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Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

18 juin 2009 4 18 /06 /juin /2009 01:15
L'IMPORTANCE DE RÉSISTER, PAR TOUS LES MOYENS

Ce n'est pas une île paradisiaque mais une geôle infernale où deux hommes trouvent la force de s'épauler pour ne pas sombrer.

Cette île n'est pas nommée. Au départ il s'agit de Robben Island, Cape Town, en Afrique du Sud, où furent incarcérés Nelson Mandela mais aussi John Kani et Winston Ntshona, deux des auteurs de la pièce qu’ils ont tirée de leur pénible expérience, avec Athol Fugard. Pour la première fois, un auteur blanc écrivait avec deux Noirs, en plein apartheid.


En passe de devenir culte désormais, cette œuvre, née sur les lieux mêmes et créée dans la clandestinité en 1973, a passé les océans et été rejouée ensuite de Londres à Paris. La voici à nouveau portée à la scène, mais, sous les noms de Amani et Kembo, en version congolaise au texte légèrement adapté.

On peut (hélas facilement !) élargir l'histoire à tous les prisonniers d'opinion de par le monde, d'hier et d'aujourd'hui. Ici la particularité est que, dimension supplémentaire, Amani est Rwandais et Kembo, Congolais. Nous les voyons après un certain temps passé dans la même cellule, alors que la fameuse "Réconcilation" à l'échelon africain s'est tout à fait réalisée à leur niveau.

Et pourtant, dans cette geôle, pas "d'accompagnement ciblé", pas de "programme de réinsertion". Pour les politiques, bien au contraire, il s'agit de mater les esprits comme les corps, surtout quand il s'agit d'hommes ayant commis le pire des délits pour un régime dictatorial : celui de s'opposer à lui, d'avoir sa propre opinion.

La portée universelle de "l'Île", et d'"Antigone"

Dès l'entrée en salle, de chaque côté d'un plateau au décor minimaliste - deux paillasses, un seau - nous voyons un acteur filiforme et un autre plus massif, occupés à une étrange chorégraphie, un sinistre ballet. On imagine bien un soleil brûlant, du sable, chacun creusant son trou à la pelle, transportant la masse obtenue dans une brouette pour aller la déverser dans le trou que l'autre vient de creuser. Un travail absurde, visant à humilier. Sans un mot, tout est là : la forme actuelle de l'univers destructeur du bagne de jadis.


Pourtant Amani et Kembo ne se sont pas laissés annihiler complètement et préparent tant bien que mal une représentation théâtrale pour le personnel et les détenus de la prison. D'origine et de tempérament bien différents, ils ont réussi à s'entendre, à s'entraider.

 Amani essaie de dynamiser un Kembo qui peu à peu, après avoir été hostile à l'idée de jouer une femme, Antigone, prend conscience de la portée du mythe grec. C'est tout à fait convaincus, pénétrés à fond de leur personnage -  Amani Créon, Kembo Antigone - qu'ils arriveront à la représentation, dans une prison devenue théâtre l'espace d'un moment.

Théâtre dans le théâtre mais vraie vie se mêlent à la scène car ces deux acteurs professionnels sont réellement, l'un, Ados Ndombasi Banikina (Kembo), Congolais, l'autre, Diogène Atome Ntarindwa (Amani), Rwandais-tutsi, ce qui rend cette création d'autant plus impressionnante, interpellante, dure et pleine d'espoir.
 
Suzane VANINA (Bruxelles)


Au Théâtre de Poche, 1a chemin du Gymnase, Bruxelles du 9 au 27 juin 2009, 20 h 30 (sauf di, lu) (Tél: +32(0)2.649.17.27 – www.poche.be

En tournée : la pièce qui s'est préparée à Kisangani (Congo) avant Bruxelles, y retournera pour une tournée incluant également le Rwanda

L'île/The Island
Texte : Athol Fugard, John Kani, Winston Ntshona (1973)
Traduction française : Marie-Hélène Estienne  (éd. Actes Sud/Papiers, 1999)
Mise en scène : Roland Mahauden assisté de Olivier Maloba Banza Umba
Collaboration artistique : Claudio  Dos Santos
Scénographie : Olivier Wiame
Interprétation : Ados Ndombasi Banikina, Diogène Atome Ntarindwa
Lumière : Xavier Lauwers

Coproduction Théâtre de Poche/Groupe Taccens (Kisangani)

Photo © Stéphanie Jassogne

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18 juin 2009 4 18 /06 /juin /2009 01:09
UNE LÂCHETÉ INCOMMENSURABLE…

Celle d'un Biedermann* accroché à ses prérogatives et sa confortable petite vie, nous la voyons encore aujourd'hui dans cette version de la pièce de Max Frisch. Car il y aura toujours "des incendiaires", terroristes, rebelles de banlieues, révoltés de tout poil… des extrémismes de forme moderne.

Qu'on la définisse fable ou farce, l'œuvre première de Max Frisch n'est pas à prendre au premier degré et n'a rien perdu de sa force en plus de cinquante années. Elle fut en effet créée en 1952 et l'auteur, Zurichois, a immanquablement pensé à sa paisible ville, conservatrice et bien pensante et à certains de ses concitoyens.


Les méfaits de pyromanes font la une des journaux de la ville; les incendies s'y multiplient et alimentent les discussions de comptoir. N'est pas en reste à proférer des menaces bravaches : monsieur Biedermann, fabricant cossu de lotions capillaires. Quand un quidam équivoque, qui l'a entendu, vient frapper à sa porte, il va lui céder de plus en plus son terrain, lui qui, par ailleurs, entend ne pas être dérangé par un suicide pour renvoi dans sa propre petite entreprise. 

Aveuglé par son ego, croyant que tout peut s'acheter, ce brave négociant s'obstine à ne pas voir le danger, surtout quand "ce n'est pas chez nous, dieu merci !" que les sirènes retentissent… Il va jusqu'à pactiser et introduire lui-même le/s loup/s dans sa bergerie. Est-ce par veulerie qu'il se bouche les yeux et les oreilles ? Ou bien serait-ce, comme le dit le chœur, que "le destin s'est transformé en stupidité" ?

La présence de ce chœur chanté/parlé, façon antique, comme une parodie de tragédie grecque, met une distance tragi-comique, sarcastique, dans le drame et prépare la fin, quand le comportement de Biedermann atteint des sommets de bassesse et de compromissions. On ne peut que rire alors de la catastrophe prévisible.
 
Gielens, homme orchestre, attentif et actif à toutes les fonctions


On pourrait dire de Ruud Gielens, ce véritable homme de théâtre complet, bien connu de la scène flamande, qu'il est un artiste engagé politico-socialement. Il le revendique d'ailleurs tout en se démarquant de tout didactisme. C'est le même Gielens qui a réalisé "They Eat People" (fin 2008), une satire des coulisses du marketing politique.


Pour ce projet-ci également, il a été présent à toutes les étapes ainsi qu'à toutes les fonctions de sa réalisation. C'est qu'il s'est passionné pour l'œuvre de Frisch et y a vu des analogies avec l'époque actuelle faite d'individualisme forcené, d'égoïsme et d'opposition entre nantis et démunis (sans papiers, licenciés…).

Il a aussi apprécié l'humour caustique de Frisch car il a "le pouvoir de relativiser son propre moi", ce dont Biedermann est absolument incapable. C'est en cela qu'il est le personnage grotesque de la pièce, excellemment interprété par Willy Thomas, alors que "ses" femmes, l'épouse, Gert Portael et la bonne, Iris Van Cauwenbergh, paraissent plus sensées, mais soumises.

Fuyant le réalisme, Ruud Gielens a imprimé sa patte faite de dérision, d'actions parfois loufoques quand se disent des choses qui ne sont graves qu'en apparence et que les véritables enjeux sont ailleurs. C'est tout naturellement qu'on arrive à la sorte de folie qui s'empare du digne logis, avant qu'il ne soit détruit, à l'image d'une société qui se croit toute-puissante et porte ainsi en elle des germes de provocation et de violence.

Suzane VANINA (Bruxelles)

* qu'on peut traduire par "Honnête homme"…


Au KVS Bol, 9 quai aux Pierres de Taille, Bruxelles, du 6 au 19 juin 2009 à 20 h  (sauf di et lun) (Tél : +32(0)2.210.11.12 -  www.kvs.be)

Biedermann en de Brandstichters (Biedermann et les Incendiaires) (surtitré FR)
Texte : Max Frisch (1952)
Traduction en néerlandais : Sarah Elsa, Ivo Kuyl, Ruud Gielens
Mise en scène : Ruud Gielens assisté de Inge Floré
Dramaturgie : Ivo Kuyl
Décor : Marcel Thumas 
Interprétation : Claudine Bogemans, Stefaan Degand, Jeroen Perceval, Gert Portael, David Strosberg, Willy Thomas, Iris Van Cauwenbergh
Chœur : Bruno De Canne, Sander De Winne, Bob Selderslaghs, Wouter Vande Ginste
Costumes : Anne Weckx
Lumière : Marc De Boelpaep,
Musique : Jan Van Outryve

Photo © Bart Grietens

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10 juin 2009 3 10 /06 /juin /2009 17:15
UNE POCHADE DE POTACHES

Claude Semal et son complice Ivan Fox ont voulu renouer avec la tradition des marionnettes populaires insolentes en transposant Ubu d’une Pologne imaginaire du XIXe siècle à une bien réelle république française du XXIe.

Séduisante idée que celle de jouer sur la parodie pour caricaturer le plus caricaturable des hommes d’état actuel dont les tics physiques et les contradictions tant idéologiques  que comportementales font les délices des satiristes. Savoureuse initiative aussi que de prendre pour support les traditionnelles marionnettes à tringle qui sont l’apanage du Théâtre Al’Botroûle à Liège avec le personnage de Tchantché, du Théâtre de Toone à Bruxelles avec celui de Woltje et du Taptoe de Gand avec Pierke Pierlala.


Compte tenu de la causticité habituelle des spectacles de Claude Semal, « Ubu à l’Elysée » s’annonçait donc bien. Son récent « Cabaretje » qui traçait un portrait incisif de la Belgique en était le garant. Pourtant, les ingrédients manquent de piment et le public doit pallier lui-même un manque de sel.

Aucun risque de censure

Même admises les conventions des marionnettistes de tradition qui font toutes les voix des protagonistes et qui, vu la conformation de leurs poupées, sont contraints à des manipulations élémentaires, il est difficile ici d’accepter une diction très approximative. Les mots, débités à toute allure, auraient bien besoin d’une articulation mieux soignée pour qu’ils passent la rampe et fassent mouche en salle.

Le texte, ponctué d’incontestables trouvailles, est privé souvent du rythme des vers pastichés de l’auteur et de leurs rimes. À quoi bon s’amuser avec une forme littéraire si c’est pour ne pas en profiter avec la complicité du public ? Au surplus, là où on attendrait un mordant frondeur, il y a surtout des égratignures superficielles. Chez Guignol, c’est le gendarme qui se fait rosser ; sur Canal +, les Guignols massacrent sans pitié les gens de pouvoir ; chez Semal, c’est Guignol qui n’est pas assez rosse.

Cela n’enlève rien au charme désuet des pantins. Ni aux accents à saveur bruxelloise. Ni au décor qui rappelle les gravures sur bois d’un Frans Masereel, aux traits nombreux, aux formes angulaires, aux allusions symboliques multiples, au message contestataire. Ni aux sourires qui naissent sur les lèvres pour quelques bons mots, quelques phrases plus acides. Pas de quoi susciter la moindre des censures.

Michel VOITURIER (Bruxelles)


Au Théâtre Le Public, 60 rue Braemt à Bruxelles, du mardi au samedi à 20h30 jusqu’au 27 juin 2009.  ( 0800 944 44 - www.theatrelepublic.be). Reprise du 4 septembre au 10 octobre au Théâtre Le Public à Bruxelles.

En tournée : au festival Off au Gilgamesh, 2bis place des Carmes à Avignon du 8 au 30 juillet à 15h45  (+33 (0)6 74 38 79 20 - http://www.gilgamesh-theatre.net ) ;

Ubu à l’Elysée
Texte : Claude Semal (éd. Aden, 2009)
Marionnettes, jeu et scénographie : Claude Semal et Ivan Fox
Mise en scène : Laurence Warin
Marionnettes, création, jeu : Ivan Fox
Collaboration à la scénographie et gravure sur bois des décors Roby Comblain
Costumes, accessoires : Fabienne Damien
Musique originale et décor sonore : Frank Wuyts
Voix du conteur : Jean-Paul Dermont
Conseillers marionnettes : Maître Jacques Ancion (Théâtre Al Botroûle), Docteur José Maquet (Marionnettes Saint Gilloises),
Construction du décor : Claude Blin
Vidéographie : Tanguy Cortier

Coproduction Théâtre du Chien Ecrasé / Ca t’as vu ! / Charge du Rhinocéros / Théâtre le Public.


Photos © Cassandre Sturbois

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7 juin 2009 7 07 /06 /juin /2009 10:17
UN RÉGAL D'HUMOUR NOIR

Comment la mort - le crime gratuit -  peut devenir une raison de vivre, de différer son trépas, de se donner une seconde vie ! "On ne tue pas le temps, c'est lui qui nous tue", donc Potz, lui, va tuer pour (re)vivre.

Abram Potz ne paie pas de mine, qu'il aurait même patibulaire…Il est vieux et hargneux. Il dégage, dit-il, un "arôme précadavérique". Il n'inspire pas la sympathie et regarde son entourage avec une bonne dose de cynisme, qu'il pratique sans complaisance vis-à-vis des autres comme de lui-même.


Qui pourrait croire qu'il fut psychanalyste, ce pépère pervers ? Car Abram Potz, à 86 ans, revendique le titre de "doyen d'âge des tueurs en série" ! Nous assisterons à la révélation de cette vocation tardive, à son écolage pratique, à sa fin en apothéose délirante et chargée d'un terrible symbole.

Tel est le héros du roman éponyme de  Foulek Ringelheim qu'il a co-adapté pour la scène avec Catherine Brutout, metteure en scène, en y portant une écriture absolument délectable pour qui aime l'humour noir et savoure aussi le choix des mots et les répliques drôles. De quoi se tordre de rire quand bien même il faudrait qu'on pleure sur certains des sujets abordés parmi les plus douloureux !

Drôle et grave, cruel et touchant

Dans la carcasse ingrate, sont intacts un esprit vif, une lucidité impitoyable, un tonus encore bon, un cœur (trop) jeune même s'il a "le sexe grabataire"… Peu à peu, le petit vieux qui tient la scène pour un one (old) man show inhabituel, nous devient proche, tout abjecte qu'est sa conduite.


Il joue des contrastes et raconte ses propres contradictions. Il parvient même à nous toucher quand il récite fièrement un poème, qui n'est plus qu'un patchwork, afin de s'assurer du bon état de ses facultés mentales, quand il s'étonne et s'en veut de sa propre décrépitude… Alors même que, par ailleurs, il scandalise dans sa jubilation d'avoir occis des innocents, dans son attitude hypocrite envers les victimes collatérales de ses actes criminels.

S'il en a "marre d'être vieux", de ce "lent pourrissement sur pied", et ne fait que parler de lui, on peut élargir son cas à celui de tous ces seniors plus ou moins admis dans une société adepte du jeunisme en même temps quelle porte le souci d'une prolongation des âges : 3ème, 4ème, 5ème ? Grâce à l'arme redoutable de l'humour, de la dérision, Ringelheim fait, d'un doigt politiquement incorrect, toucher des vérités et sortir les têtes d'autruche de leur sable douillet.

Avec une mise en scène toute en subtilité et nuances, une scénographie aux lumières savamment étudiées de Catherine Brutout, une musique discrète, primesautière, jingle ponctuant les divers épisodes, avec, enfin et surtout, la présence magistrale de Freddy Sicx, voilà une seconde chance pour ce spectacle, programmé en début, puis refoulé en fin de saison, qu'il eut été bien regrettable de ne pas pouvoir applaudir !

Suzane VANINA (Bruxelles)
 
Théâtre du Méridien, chaussée de La Hulpe, 200, Watermael-Boitsfort - Tél : +32(0)663.32.10 et +32(02)663.32.11 – www.theatredumeridien.be du 26 mai au 20 juin 2009, 20 h 30 (sauf di et lu)

La seconde vie d'Abram Potz

Texte : adaptation de Catherine Brutout et Foulek Ringelheim (Luc Pire/ 2003)
Conseillère dramaturgique : Wendy Amrane
Co-scénographie : Alain Collet et Catherine Brutout
Lumières : Alain Collet
Interprétation : Freddy Sicx
Son : Jérôme Dejean
Costumes : Jackie Fauconnier
Maquillage : Arielle Bouchez

Photo © Théâtre du Méridien

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6 juin 2009 6 06 /06 /juin /2009 13:34
LES GROTESQUES AU ROYAUME DE L’ODEUR DU SANG

Le collectif « Abattoir fermé » se nourrit d’images et non de mots. Celles qu’il expose dans son spectacle sont sanglantes et érotiques, puisées tant dans l’histoire de l’art que dans celle du cinéma ou de la littérature. 

À l’origine inspirée par les « snuff movies », courts métrages sensés montrer des meurtres véritables perpétrés face caméra, cette création se réfère indirectement aux films d’horreur les plus débordants d’hémoglobine, à « L’Orange mécanique » de Kubrick  aussi bien qu’à son « Eyes Wide Shut ». Peut-être même y a-t-il référence au « Mondo cane » de Jacopetti et Cavara.


Les images picturales abondent, elles aussi. Tour à tour se lisent des déformations de faciès à la Bacon, des visages grimaçants de Goya et des grotesques, des postures selon William Blake, les corps contrefaits des délires de Jérôme Bosch. Voici même une sorte de pastiche de « La Leçon d’anatomie » de Rembrandt en des éclairages de clair obscur. 

S’y retrouvent les ambigüités des relations entre victime et bourreau, entre plaisir et souffrance, jouissance et mort telles qu’elles apparaissent dans des romans comme « Histoire d’O » de Pauline Réage, « La Négresse muette » de Michel Bernard, « Le Château de Cène » de Bernard Noël voire les œuvres du marquis de Sade ou des nouvelles de Georges Bataille.

Des codes désarçonnants

La représentation se déroule en séquences d’égorgement, de découpe, d’amputation. Sans néanmoins prendre modèle sur le Grand-Guignol et ses effets spéciaux, les actions mènent au sang. Le corps est l’enjeu des situations. Ses apparences sont dénudées. Ses usages sont déviés si pas dévoyés.

Comme en des rituels sectaires ou primitifs, chaque séquence est un cérémonial paradoxal où la volonté de montrer se couple d’une obsession à ne pas être épié. La dynamique du trio permet de donner présence à des tensions qui animent les violences sous-jacentes. Dérision rimaille ici avec provocation, ambiance de corrida avec trucida, effeuillage avec sanguinolents barbouillages. 

En dehors de la prestation très charnelle des acteurs, l’importance de la bande son est capitale. Comme la mise en scène, elle crée les climats, elle permet des chorégraphies pastiches du ballet traditionnel, elle revisite le baroque et la variété, le polar et le concert classique, le burlesque et le solennel, le sacré et le vulgaire. Elle donne le rythme du spectacle et réanime quelques moments où l’action s’étire et se répète.

Michel VOITURIER (Bruxelles)



Présenté aux Écuries du Théâtre de l’Ancre à Charleroi du 3 au 6 juin 2009. Durée : 1h15

Snuff/Index 1
Conception, mise en scène : Stef Lernous
Interprétation : Ruth Becquart, Chiel van Berkel, Tine Van den Wyngaert
Dramaturgie : Nick Kaldunski, Nathalie Tabury
Musique : Kreng
Scénographie : Leo de Nijs
Lumières et technique : Sven Van Kuijk

Production : Abattoir fermé (Malines)
Coproduction : Kaaitheater, kc nOna, L’Ancre (Charleroi), Campo

En tournée : le 24 aout 2009 au Waves-festival à Vordingborg (DK)  (www.cantabile2.dk)

Photo © Stef Lernous
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5 juin 2009 5 05 /06 /juin /2009 19:03
JUSQU'OÙ VA LA PURETÉ ?

Belle complicité féminine : Félicie Artaud nous conte la vie murée d’une princesse (Aurélie Namur) à l’âme aussi pure qu’une page blanche. Née d’une double écriture poétique et drôle à la fois, une  jeune geisha naît et meurt par les mots et le corps. Un moment plein de douceur et de violence, pour tous les adolescents passés ou présents.

Blanche est parfaite. Son kimono, immaculé. Ses activités quotidiennes, réglées par un esprit aussi sain que le corps. Elle évolue à petit pas dans son palais d’ombres. Enfermée en elle-même, elle rayonne de pureté, protégée par des murs qui n’appellent pas à la fuite. Elle est heureuse et pleine d’innocence. La voilà pourtant en proie à l’appel de la pièce secrète, où le corps mue, exprime ses fantasmes, se métamorphose.


Dans cet espace clair-obscur, elle ne règne plus en maître absolu : les émotions prennent le dessus, jusqu’à faire jaillir, dans un énorme râle qui se transformera en flux incessant, la voix, puis la parole. Des mots qui s’amusent dans une bouche jusque là muette, des phrases insensées qui invitent à la fête et aux tentations…Mais comment les gérer ?

La princesse se meut dans une mise en scène épurée, faite d’ombres et de lumières. Elle passe peu à peu de l’innocence à une furie incontrôlable. Les deux actrices, qui se sont trouvées lors d’une formation avec Pippo Delbono, redonnent au corps toute sa puissance évocatrice. Dans un mélange d’acrobatie, de danse et de gestuelle qui ont quelque ressemblance avec l’univers du Nô japonais, elles nous emmènent dans un univers onirique, s’éloignant de la narration pour accepter les symboles et se laisser guider par le corps. Un spectacle pour toutes les âmes sensibles…

Julie LEMAIRE (Bruxelles)

Du 26 mai au 6 juin à 20h30 (excepté les mercredis à 19h30) au théâtre Océan Nord (www.oceannord.org), Rue Vandeweyer 63/65 à  Bruxelles, 02/242 96 89


Et Blanche aussi

Texte : Aurélie Namur
Mise en scène, dramaturgie, collaboration à l’écriture : Félicie Artaud
Interprétation : Aurélie Namur (La princesse), Félicie Artaud (La conteuse)
Collaboration artistique : Sophie Leso
Costume princesse : Geneviève Joris
Couture : Geneviève Joris, Patricia Coppé
Costume conteuse : Claire Farah
Création lumière : Dimitri Joukovsky
Décor sonore : Antoine Blanquart
Découpe palais, visuel du spectacle : Antoine Blanquart


Diffusion : My-Linh Bui

Photo@Michel Boermans

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26 mai 2009 2 26 /05 /mai /2009 01:00
ANIMAUX & HUMAINS SANS FRONTIÈRES

La conceptrice du projet, Dominique Roodthooft, a d'abord contracté les verbes "to smash" et "to match", puis décomposé le mot obtenu, "smatch". Chaque lettre lui a fourni un chapitre d'une sorte de vidéo-conférence largement illustrée, entre performance, installation et (tout de même) théâtre !

Trois semaines durant, au 9e KunstenFESTIVALdesArts, une trentaine d'œuvres très novatrices, expérimentales pour certaines, exceptionnelles en tout cas, dans toutes les langues, dans tous les genres, ont été proposées à travers une vingtaine de lieux théâtraux et publics bruxellois. Ces spectacles de formes diverses, performances, danse, installations, expositions, films…sont dus à des créateurs internationaux, venus des quatre coins du monde ou de Belgique. Ils témoignent de l'extraordinaire richesse culturelle de notre époque.


Dans un dispositif bifrontal, les spectateurs de « Smatch »  se placent en vis-à-vis, séparés par une sorte de grand comptoir, parmi les effluves de plats qui mijotent, sans qu'en soient distraits quatre acteurs en activité. Un laboratoire, dans tous les sens, plutôt qu'un plateau de théâtre.

S'agit-il bien d'acteurs ? Plutôt des performeurs… S' y ajoutent des oiseaux dans une volière, des poissons dans un aquarium et différents intervenants filmés, dont surtout la philosophe Vinciane Despret, très convaincante et passionnante, qui fournit la matière de base et les liens, à savoir ses considérations sur les rapports homme/animal.

Les projections vidéo donneront l'occasion de voir un parfait imitateur et fan du porc, des éleveurs, des animaux divers parmi les plus dévalorisés  (rats, porcs, moutons, vaches, singes, oiseaux…)  nous parlant à leur façon. En conclusion : une sociologue connue, Isabelle Stengers.

Vers l’optimisme


En direct, trois femmes : Dominique Roodthooft, metteure en scène, elle-même actrice, Anne-Cécile Vandalem, Mieke Verdin, commentent, s'interpellent dans les deux langues nationales, ou bien comme le performeur Messieurs Delmotte, se livrent à toutes sortes d'activités ludiques comme placer des poissons dans des ampoules de verre en suspension, détailler une carte de Belgique farfelue, coiffer des masques animaliers… et autres joyeusetés dont le sens paraît parfois obscur.

Il ressort de cette expérience atypique une volonté d'optimisme, de montrer que la citation mise en exergue "si vous désespérez un singe vous ferez exister un singe désespéré", est applicable à l'humain comme à l'animal. Il est démontré en passant, n'en déplaise aux partisans des clivages absolus inter-espèces, que les animaux sont capables non seulement de souffrir mais de penser et de… mentir.
.

Suzane VANINA (Bruxelles)
 
Du 17 au 23 mai 2009 au Beursschouwburg dans le cadre du KunstenFESTIVALdesArts - Tél : +32(0)70.222199 -  www.kfda.be

SMATCH
Bilingue FR et NL

Concept : Dominique Roodthooft assistée pour la scénographie de Claudine Maus et Valérie Perin
Dramaturgie : Vinciane Despret
Traduction NL : Mieke Verdin
Distribution : Messieurs Delmotte, Anne-Cécile Vandalem, Mieke Verdin
Lumière : Jojo Bosmans
Musique : Pierre Kissling

Production : Le Corridor (Liège/Belgique)

Photo © Piet Janssens

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26 mai 2009 2 26 /05 /mai /2009 00:32
LE BIEN DE L'AUTRE AVEC OU MALGRÉ LUI

Qui n'a pas entendu, à son petit niveau, le détestable "c'est pour ton bien" qui visait à lui faire avaler (dans tous les sens) n'importe quoi ?

Sous-titrée « L'Inertie et la Fureur », la pièce de Lorent Wanson est définie par son auteur comme une fable contemporaine, qui emprunte d'ailleurs au maître du genre, La Fontaine. Ses quatre personnages n'ont d'autres noms que : La Première, L'Autre, L'Homme, L'Enfant.

La Première/Patricia Ide, plutôt BCBG, est mariée à l'Homme/Alexandre Trocki, un chirurgien ex-humanitaire, reconverti en esthéticien renommé. Le couple a adopté l'Enfant, un gamin noir d'une froideur affective étrange vis-à-vis de ses parents aimants.


Par hasard, au détour d'une ruelle sordide, la Première encombrée de sacs de marques, tombe littéralement sur son amie de jeunesse, l'Autre/Magali Pinglaut, devenue volontairement SDF. Celle-ci, jadis militante des droits de l'Homme, a voulu s'exclure de cette société qui la dégoûte, vivre non plus d'idées mais de concret. Elle s'assure, « dans l'Inertie », un abri et une nourriture périmée, à l'arrière d'une grande surface.

Dans la perspective des fêtes de fin d'année, impensable de laisser quelqu'un dehors. La « Fureur » de faire (re)vivre l'Autre à tout prix saisit alors la Première.

Sauver le monde ?

 
Comme eux, animé des meilleures intentions, le metteur en scène Lorent Wanson, ayant pas mal bourlingué lui-même, évoque ces humanitaires, ces coopérants. Ils ont succédé aux colons qui eux-mêmes avaient chassé les marchands d'esclaves. Mais ils sont toujours persuadés que leur culture, leur mode de vie, leurs acquis sociaux sont les meilleurs. Ils partent du concept connu de l'homme apprenant à être pêcheur qui se débrouillera mieux que celui recevant le poisson pêché.

 L'Européen/ne-qui-sait-tout aime jouer les Pygmalion, à petite et vaste échelle, modeler l'Autre et tout régenter. On parle de long terme, on voit loin pour eux. Et si eux, contre toute attente, n'en avait que faire des beaux projets importés ? Et si l'Enfant adopté, se sentait déraciné, ailes coupées, lui qui doit réciter, avec réticence, la fable du Loup et du Chien : "…Attaché? Vous ne courez donc pas où vous voulez ?" Alors que le désenchantement du trio d'adultes est largement étalé, on ne saura pas grand chose de cet enfant, présence beaucoup moins bavarde et qui restera secrète.

La pièce aborde d'autres thèmes voisins et tient parfois de l'échange philosophique davantage que de dialogues de la vie courante. Pas de séquences mais des stations, comme un calvaire, chacune annoncée en voix off de même que des didascalies, parfois redondantes, pour situer les endroits de chute de ces christs d'un nouveau genre.
Moins de pathos (dû aussi à l'interprétation) et un peu d'humour, au lieu de cette volonté de distanciation générale, auraient davantage touché un public qui reste quelque peu en dehors de ce débat d'idées.

Suzane VANINA (Bruxelles)

Au Théâtre Le Public du 14 mai au 27 juin 2009, 20 h 30 (sauf di et lu) –Tél : 0800/944.44 – www.theatrelepublic.be
 
La Meilleure volonté du monde

Texte : Lorent Wanson (édit. Lansman, 2009)
Mise en scène : Lorent Wanson assisté de Anne-Catherine Regniers et Quentin Geldof
Scénographie, costumes : Olivia Barisano
Interprétation : Patricia Ide, Magali Pinglaut, Alexandre Trocki. En alternance : Adrien-Xavier Sanlevo Alokpovi, Guillain Dena Mugabo, Nathan Musungay
Lumière : Jérôme Zvonock
Musique : Jean-Sébastien Bach
Arrangements : David Nuñez
Chansons : Lorent Wanson

Production : Théâtre Le Public

Photo ©  Cassandre Sturbois

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26 mai 2009 2 26 /05 /mai /2009 00:28
DEMAIN, VRAIMENT ? OU SERAIT-CE DÉJÀ  AUJOURD’HUI ?

"L'Homme démoli"* en route vers "l'Ultime Rivage"**, face à un horizon encore flou, avant "Le meilleur des mondes"***?

En deux parties (ô combien distinctes), intitulées respectivement : "comédie silencieuse" (soit la réalité, la société muette et soumise) et "tragédie musicale" (soit le rêve, l'utopie au sens large), voici la dernière création d’Armel Roussel et Utopia2. En d’autres termes, un Avant, rempli de constats, de doutes, de remise en cause des "ismes" : communisme, capitalisme… et de questionnements ; et un Après qui part en explosions, mais pas encore en perspectives d'avenir ni vers des solutions, bonnes ou mauvaises.


Il n'y aura pas de Demain solidement construit comme dans l'imagination fertile des écrivains de science-fiction... mais l'éruption d'une énergie qui permet tous les possibles. Pourtant, même s'il se revendique d'autres et multiples sources pour son écriture originale, on peut déceler chez Armel Roussel  des influences venues des maîtres du genre. Le  titre d'abord, et certains extraits de l'essai de Philip K.Dick, "Si ce monde vous déplaît", notamment...

L’Avant et l’Après

La "comédie silencieuse" n'est pas une succession de saynètes mais une fresque d'abord émouvante, sans cesse mouvante, un chorus d'actions simultanées d'où se dégage parfois un soliste, un duo, des échanges, microcosme sociétal dans lequel circulent et se croisent les soumis, les exaltés, les révoltés…diverses figures emblématiques pour aboutir au "Grand Fracas" dickien.


Suit "la tragédie musicale" dans un décor sonore étonnant où voisinent Woody Guthrie, Luis Mariano, Beethoven… Du haut d'un mirador, Karim Barras est seul à incarner le grand DJ, ou le grand Ordinateur-Organisateur à moins que ce ne soit  le "Grand O" dickien …

Les autres comédiens, tous rompus à changer instantanément de personnage et de style, ont été l'amoureuse, le névrosé, la mystique, l'écolo, la savante, le sportif… et la sainte trinité familiale, dont le fils qui fut l'Ado au long cri d'angoisse révoltée qui avait clos la première partie et déclenché sans transition le grand chambardement.

À la fin réapparaît la figure passéiste de "La Pieta" - la mère éternelle, qui impressionna tant Philip K. Dick - un final merveilleux de naïveté retrouvée, vers la mer, éternelle aussi… Mais auparavant ils auront envoyé des avions de papiers vers "Ailleurs et Demain", avec l'idée qu'on ne fait pas la révolution… on l'est. Réconfortant.

Comme un « work in progress »

Armel Roussel est cet homme de théâtre complet qui aime s'entourer des mêmes comédiens, qu'il connaît bien puisqu'il les a formés. Dans cette famille, sa compagnie "Utopia2" (tiens !), chacun peut, doit, s'exprimer ! Ici plus que jamais chaque acteur eut le choix de personnages et d'écriture dans le cadre d'un projet commun, sachant qu'une première chez Armel Roussel signifie le début d'un processus en évolution constante au fil des représentations.


L'homme a acquis, avec "Pop ?" surtout, une réputation de provocateur, comme si seule la mise à nu du corps, fréquente dans ses spectacles, était dérangeante. On le dit maintenant adouci, apaisé, avec ce dernier opus qui met à plat et bouscule des acquis branlants et des vérités fondamentales vacillantes. Il est vrai qu'il n'y a pas cette fois d'autre dévoilement que celui d'une paire de seins. Le corps tout autant que la parole a, toujours et encore, droit d'expression chez "Utopia2", droit de libre expression !

Suzane VANINA (Bruxelles)

* Alfred Bester, **Ursula K.Le Guin,  ***Aldous Huxley

Au Théâtre Varia, rue du Sceptre, 78, 1050 Bruxelles, les 8, 9, 12, 14 mai, 20 h 30 (me 13.05, 19 h 30), ensuite du 6 au 8 octobre au Théâtre de la Place à Liège. Reprise au Varia du 16 au 24 octobre 2009 - Tél : +32(0)2.640.82.58 – www.varia.bewww.theatredelaplace.be - www.utopia2.be

Si demain vous déplaît
Mise en scène, écriture, scénographie : Armel Roussel assisté de Julien Jaillot
Ecriture, interprétation : Karim Barras, Yoann Blanc, Lucie Debay, Sofie Kokaj, Mathilde Lefèvre, Nicolas Luçon, Pascal Merighi, Florence Minder, Vincent Minne, David Murgia, Uiko Watanabe
Lumière : Patrice Lechevallier
Son : Brice Cannavo
Musique live : Karim Barras
Chorégraphie : Pascal Merighi
Costumes : Mina Ly

Co-production : Utopia2/Théâtre Varia/Théâtre de la Place/CD de la CFWB

Photo © Danièle Pierre

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22 mai 2009 5 22 /05 /mai /2009 16:12

UNE AUDACIEUSE TRANSPOSITION DE "LA RONDE"

Le titre, traduit par l'auteur lui-même, est "Préliminaires" mais les scènes choc ne seront pas édulcorées tant est déterminé son propos de dénoncer l'hypocrisie de la société sud-africaine.

L'auteur et metteur en scène sud-africain Mpumelelo Paul Grootboom a trouvé dans une pièce datant d'une autre époque et venue d'un autre continent de curieuses similitudes avec les dérives de la société sud-africaine. C'est d'abord grâce au cinéma, avec "Eyes Wide Shut" de Stanley Kubrick, que Grootboom a découvert Schnitzler puisque le film se base sur une de ses nouvelles, "Traumnovelle".


Mais que peut bien évoquer en 2009, en Afrique du Sud, à Prétoria, cette sorte de vaudeville dû à un méecin viennois qui, de proche en proche, nous fait assister à chaîne d'ébats amoureux? Le sexe justement, thème éternel, avec le pouvoir et l'argent, auxquels ils s'associe si facilement. Ici comme ailleurs, hier comme aujourd'hui.

Alternances et échanges de couples, la pièce pourrait paraître aujourd'hui futile, joyeusement cynique et amorale mais elle n'a rien perdu de son pouvoir de heurter, tant le Sexe (consenti ou non) reste un sujet dit délicat, un tabou, et l'agression sexuelle plus choquante que la violence de situation et de mots. N'y a-t-il pas, encore en ce moment même, des interdits sur certaines expositions, à Venise ou en Chine? Les baisers, plus ou moins simulés, sont acceptables au théâtre; pas les coïts, si l'on en juge par certaines réactions du public.


D'une pertinence -et secouante! -actualité


Soldat, pasteur, professeur, bourgeois, ministre, étudiant, barmaid, gamine, actrice, prostituée... les trois acteurs et les trois actrices se partagent les différents rôles. Ils se donnent à fond dans le parti pris de réalisme qu'inspirent au metteur en scène les séquences de la pièce et le jeu généralement très expressif des comédiens noirs. 


À la fin, il place un ajout qui ne doit rien à Schnitzler, où un politicien corrompu y va d'une diatribe cynique et provocatrice, prônant un "gouvernement de cohésion nationale", en fait une dictature, devant la prostituée qu'il vient de tabasser. Mais c'est à elle, plus digne, se relevant de ses blessures physiques et morales, que sera donné le dernier mot, la révolte, l'espoir.

Dans une langue parlée et non littéraire, l'adaptation de M.P.Grootboom est une peinture sans complaisance des types et des situations propres aux townships. D'où le boycott que Grootboomco continue à subir de la part des critiques, surtout blancs, de son pays. Il a été surnommé "Township Tarantino", ce qui en dit long sur la réputation qui lui est faite.

Il faut savoir que les artistes et dramaturges de là-bas jouent un rôle important dans la remise en question d'un statu quo qui tente de supprimer les libertés civiques en profitant d'une démocratie encore jeune et inexpérimentée.

Suzane VANINA (Bruxelles)


Au KVSBox, du 13 au 16 mai 2009, 20 h 30 dans le cadre du KunstenFESTIVALdesArts (www.kfda.be)


En anglais surtitré FR et NL

 

Foreplay

Texte : libre adaptation de "La Ronde"("Der Reigen") d'Arthur Schnitzler, pièce originale écrite en1896 éditée en 1903, puis interdite, qui dut attendre 1921 pour sa création théâtrale à Berlin. Elle connut des adaptations au cinéma : Max Ophüls(1949), Vadim (1964) et un opéra de Philippe Boesmans & Luc Bondy créé à La Monnaie, Bruxelles en 1993.

 


Ecriture, mise en scène : Mpumelelo Paul Grootboom

Chorégraphie : Israel Bereta

Interprétation : Mandlenkosi Gaduka, Koketso Mojela, Excellentia Mokoena, Ntshepiseng Montshwa, Boitumelo Eugne Shisana, Sello Zikalala

Lumière, décor : Wilhem Disbergen


Production : Face Productions& Projects (Afrique du Sud) - Coordination : Ofentse Mothusi


Photo © kfda


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Chronique FraÎChe