rambuteau.

Article publié le 27 juillet 2005, pendant le Festival Off d'Avignon - reprise en 2006.

LE CON, L’ABRUPT ET LE COULAN

Sauriez-vous trouver un point commun entre un héro de Kolantha (un brin abrupt) et un apprenti skieur (un soupçon con) ? Vous ne voyez pas ? La réponse est pourtant facile : Pascal Coulan ! Derrière un titre de one man show pas franchement original, voire un brin aguicheur, se cache un spectacle que l’on aurait bien tort de bouder. Car sur scène, Coulan déroule ses personnages comme d’autres étalent leur garde robe : avec bonheur ! D’un savoureux adepte du 4x4 des villes à un fanatique du « cubit » (vous ne pourrez plus croiser du regard un cubitainer de vin sans sourire…), en passant par un chanteur français (nouvelle génération) ou un échangiste du dimanche, il invite son public dans une galerie de portraits cocasses, parfois caustiques, jamais méchant. Et surtout toujours drôle.

Un humour qui s’inspire de la vie quotidienne et de nos petits (ou gros) travers et que Pascal Coulan manie avec talent. Les textes sont généralement bien écrits, les jeux de mots subtils et sans ostentation. L’art de la situation est maîtrisé. Et l’ensemble est servi par un jeu tout à fait convaincant. Qui plus est, Coulan évite l’écueil de la vulgarité tout comme celui de la facilité. La chose mérite d’être soulignée.

Une heure vingt de bonne humeur … qui refuserait cela ?

 Karine PROST


Le plus drôle de moi-même
de et par Pascal Coulan
La Tâche d’Encre
Horaire : 17 h 00
durée 1 h 20 (rappels compris !)


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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 14:25
AIDER LABROSSE À RELUIRE DANS LA VIE

Comme toujours, la québécoise Carole Fréchette frappe fort ; avec une intrigue décontenançante où le comique le dispute au tragique, une thématique liée à la désespérance, voire ici la déchéance sociale liée à la perte d'emploi, et des personnages simples et sans fard qui essaient de tisser du lien entre eux, sans vraiment y parvenir.

Simon Labrosse est au chômage. Le libéralisme à la sauce nord-américaine y conduit-il ? En tout cas, tout imprégné de culture anglo-saxonne, Labrosse ne compte pas se lisser le poil de la main mais plutôt prendre en ladite main son destin. Carole Fréchette n'est pas Ken Loach. Au lieu de se lamenter sur son sort, Simon se grave un sourire Ultrabrite, débride son imagination et, flanqué de deux comparses, qui lui sont aussi utiles qu'un frigo à un esquimau, l'une obsédée par son bien-être, l'autre moisi sur le sort de l'humanité,  il part à la rencontre des gens (et du public) pour leur proposer mille et un services superflus mais tellement nécessaires. Il invente des métiers farfelus et improbables dont les intitulés ne déplairaient pas à un Ribes (rappelons-nous du bureau de change pour changer d'opinion) ou au regretté Devos : flatteur d'ego, finisseur de phrases ou allégeur de conscience...


Au passage, des pistes de réflexion. Comment combler son vide en comblant celui des autres ? Peut-on changer sa vie à défaut de changer la vie ? Un être humain, ça vaut quoi ? Le métier de "spectateur personnel" est ainsi d'une fracassante lucidité sur le sens que nous donnons à notre existence. Simon propose une thérapie qui consiste à regarder l'autre cinq minutes pour lui donner le sentiment d'exister et d'avoir une quelconque importance dans un monde où l'humain prend une importance quelconque. Comment trouver sa place dans la société quand "il pleut des briques sur le monde pourri.", valoriser ses compétences, se vendre, concilier estime de soi et activité sociale, ne pas accepter le défaitisme, trouver la force de se battre ? Telles sont les questions posées par ce texte dont seules les apparences sont légères, car il y a du Chaplin chez Fréchette, qui avec une économie de mots, des ellipses de pensées et des personnages poignants, tendres et habités, parvient à toucher notre esprit et notre coeur au plus loin et au plus juste.
L'arme extrême au bout de la déréliction, quand tout semble perdu, c'est jouer sa vie, pour ne pas jouer avec sa vie, c'est donner son énergie, ainsi, quand il ne reste plus rien, il reste quand même cela. D'ailleurs, c'est en sept jours que Simon, cet être de souffrance, va tenter de voir, dans un ultime sursaut ce qui lui reste de sa force vitale au bénéfice des autres et de lui-même ; pour se sauver lui-même ou pour sauver les autres... ?

Les trois comédiens, de qualité, ont compris la subtilité de leurs personnages et donnent de la hauteur au fond et du punch à la forme.
Yves Chenevoy, indécrottable optimiste, costume au ton verdâtre, affiche continument un large sourire immaculé, comme figé dans un masque de Commedia dell'arte, aveu de la nécessité dans laquelle il est tenu de toujours faire bonne figure, un Simon qui fait en quelque sorte de la résistance à la morosité.
Patrick d'Assumçao, lexicopathologique butant sur les mots à connotation positive, est épatant de désespoir résigné.
Claudie Arif campe une Nathalie primesautière, fort charmante, fragile, perpétuelle hébétée aux préoccupations égocentrées, au rang desquelles son épanouissement orgasmique.

La mise en espace incursive de Charlotte Blanchard et Yves Chenevoy, prend le public à témoin, jamais à parti, et nous alerte sur la vigilance à avoir pour notre avenir micro-économique, la conscience nécessaire de soi et des autres ; sans verser des jérémiades de mendiant, Simon (ou Pierre dans la Bible), créateur d'humanité, récréateur de l'humanité, se donne du mal pour faire le bien des autres en faisant le sien, et inversement. Il parvient au moins à faire en sept jours le tour du monde - à défaut de le refaire - de ce qui fait notre force à tous, et qui est aussi la source de toutes nos faiblesses : nous-mêmes et nos efforts désespérés pour être aimés.

Stephen BUNARD
www.ruedutheatre.info

Les Sept jours de Simon Labrosse, de Carole Fréchette
Mise en scène : Charlotte Blanchard et Yves Chenevoy
Scnéographie : Denis Busson
Avec : Yves Chenevoy, Claudie Arif, Patrick d'Assumçao

Avignon Festival Off - Théâtre Palace à 18h - du 6 au 30 juillet - durée : 1h15
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 11:59
AUX ÂMES BIEN NÉES...

Ce sont deux toutes très jeunes comédiennes, l'une (Marina Castells) est aussi chanteuse, l'autre (Sylvia Santin) est également musicienne. Fraîches émoulues de leurs études théâtrales avignonnaises – dans les ateliers du Théâtre du Chêne Noir – et universitaires, elles ont décidé de poursuivre une commune carrière artistique en créant leur propre compagnie « les Allumées ». Et ce spectacle Flagrant Délire !! qui a triomphé dans le Festival Off 2005. « Montées » ensuite à Paris, les deux amies comédiennes ont pu donner leur spectacle de janvier à mars 2006 dans un café-théâtre tout en poursuivant leurs études d'art dramatique, pour Sylvia, et de comédie musicale, pour Marina.


Le registre d'expression qu'elles se sont choisi, par goût, c'est celui de la comédie, plus précisément du vaudeville, avec des textes de Feydeau, Courteline et Obaldia. Trois scènes qu'elles se sont appropriées, en réalité, pour servir de supports à un spectacle dans lequel les codes du genre sont allègrement détournés, « pris en otages » en quelque sorte, vers la loufoquerie, le non sens, l'humour noir... Ce duel à fleurets non mouchetés entre deux femmes, deux fausses bourgeoises, une fausse aristo, qui jouent à se tromper mutuellement commence par le célèbre « Duo des chats » de Rossini. La suite n'est qu'une longue série de coups de pattes qui ne sont de velours qu'en surface, car les griffes sont toujours là pour égratigner. De vacheries en vacheries, le délire gagne... La musique, la danse, le chant, la parodie viennent compléter un jeu théâtral qui vise d'emblée l'excentricité, la loufoquerie, par ses excès délibérés dans le cadre de relations bourreau-victime... Sauf qu'on ne sait jamais vraiment qui est le bourreau et qui est la victime... Les deux sans doute ?

On pourra regretter au passage un peu trop d'appels du pied à une certaine modernité superficielle qui, parfois, ne devrait pas être. Ainsi toutes ces « private jokes » - de Chapi Chapo à Alfred Hitchcock – qui abondent jusqu'à l'excès. Sans doute manque-t-il encore à ces deux jeunes comédiennes – qui font plus que promettre, insistons bien là-dessus - un regard extérieur, celui d'un metteur en scène, qui leur permettrait d'élaguer ce spectacle – comme ceux à venir - de tout le superflu. La recherche d'une certaine perfection est nécessairement à ce prix.

Henri LÉPINE
www.ruedutheatre.info

Flagrant Délire !!, par « les Allumées. La Petite Caserne, 15h45 - Avignon Festival Off.
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 11:48
GRAND SAIGNEUR DEVANT L’ETERNEL


Où est le temps béni où le professeur exerçait un pouvoir incontestable et incontesté, où, démiurge respecté en sa chapelle, il officiait en paix et portait fièrement son sacerdoce ? Ce temps n’est plus et la pièce est tout sauf un plaidoyer rétrograde ; un cri d’amour pour une profession légèrement désenchantée peut-être…

L’enseignant n’est plus ce bon berger, il est tout au plus une bête de foire jeté en pâture à une meute de loups au regard bovin et impavide. Les yeux des gamins ne sont plus avides d’apprendre mais plutôt lestés par la vacuité de leur indifférence. La tête du prof apparaît, encadrée dans une lucarne, pour apprécier le degré d’affaissement des élèves sur leurs bureaux, indicateur symptomatique de leur potentiel d’attention disponible. Le pan s’effondre et révèle le prof, tapi, sous son bureau, écrasé, traqué. Lorsqu’il se redresse, c’est toujours cloîtré dans la quadrature d’un cercle infernal qu’il évolue sur scène, comme un ours en cage. Réclusion derrière son bureau ou détention derrière les barreaux, l’appareil scénique met ingénieusement le tout en un : blockhaus infernal !

Photo © Danielle Loup

« Qu’est-ce que ça veut dire être prof de littérature ? »
. C’est avec cette question rituelle que ce professeur désabusé, incarné avec tendresse par le metteur en scène Mario Dragunsky, initie le cérémonial de la rentrée des classes. Cette question, c’est le point de départ d’une longue digression tour à tour désopilante, attendrissante, passionnée et désespérée. Tout y est : retour sur les illusions du débutant, intronisation en salle des profs, collègues dénués de tous scrupules déontologiques ou passionnés par tout, sauf par leur matière ; Mario Dragunsky se joue à merveille de tous ces « rôles » et endosse même celui des élèves en forçant à peine la caricature…

Questions ineptes pour faire passer le temps, stigmatisation des camarades travailleurs comme « traîtres à la corporation des léthargiques », admiration pour le professeur à l’aune de son endurance à les supporter…Cette petite leçon est drôle, vive, cinglante et délicieusement cynique ! Le tableau vous semble noir ? Ne soyons pas candides, la représentation dépasse à peine la réalité mais les tableaux désormais sont verts, il y a de l’espoir ! D’ailleurs, y aurait-il une telle amertume goguenarde dans le texte édifiant de Jean-Pierre Dopagne s’il n’avait pas tant d’affection pour ces chieurs réfractaires et le désir insatiable de croire en ce qui reste une profession de foi ?

Bérénice FANTINI
www.ruedutheatre.info

L'Enseigneur
De Jean-Pierre Dopagne
Cie 4 CATS
Mise en scène et Interprétation : Mario Dragunsky.
Scénographie, costumes et photographies : Danielle Loup.

Festival Off Avignon
Théâtre La Petite Tarasque – 5, Rue de Taulignan. Réservation : 04 90 85 43 91
Du 6 au 30 juillet, 10h00 - Durée : 1h15
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 11:36
PARADIS PERDU

D’Adrian se dégage une atmosphère trouble et terriblement envoûtante. À partir du motif, somme toute classique, de la quête initiatique, de l’apprentissage, Gille Crépin a tissé un récit sobre, subtil et intelligent.
Il interprète avec une délicatesse maîtrisée sept personnages dont les destinées individuelles, contre toute attente, s’entremêlent et se révèlent jusqu’au dénouement foudroyant, savamment orchestré.

Fable, apologue, conte ou récit, l’œuvre représentée est difficile à définir car elle dégage une poésie tout à fait particulière et se nimbe graduellement d’une inquiétante étrangeté. Le comédien apparaît dans une tenue presque monastique, costume taillé dans le goût asiatique, dont les pans amovibles s’ajustent en fonction d’une palette de personnages aussi atemporels qu’exotiques et, pourtant, universels. La scène, presque nue, est habillée d’un habile jeu de lumières mettant en perspective les différentes figures qui se succèdent dans des tableaux entrecoupés de ténèbres.

Photo © Bérénice Fantini

Adrian, le héros éponyme, est un jeune homme pétri de suffisance, empêtré dans les lieux communs du bourgeois promis à un avenir sans nuages. Il est le beau-fils et donc l’héritier de l’impitoyable Capitaine qui, en tant que descendant de l’illustre fondateur de cette île baptisée - ironie cruelle - Paraiso, exerce un pouvoir tyrannique sur toute la communauté. Un aquarium, vide, rappelle sa prédilection pour le requin, animal totem hautement symbolique d’une philosophie selon laquelle « les gros poissons mangent les petits ». Adage qu’Adrian ne manque pas de s’approprier et de « servir » à la jeune Zina, une laveuse de carreaux qui l’intrigue et le dérange dans ses certitudes en professant, notamment, qu’une fois tous les petits poissons mangés « le requin se retrouve tout seul ». Or, lorsque la petite Zina disparaît, justement, Adrian, seul et désemparé, part à sa recherche et se risque dans le sordide quartier du port. Recueilli par la mère de Zina, il s’intègre, travaille et se lie avec Luigi, le mendiant aveugle, lucide et clairvoyant. Il se croit indépendant mais le Capitaine régente son quotidien dans l’ombre et Adrian devra véritablement conquérir une identité que les différents protagonistes vont concourir à éclairer.

L’intrigue, portée sereinement par le jeu très mesuré de Gille Crépin, atteint l’intensité dramatique imprévisible d’une incoercible fatalité. L’ironie tragique fait naître des révélations que je me garderai bien de dévoiler pour préserver l’insidieux pouvoir de cette fable fulgurante.

Bérenice FANTINI
www.ruedutheatre.info

Adrian, l'enfant du paradis
De Gille Crépin
Cie Epices et Parfums
Mise en scène : Marc Ferrandiz
Interprétation : Gille Crépin
Musique : Adam S. Callejon. Lumière : Pierre de Cazenove et Gille Crépin. Costumes : Maëlle Adenot. Graphisme : Didier Latorre.

Festival Off Avignon – Théätre l’Albatros – 29, Rue des Teinturiers.
Réservation : 04 90 86 11 33
Du 7 au 29 juillet, relâche le 26, 12h30 - Durée : 1h10
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 11:20
GRANDE DAME

Charlotte-Elisabeth de Bavière, princesse Palatine, « Madame », épouse de Monsieur le frère de Louis XIV, le duc Philippe d’Orléans qui lui donnera un fils du même nom, futur Régent. Personnage prestigieux s’il en est, mais, on le découvre dans cette pièce délicate, la noblesse de cette femme est d’un autre ordre. Allemande, elle gardera la nostalgie de son pays, de la simplicité et du « naturel » qui font si cruellement défaut à la cour de son beau-frère. Esprit libre et impétueux, affranchi de l’hypocrisie régnante, Palatine est une figure irrévérencieuse et intègre. Témoin privilégiée du siècle, elle laisse à travers sa correspondance une peinture vive et colorée de ses contemporains.

Photo ©  B.-M. Palazon

Jean-Claude Seguin recompose, à partir de ses témoignages épistolaires, le portrait éloquent d’une femme pleine de verve et de truculence qui, au fil de la pièce, s’incarne dans une épaisseur dramatique touchante. D’amertumes en désillusions, Palatine revit dans le jeu sobre et pénétré de Marie Grudzinski, subtile, émouvante et drôle. La mise en scène, épurée, nous fait pénétrer dans le cabinet de « Madame », elle lit, écrit, porte sur elle-même un regard sans complaisance, se dévoilant dans le même temps qu’elle vieillit sous le poids d’un costume qui s’étoffe. Vigoureuse, fraîche, alerte, elle raconte les humiliations qu’elle doit aux cabales des mignons de son époux comme des maîtresses du Roi. Si Marie-Thérèse était niaise mais « aimable », Maintenon est une véritable « ordure », « une guenon » ! Il ne s’agit pas de s’offusquer, Palatine n’a pas peur des mots et se gargarise des bons, disons même, passez-moi l’expression, qu’elle « ne pète pas plus haut que son cul » et se garde bien d’en faire la lèche… Elle évoque d’ailleurs avec malice des personnages qui ne s’embarrassent pas de ces principes… Impudente ? Certes : étiquette, bienséance et convenances ne conviennent pas toujours à son caractère bien trempé.

Dans ce regard cynique et amusé passent cependant des lueurs de tristesse et de profonde amertume ; elle subit ainsi douloureusement son impuissance vis-à-vis des conflits qui opposent la France à sa terre natale et déplore ce « statut de femme », peu propice à son impolitesse. Prisonnière de la cage dorée qu’est Versailles, elle prise une solitude qui la préserve de ces méchants, tartuffes, courtisans et va-t-en-guerre, qu’elle épingle avec tant de mordant dans ses épîtres. Madame s’éteint le 8 décembre 1722 et, avec elle, la lumière sur cette scène où s’est rejouée toute une vie. Il est à souhaiter que vous ayez le plaisir de voir renaître, à la faveur d’une représentation, l’esprit frondeur à l’impertinence salutaire de celle qu’on jugeait « trop d’une pièce ».

Bérénice FANTINI
www.ruedutheatre.info

Palatine
D’après les écrits de Charlotte-Elisabeth Princesse Palatine
Théâtre du Loup-Blanc
Mise en scène et adaptation : Jean-Claude Seguin.
Interprétation : Marie Grudzinski (la princesse Palatine).
Costumes : Philippe Varache. Coiffures : Daniel Blanc. Lumières : Philippe Guenver. Bande-son : Marc Amblard.

Festival Off Avignon – Théâtre du Cabestan - 11, rue Collège-de-la-Croix
Réservation : 04 90 86 11 74. Du 6 au 29 juillet, à 15h15. Relâche le 7 - Durée 1h15

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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 11:06
QUAND LA SCÈNE FAIT ŒUVRE

Marc Douillet propose à travers cette pièce, composée comme un portrait libre du peintre Francis Bacon, une mise en scène qui se donne comme une forme plastique en mutation.

En adaptant l’œuvre éponyme de Pierre Charras (qui rassemble des entretiens que le peintre eût avec Michel Archimbaud et Le Ring de la douleur, son propre livre) il ambitionne de créer le cadre spatio-temporel « propre à nous faire écouter la peinture en regardant la parole ». Un spectacle qui rencontre le sens et les sens en disséquant l’essence de la matière. Il s’agit bien de théâtre et la pièce s’offre avant tout comme une expérience sensible de la scène qui ne manquera pas d’impressionner profondément le spectateur.

Photo © Bérénice Fantini

Pour autant, on se risquerait volontiers à parler d’une « proposition artistique », proposition qui engage, à travers un réseau de références empruntant aussi bien à l’esthétique qu’à la stylistique, une véritable « lecture » de la « performance ». Cette lecture suppose, c’est bien le propos de la scénographie, un jeu pérpétuel entre le fond et la forme, entre peinture et écriture comme deux supports de représentation. Le cadre de l’espace scénique figure alors la toile, animée dans sa tridimensionalité autant qu’elle est figée en « scènes tableaux » détachées sur le fond noir. Encadré par une structure métallique cubique, un disque chargé de sable ocre est une arène tour à tour solaire ou sanglante, au gré d’un jeu de lumière subtilement distillé.

Sur ce « plateau », Jean-Louis Wacquiez, fascinant de puissance mesurée, et son double, son lui-même, son modèle organique articulé. Hagard, la voix grave et nuancée, Jean-Louis Wacquiez fait se lever les mots et déplace les signes, célèbrant une véritable épiphanie du corps comme matière et de la chair comme texture de la vie. Car, dans cette exposition du peintre et de son modèle, sorte de monologue-confession, se jouent tous les motifs obsessionnels de son œuvre et de sa vie... Fascination exaltée pour la chair et le sang donnant lieu à une véritable poétique des entrailles, assimilation intestinale des images et lutte pour capturer leurs corps dans la toile au point qu’un cri peint devrait s’entendre. Et toujours, partout, habitant l’espace, le mannequin modelé, ombre silencieuse que le peintre dirige comme un enfant, déplace comme un convive, enlace comme un amant, rejette comme un squelette. Pantin animé par les projections du peintre, il joue parfois un personnage et, par le miracle d’une mise en scène tirée au cordeau, semble même doué d’une vie propre.

Cette succession d’images et de métaphores visuelles comme autant de stigmates indiciels d’une présence incarnée de l’artiste a l’éloquence d’un chef d’œuvre inconnu que vous aurez, je l’espère, la chance de « rencontrer ».

Bérénice FANTINI
www.ruedutheatre.info

Figure
De Pierre Charras
Cie Nomades
Avec : Jean-Louis Wacquiez
Mise en scène et scénographie : Marc Douillet
Lumières : Jean-Bernard Philippot, Musique : Rémy Laurençon, Régie : Baptiste Fourrier, Marionnette : Jean-Noël Parmentier, Regards : Charlotte Joliveau et Adeline Capelle

Festival Off Avignon – Collège de la Salle - Entrée Place Pasteur
Réservation : 04 90 82 26 92 - Du 7 au 29 juillet, à 19h, Relâche le 17 et le 24 - Durée : 1h15
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 10:58
EN BONNE COMPAGNIE

Vous voilà conviés dans un petit salon dont le mobilier s’habille de couleurs savamment maîtrisées. Vos hôtes ? Des êtres exceptionnels de charme et d’un raffinement hors d’âge qui se partagent les aphorismes d’Oscar Wilde dans une joute verbale délectable d’hérésie pour le bourgeois bien-pensant.

Sus au vulgaire ! Ici l’on prêche des vérités implacables qui ne souffrent pas la compromission des lieux communs. Wilde, c’est la fulgurance d’un génie extravagant qui se plaît dans le paradoxe, se délecte de bons mots dont l’ironie cinglante transgresse avec une impertinente allégresse les valeurs morales et sociales. Cynique, impudent, esthète accompli, il se distingue avec panache en arborant des tenues de dandy : « On doit être une œuvre d’art ou porter une œuvre d’art » et en faisant l’éloge de la superficialité : « Seul les gens superficiels savent de quoi ils sont faits ! S'aimer soi-même c'est le début d'une vie de passion amoureuse ! » Figure lumineuse d’un anticonformisme en butte à un monde rongé par les vertus puritaines, Wilde a, on le sait, fait les frais de cet arrogant dédain pour des principes qu’il jugeait frelatés.


Ce sont les réflexions sans concessions de ce personnage hors du commun qui tiennent la vedette ; pour les porter en scène, trois comédiens rejouent le trio amoureux composé de Wilde lui-même, de Florence Balcombe dont il s’était épris et de Bram Stoker. C’est ce dernier que la belle préfèrera à Wilde, mais, là n’est pas réellement le sujet car l’épisode, pour authentique qu’il soit, est surtout prétexte à mettre en avant les saillies savoureuses du brillant causeur.

Les trois jeunes comédiens usent de la scène pour jauger la salle avec la fatuité des contempteurs. Laurent Minier est parfait dans son rôle : tenue impeccable, tiré à quatre épingles comme de juste, sourcil effronté, regard narquois noyé de suffisance, lèvres plissées entre amertume et goguenardise provocante ; il joue un portrait vivant et visiblement s’en amuse. Valérie Vervialle est, quant à elle, souveraine ; diction parfaite pleine de morgue hautaine, chorégraphie de gestes qui dessinent dans l’air son suprême dédain. Tous deux se lancent dans une danse de séduction, servie par un intermède à la guitare, dispensable, qui tourne court, la jeune femme lui échappe.

Wilde professe un hédonisme qui dénigre le bonheur mais ses propos se teintent d’une aigreur désenchantée. Sous la virulence du propos affleure, en effet, l’amertume que ne peut manquer de générer la lucidité d’un homme, si parfaitement désabusé. Même si le public « pardonne tout, sauf le génie » je gage qu’il fera noble accueil à cette respiration de finesse dans notre monde de brutes.

Bérénice FANTINI
www.ruedutheatre.info

Born to be Wilde, d’après Oscar Wilde
Cie Le Punch Production
Mise en scène : Christophe Blain Interprétation : Laurent Minier (Oscar Wilde), Sébastien Brille (Bram Stoker), Valérie Vervialle (Florence Balcombe).
Décors : Slide Italian Design et DecoLed, designer : Giuseppe Romano

Festival Off Avignon – Théâtre des Corps Saints – 76, Place des Corps Saints Réservation : 04 90 16 07 50. Du 6 au 30 juillet à 21h15. Durée 1h10
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 10:50
SACRÉS GAILLARDS CES PICARDS !

A partir de l’un des premiers romans d’Eugène Sue (1830), quatre valeureux gaillards donnent vie, voix, corps et musique à un récit truculent en diable, une fête jubilatoire et un spectacle haut en couleurs.


Tonneaux, bois, costumes, difficile à dépeindre et pourtant, le tableau est parfait, pittoresque à souhait, le spectateur est embarqué d’emblée dans l’univers sans foi ni loi de ces boucaniers survitaminés. Philippe Leroy habite la pièce par sa musique, module des complaintes sur son accordéon ou en fait chanter le vent et, plus surprenant, fait d’une cuve à fioul un instrument de percussions.

Photo © Bérénice Fantini

Tout commence dans un petit rade de Pempoul, Maître Durand et Grain de Sel trinquent à la mémoire de feu leur capitaine Kernok sous le regard paisible du tavernier. C’est Dom Herbet qui incarne ce dernier. Il met, avec un brio étonnant, son talent de conteur au service d’un récit propre à situer l’action. Ces passages narratifs ne sont pas des temps morts, loin s’en faut, la diction s’emballe au gré de l’accordéon, vivante et musicale. Ces pauses ponctuent l’action de façon presque imperceptible tant la cadence est effrénée, un jeu de lumière très cru souligne les transitions sans que le rythme en soit le moins du monde affecté. Leur jeu relève d’une orchestration rigoureuse et maîtrisée : en une fraction de seconde les personnages sont campés avec un trait imparable, visuellement stupéfiant ! Dom Herbet se contorsionne, défiguré, et se mue ainsi en une épouvantable sorcière que Kernok vient consulter à la demande de sa compagne Mélie. Celle-ci fait de courtes apparitions, grossièrement habillée par Jean-Philippe de Oliveira ; aussi loufoque et bouffon que puisse être ce genre de travestissement, c’est impayable de drôlerie.

Les trois acteurs visitent une galerie de personnages avec une virtuosité transformiste réjouissante. C’est un bonheur de les voir si investis dans leur jeu, ils mettent un plaisir non dissimulé et communicatif à faire vivre ces caractères bien trempés. Fred Egginton est un Kernok imposant, stature de maître, voix de stentor, regard d’acier et cruauté impitoyable. Car, ne nous y trompons pas, c’est hilarant mais ça sent la poudre et la chair à canon ; le jeu de ces pirates est frénétique, ils tempêtent, vocifèrent, tonitruent et l’action ne lésine pas sur des peintures crues et violentes. Je me garderai bien de dévoiler les péripéties, si ces gars-là débarquent près de chez vous, un seul mot d’ordre : à l’abordage ! Cette histoire de pirates, même si elle fait le bonheur des jeunes têtes brûlées, n'est pas classable "jeune public", tout un chacun peut se réjouir de cette épopée déjantée portée par des comédiens généreux. Explosif !

Bérénice FANTINI
www.ruedutheatre.info

Kernok le pirate, hagiographie d’un saint pas très catholique.
D’Eugène Sue
Cie BEN’ARTs
Interprétation : Fred Egginton, Dom Herbet, Philippe Leroy (musique) et Jean-Philippe de Oliveira. Direction artistique : Fred Egginton, Adaptation : Dom Herbet, Musique : Philippe Leroy, Lumières : Erwann Collina, Costumes : Emma Fossé.

Festival Off Avignon – Théâtre Le Palace – 38, Cours Jean Jaurès Réservation : 0 899 701 718
Du 6 au 30 juillet, 16h00 - Durée : 1h20
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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 01:52
SOLILOQUES DE L'INNOCENCE

Debout devant nous, et face à un tremplin aussi bleu que ses yeux étonnés, innocents, d'enfant perdue, une jeune femme nous avoue sans honte la peur viscérale qui est en elle.

D'ailleurs, c'est de famille... Elle est d'une famille de gens lâches, mais gentils... Elle trouve que la gentillesse est une qualité, alors que « la témérité, c'est de la connerie... ». Toute jeune, elle a vu mourir un de ses petits copains, tombé « comme une merde » d'un toit où il s 'accrochait pour frimer... Depuis, elle a peur. Et sa peur s'est étendue à tout ce qui fait sa vie, la vie... Elle nous raconte son départ en vacances en Italie avec ses parents. Elle avait seize ans. Sur l'autoroute, un accident, stupide comme la plupart des accidents. Un jeune et beau motocycliste est victime d'une collision suite à une manoeuvre imbécile d'un automobiliste pressé. Il meurt devant elle, sous ses yeux... Ceci n'est évidemment pas fait pour améliorer le mental de la jeune fille. Toute sa vie sera désormais placée sous le signe de la peur panique. Peur de tomber. Peur du ridicule.

Photo : Jeanne Rosa et Diastème © Richard Schroeder

Mais surtout, peur de l'autre conjuguée à la peur d'aimer, car aimer, c'est s'exposer à souffrir... Le sens de l'altérité propre à chacun de nous est peut-être né dans ce fabuleux et mythique Jardin d'Eden dont parle la Genèse, quand Eve offrit à Adam une pomme dans un geste spontané d'amour et de partage. Mais ce premier cadeau de l'une à l'autre fut ressenti ensuite par chacun d'eux comme un geste de désobéissance, de transgression, générateur d'un sentiment, devenu inné par la suite, de culpabilité par rapport aux consignes d'obéissance à cette entité, aussi improbable que monstrueuse, que d'aucuns appellent « Dieu »... A l'origine probablement de ce postulat paradoxal, pour chaque être humain à naître, de devoir assumer une innocence coupable, en quelque sorte...

Sur ce thème éminemment paradoxal, « oxymorique », Diastème a écrit un très beau texte sur mesure, pour Jeanne Rosa, jeune comédienne particulièrement douée. Bien qu'elle s'adresse à un personnage off que nous ne verrons jamais, qu'elle appelle « Monsieur », il s'agit bien du soliloque – ou même d'un dialogue sans réparties et sans répliques - d'une jeune femme, lancé comme un cri de détresse, peut-être à l'auteur, mais peut-être aussi à chacun de nous, spectateurs, un appel au secours pour, en allant enfin vers autrui, sortir d'une solitude insupportable, même si cela doit se faire au prix d'une souffrance... Car « dans tomber amoureux »... il y a aussi « tomber, Monsieur, je suis désolée »...

Personnage errant, innocente, parmi les dangers et les turpitudes du monde réel – il faut l'entendre raconter, avec un détachement qui n'est assurément que de façade, les leçons de fellation que sa mère lui donna un dimanche matin, tout en préparant le lapin à la moutarde, conseils qu'en fille obéissante, elle s'empressa de suivre – l'anti-héroïne créée par Diastème n'est pas sans rappeler la Justine de Sade. Victime innocente de tous les abominables libertins qu'elle a croisé sur sa route, Justine ressort de toutes ses mésaventures aussi pure et intacte qu'au début. A telle enseigne que son géniteur littéraire, pour s'en débarrasser, décide de la faire périr dans un orage, foudroyée par un éclair... A son personnage, Diastème n'en impose pas tant. Il lui demande seulement un peu de foi, de confiance en l'autre, en la vie enfin... Le cadeau essentiel à se faire à soi-même pour conjurer sa peur et, comme la Tour de Pise, continuer à pencher... sans tomber.

Henri LÉPINE
www.ruedutheatre.info

La Tour de Pise, de Diastème, avec Jeanne Rosa.
Théâtre La Luna, à 19 heures. Du 7 au 29 juillet 2006.
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