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Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

21 janvier 2007 7 21 /01 /janvier /2007 10:52
UN HUIS-CLOS D'INCERTITUDES

Pas étonnant que Dominique Surmais, après avoir monté Intérieur de Maeterlinck, ait désiré s’attaquer à la pièce de Jon Fosse. En effet, il y a des analogies entre la façon dont le symboliste belge traitait ses dialogues, ses personnages, ses atmosphères et le texte de cette pièce d’un Norvégien contemporain.

Le décor met le public dans le cadre. De la blancheur, quasi glaciale, par l’intermédiaire d’écrans géants qui découpent l’espace au scalpel. S’y projetteront des lueurs indéfinies, lumières de voitures qui défilent ou éclats d’un phare hélant des navires. À moins qu’il ne s’agisse de fleurs de givre, voire de papillons venant se brûler à quelque flamme. S’y incrusteront vers la fin les photos de famille qui disent le parcours d’un clan. Quelques objets familiers meublent parcimonieusement le reste du plateau.
 Photo TDC © DR

Dans cet espace clos - qui laisse néanmoins percevoir des lieux virtuels ouverts sur un indéterminable ailleurs – un couple s’installe. Il est là pour prendre possession de l’habitation qu’il vient d’acquérir en vue d’abriter son amour. L’homme et la femme débarquent au sein d’un univers étranger étrange. Il leur faudra apprivoiser ce nouveau territoire dans lequel ils aspirent à s’exclure du monde. Une présence indéfinissable pèse sur les lieux. Un malaise prend corps. Il se concrétise en la personne de l’ancien propriétaire, celui qui a vécu ici et a assisté à l’agonie de sa grand-mère. Le souvenir des occupants précédents s’insinue entre les amoureux. L’apparition de l’ex-occupant trouble les nouveaux venus.

Un langage tramé


Les mots disent. Les mots taisent. Les silences pèsent. Les silences parlent. Les phrases ressassent. Elles se tissent en denses magmas de paroles, compactes et cependant transparentes. Elles insistent, enlisent le temps. Se croisent avec des sens en train de se décaler, de laisser place aux sous-entendus, aux allusions, aux équivoques, à l’indicible parce que ‘indisable’. Sont prononcées avec détachement, lenteur, tension intérieure. Inutile de chercher des méandres psychologiques. Déceler la jalousie, la suspicion, le désir n’explique pas la pièce, ni son charme trouble.
Comme autrefois chez Maeterlinck, plus récemment chez Beckett et peut-être chez Sarraute, le langage est le protagoniste capital. Autour de lui s’agencent les actes ; de lui naissent les malentendus ; en lui gît une musique qui taraude par sa rumination, que ponctue une lancinante chanson.

Pas facile pour Jérôme Baëlen, Carmelo Carpenito et Magdaléna Mathieu de s’installer à la fois dans la banalité apparente des propos et l’inquiétude latente qu’ils véhiculent. Ils n’arrivent d’ailleurs pas toujours à dépasser l’artifice imposé par une diction à la limite de la neutralité. Subsiste, après avoir quitté la salle, un désarroi qui tient aux œuvres dont l’écoute ne suffit pas à épuiser la signification.

                 Michel VOITURIER (Lille)

Quelqu’un va venir

Texte : Jon Fosse (éd. L’Arche, 1999)
Distribution: Jérôme Baëlen, Carmelo Carpenito, Magdaléna Mathieu
Lumières: Thierry Dubief
Son et vidéo: Laurent Doizelet
Production : TDC

Au Salon de Théâtre à Tourcoing, du 11 au 14 janvier ; à l’Antre 2 de Lille du 17 au 24 janvier.


Bio de Jon Fosse :

Né en 1959 à Haugesund, un petit bourg proche de Bergen, sur la côte Ouest de la Norvège, Jon Fosse s'impose d'abord en littérature par une trentaine de romans, récits, essais, recueil de poèmes et livres pour enfants. Sa première pièce, écrite à l'instigation du jeune metteur en scène Kai Johnsen, date de 1994 (Et jamais nous ne nous séparerons). Suivent plusieurs pièces dont Le Nom (1995), Quelqu'un va venir, créé au Norske Teatret d'Oslo en 1996, et L'Enfant, créé au Théâtre National d'Oslo en 1997. Il obtient le prix Ibsen en 1996. Comme celle de son immense devancier Henrik Ibsen auquel il a consacré un essai, toute son oeuvre se développe en tension entre l'intimité du «hom», le foyer scandinave, et l'inquiétante immensité du fjord au bord duquel il a grandi.
Source : www.theatre-contemporain.net
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1 août 2004 7 01 /08 /août /2004 00:00

TAKONPRISKETAVU ?

Les performances contentent souvent les élites intellectuelles et désarçonnent le grand public. Le collectif belge MéTAmorphoZ – de Mons – nous plonge parfois dans la perplexité, mais son intention louable est de ne nous interpeller, pas de démonstration savante, pas d’autosatisfaction pédante, mais un travail parfois amusant, parfois étonnant, qui porte sur le théâtre et son rapport au public. Pêle-mêle : quels sont les apports et quels sont les dangers que constituent les technologies numériques ? Pour chaque élément constitutif du théâtre, texte, scène, interprétation, décor… jusqu’au comédien, piégé dans une toile qui se tisse sous nous yeux, comment proposer d’autres voies pour toucher le public ? Comment interagir avec le spectateur pour qu’il ne subisse pas le théâtre conventionnellement, on oserait dire « bourgeoisement », mais qu’il réagisse et s’interroge ?

Ce qui donne lieu à une séance inattendue d’arrachage de pages de chaque scène d’Hamlet, tandis que le comédien lit seulement les didascalies, à un concert de sonneries de portables – c’est le seul spectacle où l’on vous demande d’allumer votre téléphone à l’entrée – à un « manifeste pour une esthétique connectée » qui nous prédit : « Au XXe siècle, tout art aura un nom de festival. (…) Les théâtres de tout type susciteront la même nostalgie que le cirque aujourd’hui… ».



A la fois effrayant, et sidérant de réalisme. Le tout, tandis qu’un écran géant nous livre les pistes de réflexions en direct et institue un nouveau mode de communication entre le metteur en scène, Valérie Cordy, au clavier, à l’origine du concept, et le public.

Pour Valérie Cordy et sa complice, la plasticienne Natalia de Mello , le spectacle est « une proposition d’interrogation sur notre difficulté à être là devant vous. La scène nous semble coupée de nos préoccupations, rejouant sans cesse les scènes du passé d’une culture imposée, laissant pas ou peu de place notamment à l’entrée dans nos vies des machines informatiques et de l’intelligence artificielle. »A découvrir au théâtre des Doms, la vitrine permanente du savoir-faire artistique francophone wallon.


« j’tapLDkej’pe »
par le collectif MéTAmorphoZ. Contact : metamorphoz@poetic.com -Espaces plastiques et vidéo : Natalia de MelloComédien : Karim BarrasMise en scène : Valérie Cordy. Coproduction Manège de Mons, collectif MéTAmorphoZ (avec le soutien du FEDER).Lieu : Théâtre des Doms – 13 rue de la Croix • Avignon - Horaire : 18 h 15 - Durée : 1 h 10
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29 juillet 2004 4 29 /07 /juillet /2004 00:00

 

NOTRE DEVOIR D’HOMME

 

 

Avec un culot fou, Vincent Roca s’attache hardiment à nous prouver qu’il est un sale type ! Manque de pot : après une démonstration extrêmement brillante, jalonnée de pépites d’intelligence et de drôlerie, retaillées par un orfèvre minutieux, amoureux du travail bien fait, il ne nous convainc que d’une vérité : Roca est un type bien et un grand homme de scène.



Mine de rien, avec élégance, il aborde les souffrances de notre société barbare en en diagnostiquant les causes masquées. De plus en plus masquées par un système fascisant. Il débusque nos maux pour mieux nous renvoyer, avec une grâce grave, à notre devoir de lucidité. À notre devoir de résistance. À notre devoir de citoyen. À notre devoir d’homme.

Ce spectacle impeccable et nécessaire est mis en scène par François Rollin à la manière des grands : transparente.

 


Sur le fil dérisoire, de et avec Vincent Roca
Texte : Vincent Roca et François Rollin
Mise en scène : François Rollin
Assistante : Delphine Gustau
Lumières : Tom Klefstad
Costume : Sophie Weyeneth
Théâtre du Chêne-Noir, 8 bis, rue Sainte-Catherine
• Avignon
Tél. : 04 90 82 40 57
Du 8 au 31 juillet à 11 heures (1 h 20)
20 € et 14 €
 
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28 juillet 2004 3 28 /07 /juillet /2004 00:00
MU-MUSE

À l’heure de la Star Academy et de ses dérivés « sui generis », écouter, regarder et se laisser envoûter par Murielle Lantignac relève un peu de la parenthèse exceptionnelle et surtout de la délivrance.

Cette chanteuse, au physique de poupée et à la bonne humeur contagieuse, nous invite à nous replonger dans les parfums du passé, sans nostalgie, avec un plaisir guilleret. Les chansons de Joséphine Baker, Jeanne Moreau, Boris Vian et d’autres se succèdent, offrant une mosaïque de visages de femmes, des instants d’amour et d’eau fraîche, des p’tites tranches de vies, faites de misères passagères et de bonheurs furtifs.



Murielle sait se faire mutine – elle est aussi comédienne – et apporter une voix profonde et une modernité joviale pour conserver la gouaille sympathique d’antan sans tomber dans l’imitation rétro. Tant et si bien que le plaisir est réel même si les chansons de ce répertoire et de cette époque ne sont pas a priori votre tasse de thé. Elle a été formée par Anna Prucnal et Sarah Sanders a chanté avec Romain Didier au Casino de Paris en 2003 et collaboré avec Michel Legrand. Son complice Raphaël Bancou n’est pas un simple accompagnateur, c’est un pianiste qui a toute sa place dans ce véritable duo. Son humour et sa bonne humeur affleurent derrière chaque note. Il signe également quelques mélodies fort jolies, qui se marient avec justesse dans le patrimoine vocal proposé à nos oreilles enchantées.


Murielle Lantignac accompagnée au piano par Raphaël Bancou Contact : kamila@essaion.com
Lieu : La Parenthèse – 18 rue des Etudes • Avignon
Horaire : 16 h 30 - Durée : 1 heure
Réserver : 06 60 61 35 43
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28 juillet 2004 3 28 /07 /juillet /2004 00:00

 

IL VA FALLOIR RÉGLER LES COMPTES

 

 

Quoi de plus douloureux pour un fils que la perte de son père ? Arrabal, apparemment, ne s’en ai jamais remis. Mais quoi de pire si cette mort est due à la trahison de sa mère ?

Alors, il va falloir régler les comptes ! C’est le sujet de Lettre d’amour comme un supplice chinois. Supplice, car le fils ne peut s’empêcher d’aimer sa mère passionnément.



Tout le monde parle de l’interprétation extraordinaire de Victoria Cocias. En ce qui me concerne, je pense que son jeu est emphatique, larmoyant, grandiloquent, donc peu émouvant.

En revanche, Dragos Stemate, plus sobre, plus nuancé, plus intériorisé me convainc beaucoup plus, sans toutefois me tirer les larmes.

La mise en scène de Radu Dinulescu est fluide et efficace.

 


Lettre d’amour comme un supplice chinois, de Fernando Arrabal
Mise en scène : Radu Dinulescu
Avec Victoria Cocias (la mère), Dragos Stemate (le fils) et Emilia Dobrin (la voyante)
Décors et costumes : Sanda Mitache
Musique : QUED
Théâtre du Bourg-Neuf, 5 bis, rue du Bourg-Neuf • Avignon
Tél. : 04 90 85 17 90
Du 8 au 31 juillet à 19 heures (1 heure)
10 € et 7 €
Avec le concours de l’Agence intergouvernementale de la francophonie (ministère de la Culture)
 
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27 juillet 2004 2 27 /07 /juillet /2004 00:00

UN GRAND HOMME

Madame Raymonde est un des rares spectacles exceptionnels du Festival d’Avignon 2004. La messe est célébrée tous les soirs au Chien-qui-Fume, à minuit. L’heure du plaisir, l’heure de l’ivresse, l’heure de la vérité, l’heure de la beauté, l’heure de l’amour.



Sébastien Mesnil est un superbe Zèbre, un grand accordéoniste et un grand complice. Denis d’Arcangelo est un grand comédien, un grand chanteur, un grand musicien, un grand homme. C’est une « évidence » pour qui a une intelligence, pour qui a un corps, pour qui a un cœur, pour qui a une âme.

Après le « Ite, missa est ! », la vie sera désormais plus terne.

Pourquoi en dire plus ?


Madame Raymonde, de Philippe Bilheur et Denis d’Arcangelo
Avec Denis d’Arcangelo (chant et jeu) et Sébastien Mesnil (le Zèbre, accordéon et voix)
Lumières : Célio Ménard
Photo : Brigitte Enguerand
Théâtre du Chien-qui-Fume, 75, rue des Teinturiers • Avignon
Tél. : 04 90 85 25 87
Du 8 au 31 juillet à minuit, sauf le 20 juillet (1 h 15)
14 € et 10 €
Coréalisation Passion Pilote, 7-9, rue Moreau
• 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 48 13 13 13 - Fax : 01 48 13 13 14
et Théâtre du Chien-qui-Fume • Avignon
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24 juillet 2004 6 24 /07 /juillet /2004 13:02
DES RATS ET DES PUISSANTS

Laissant dans cette pièce une grande liberté d’interprétation aux comédiens et aux spectateurs, le prolifique Visniec livre une pièce un brin désarçonnante qui s’écoute comme un conte imaginaire et poétique et se regarde comme un spectacle onirique.


Un roi déchu et son bouffon martyr
Croupissent en une geôle insalubre.
Efféminé et veule, le roi que guette la potence
Compte sur Triboulet pour assurer sa défense.

Comment, clame le fou, rejoindre le triste sire
Dans un si triste sort ? Quels sont donc mes torts ?
Le roi se confesse et avoue volontiers du bouffon la vraie utilité.
Mais nulle oreille pour entendre que le fou a des droits
Ou que le pouvoir tient parfois dans ses doigts.

Le roi l’amadoue, le fait noble, échange sa couronne,
Tandis qu’au dehors la joie du peuple tonne.
Obsédé par l’histoire et la trace de ses faits,
Le coquet roitelet, marche vers la potence,
Se demande s’il garde son gilet.

Le bouffon pense. Le peuple danse.
D’étranges rats surgissent, à la présence inquiétante,
Devenant bientôt d’énormes peluches câlinantes.
Que cherchent ces rats, qui influencent l’histoire,
Quelle est leur faim, pouvoir, contre-pouvoir ?

Médias, industries et lobbies de tout poil
Seraient-ils allégories du repoussant animal,
Qui dans les souterrains, un autre monde tisse,
Et dans les poubelles des puissants toujours se glisse ?

Le peuple, toujours raconté, n’est jamais convoqué.
Se soucie-t-il même de son roi ? se demande-t- on parfois.
N’est-ce pas la télé-réalité qui s’est invitée
Dans cette cellule improvisée ?

Où est le peuple ? Qui dirige ?
Qui sont les faiseurs et les défaiseurs de roi ?
Qui laissent aux rats demain le soin de toute loi ?
Quel pouvoir détient la royale « pierre folisophale » ?
 
Sur ce chapitre-ci, Visniec nous laisse sur notre faim
Parions qu’il agit là à dessein,
Nous livrant une fable fort inspirée,
Qu’une mise en scène chimérique a su bien colorier.

Stephen BUNARD

Le Roi, le rat et le fou du roi
De Mateï Visniec
Avec : Jacques Hadjaje, Daniel Prat
Marionnettistes : Aurélie Audax et Yvan Raduszenska
Mise en scène : Gérard Audax
Par la Cie Clin d’œil (région centre) + d’infos : www.clindoeil-theatre.com

Lieu : Théâtre du chien qui fume 75, rue des Teinturiers
Horaire : 17h15
Réserver : 04 90 85 25 87
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20 juillet 2004 2 20 /07 /juillet /2004 00:00

UNE ÉNIGME D’INTERPRÉTATION

Les Partitions frauduleuses données par la Compagnie du Midi restent pour moi un mystère. Total. Une énigme d’interprétation et de direction d’acteurs dont je n’ai pas les clefs. Et, de toute façon, je n’ai même pas trouvé la serrure.



Pourtant la représentation partait sur les chapeaux de roue. Dans la première partie – la pièce en compte trois –, à l’âge de l’enfance, les cinq comédiens, excellents (la palme à Yann de Monterno), par leur jeu mécanisé, réglé comme du papier à musique, sont en osmose avec le propos de Visniec sur l’absurdité de notre système d’éducation.

Ensuite, et jusqu’à la fin, ça se dégrade de minute en minute jusqu’à la consternation totale. Le jeu part dans l’hystérie et « progresse » inéluctablement vers le n’importe quoi. À partir de là, Visniec a beau nous dire des choses intéressantes, je m’en fous comme de mon premier pantalon. Je ne vois que des ectoplasmes qui s’agitent frénétiquement sur le plateau, j’attends la délivrance de la fin. Elle n’arrive qu’au bout de une heure et dix minutes…


Partitions frauduleuses, de Matéï Visniec
Mise en scène : Antoine Chalard
La Compagnie du Midi, 13, bd de Magenta • 75010 Paris
Tél. : 01 53 28 10 21
Courriel : compagniedumidi@free.fr
Avec Françoise Guiol, Marie-Pierre Perez, Antoine Chalard, Florent Malburetet et Yann de Monterno
Lumières : Aurélien Amsellem
La Condition des soies, 13, rue de la Croix • Avignon
Tél. : 04 32 74 16 49
Du 7 au 31 juillet à 18 h 15 (1 h 10) jours impairs
15 € et 11 €
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19 juillet 2004 1 19 /07 /juillet /2004 00:00

LOGE DE LA FOLIE

Quand Gogol écrit ce texte, il a seulement 26 ans. La portée politique est évidente et intemporelle. Un contexte politique oppressant, une fragilité dans le rapport au monde, et la folie est à la portée de tous les êtres.

Petit fonctionnaire russe aux ambitions déçues, tailleur de plumes d’un vague directeur dans un quelconque ministère, Popritchine, en recherche de son propre relief, tisse méthodiquement la toile de ses tourments, qui le conduiront à une fin inexorable.



La folie. Il n’en est naturellement pas question comme une simple pathologie mentale, il y aurait en ce sens plutôt « des » folies. C’est d’abord le processus d’aliénation qui est dépeint. Un espoir, illusoire : l’évasion qu’apporte l’édification des mondes intérieurs ; une alerte : n’importe qui peut sombrer dans la confusion puis la démence ; une montée en tension : l’engouffrement lucide, pas toujours sous contrôle, d’un esprit qui ne voit pas d’autre issue possible que la folie et se laisse submerger, comme le stoïque qui braverait la marée.

Dans tous ces aspects, le jeu précis et nuancé de Nicolas Grandhomme témoigne de la fermentation de la souffrance et en égrène les étapes. Le souci est visible et permanent de montrer de son personnage la mécanique mentale. Tantôt savamment emporté, tantôt savamment reclus, toujours rongé par la routine et le procédurier, dévoré de l’intérieur par les désillusions amoureuses et trituré de l’obsession d’être quelqu’un, le comédien nous entraîne, spectateurs intrigués, vers l’irréversible déstructuration de Popritchine, puis vers sa recomposition. Comme si la folie pouvait ne pas être qu’une impasse, mais une promesse. Côté public, on semble vivre la montée aux enfers de derrière une vitre sans tain. Comme si une protection de fortune nous aidait encore un instant, un instant seulement, à garder suffisamment de distance, pour prendre conscience plutôt que prendre peur. Ce qui nous sépare des fous, ne sont-ce pas les garde-fous que nous savons encore interposer avant de franchir le seuil de la maladie. Mais jusqu’où ?

Le cadre étriqué et tout en pierres apparentes des Ateliers d’Amphoux apporte une contribution involontaire à l’emmurement graduel du personnage. Quelques centaines de cocottes en papier, dont la fabrication même me suggère le progressif cheminement vers la folie, et dont l’installation chaque soir constitue pour le comédien, à n’en point douter, une efficace concentration, entourent la scène et le personnage. Une camisole de cocottes en papiers !

Alors quand Nicolas Grandhomme a les larmes aux yeux à la fin du spectacle, ce n’est pas parce qu’il a bien intégré la méthode Stanislawski, mais parce que son jeu est sincèrement investi, fruit mûr d’une heure de jeu qui lui vient des entrailles. Voilà ce qu’est le théâtre, au-delà des larmes, au-delà des mots.


Journal d’un fou
de Nicolas Gogol
Adapté et joué par Nicolas Grandhomme
Mise en scène : Michel Bompoil
Heure : 22 h 30
Durée : 1 h 5 - du 8 au 31 juillet
Ateliers d’Amphoux 10-12 rue d’Amphoux
Réserver : 04 90 86 17 12
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19 juillet 2004 1 19 /07 /juillet /2004 00:00

PAROLES DE PIERRE

Comme le dit le texte de présentation, « Paroles de pierre croise des paroles d’aujourd’hui – témoignages-fragments de vie –, recueillies lors d’ateliers d’écriture et de paroles avec les habitants de différents quartiers d’Avignon, et des écritures contemporaines, notamment celles des auteurs Jean Cagnard et Ahmed Kalouaz ».

Pierres-paroles qui crissent, pierres-paroles qui bruissent, pierres-paroles qui passent, pierres-paroles qui ressassent, pierres-paroles qui se cassent, éclats de temps et d’espace universels.



Pierres-paroles qui se mâchent, se murmurent, se marmonnent, se mélangent, se mitoyennent, moutonnent sur la mer des mots de la mouise, de l’humour et de l’amour.

Les six acteurs-musiciens, Ana Abril, Djamel Adrar, Françoise Baut, Pascal Billon, Nicolas Chatenoud et Guigou Chenevier sont les magiciens-passeurs, les griots modernes de cette soirée hors normes, bourrée d’humanité, antidote au fascisme TF1, contrepoison à l’asservissement Medef.


Paroles de pierre
Mise en scène : Michèle Addala
Assistante : Agnès Regolo
Cie Mises en scène 1, rue de Bône BP 286
• Avignon Cedex 1
Tél. : 04 90 88 47 71 - Fax : 04 90 89 61 61
Courriel : mises.en.scene@wanadoo.fr
Avec Ana Abril, Djamel Adrar, Françoise Baut, Pascal Billon, Nicolas Chatenoud et Guigou Chenevier
Décors : Jean-Pierre Dutronc
Création lumières : Stanislas Pierre
Musique : Nicolas Chatenoud et Guigou Chenevier
Régie son : Manu Gilot
Vidéo, photos : Jean-Marc Peytavin et Alain Ceccaroli
Photo : Delphine Michelangeli
L’Entrepôt, 1 ter bd Champfleury • Avignon
Du 10 au 17 juillet à 22 heures (1 h 15)
12 € et 8 €
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Chronique FraÎChe