6 juin 2009
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LES GROTESQUES AU ROYAUME DE L’ODEUR DU SANG
Le collectif « Abattoir fermé » se nourrit d’images et non de mots. Celles qu’il expose dans son spectacle sont sanglantes et érotiques, puisées tant dans l’histoire de l’art que dans celle du cinéma ou de la littérature.
À l’origine inspirée par les « snuff movies », courts métrages sensés montrer des meurtres véritables perpétrés face caméra, cette création se réfère indirectement aux films d’horreur les plus débordants d’hémoglobine, à « L’Orange mécanique » de Kubrick aussi bien qu’à son « Eyes Wide Shut ». Peut-être même y a-t-il référence au « Mondo cane » de Jacopetti et Cavara.

Les images picturales abondent, elles aussi. Tour à tour se lisent des déformations de faciès à la Bacon, des visages grimaçants de Goya et des grotesques, des postures selon William Blake, les corps contrefaits des délires de Jérôme Bosch. Voici même une sorte de pastiche de « La Leçon d’anatomie » de Rembrandt en des éclairages de clair obscur.
S’y retrouvent les ambigüités des relations entre victime et bourreau, entre plaisir et souffrance, jouissance et mort telles qu’elles apparaissent dans des romans comme « Histoire d’O » de Pauline Réage, « La Négresse muette » de Michel Bernard, « Le Château de Cène » de Bernard Noël voire les œuvres du marquis de Sade ou des nouvelles de Georges Bataille.
Des codes désarçonnants
La représentation se déroule en séquences d’égorgement, de découpe, d’amputation. Sans néanmoins prendre modèle sur le Grand-Guignol et ses effets spéciaux, les actions mènent au sang. Le corps est l’enjeu des situations. Ses apparences sont dénudées. Ses usages sont déviés si pas dévoyés.
Comme en des rituels sectaires ou primitifs, chaque séquence est un cérémonial paradoxal où la volonté de montrer se couple d’une obsession à ne pas être épié. La dynamique du trio permet de donner présence à des tensions qui animent les violences sous-jacentes. Dérision rimaille ici avec provocation, ambiance de corrida avec trucida, effeuillage avec sanguinolents barbouillages.
En dehors de la prestation très charnelle des acteurs, l’importance de la bande son est capitale. Comme la mise en scène, elle crée les climats, elle permet des chorégraphies pastiches du ballet traditionnel, elle revisite le baroque et la variété, le polar et le concert classique, le burlesque et le solennel, le sacré et le vulgaire. Elle donne le rythme du spectacle et réanime quelques moments où l’action s’étire et se répète.
Présenté aux Écuries du Théâtre de l’Ancre à Charleroi du 3 au 6 juin 2009. Durée : 1h15
Snuff/Index 1
Conception, mise en scène : Stef Lernous
Interprétation : Ruth Becquart, Chiel van Berkel, Tine Van den Wyngaert
Dramaturgie : Nick Kaldunski, Nathalie Tabury
Musique : Kreng
Scénographie : Leo de Nijs
Lumières et technique : Sven Van Kuijk
Production : Abattoir fermé (Malines)
Coproduction : Kaaitheater, kc nOna, L’Ancre (Charleroi), Campo
En tournée : le 24 aout 2009 au Waves-festival à Vordingborg (DK) (www.cantabile2.dk)
Photo © Stef Lernous
Le collectif « Abattoir fermé » se nourrit d’images et non de mots. Celles qu’il expose dans son spectacle sont sanglantes et érotiques, puisées tant dans l’histoire de l’art que dans celle du cinéma ou de la littérature.
À l’origine inspirée par les « snuff movies », courts métrages sensés montrer des meurtres véritables perpétrés face caméra, cette création se réfère indirectement aux films d’horreur les plus débordants d’hémoglobine, à « L’Orange mécanique » de Kubrick aussi bien qu’à son « Eyes Wide Shut ». Peut-être même y a-t-il référence au « Mondo cane » de Jacopetti et Cavara.

Les images picturales abondent, elles aussi. Tour à tour se lisent des déformations de faciès à la Bacon, des visages grimaçants de Goya et des grotesques, des postures selon William Blake, les corps contrefaits des délires de Jérôme Bosch. Voici même une sorte de pastiche de « La Leçon d’anatomie » de Rembrandt en des éclairages de clair obscur.
S’y retrouvent les ambigüités des relations entre victime et bourreau, entre plaisir et souffrance, jouissance et mort telles qu’elles apparaissent dans des romans comme « Histoire d’O » de Pauline Réage, « La Négresse muette » de Michel Bernard, « Le Château de Cène » de Bernard Noël voire les œuvres du marquis de Sade ou des nouvelles de Georges Bataille.
Des codes désarçonnants
La représentation se déroule en séquences d’égorgement, de découpe, d’amputation. Sans néanmoins prendre modèle sur le Grand-Guignol et ses effets spéciaux, les actions mènent au sang. Le corps est l’enjeu des situations. Ses apparences sont dénudées. Ses usages sont déviés si pas dévoyés.
Comme en des rituels sectaires ou primitifs, chaque séquence est un cérémonial paradoxal où la volonté de montrer se couple d’une obsession à ne pas être épié. La dynamique du trio permet de donner présence à des tensions qui animent les violences sous-jacentes. Dérision rimaille ici avec provocation, ambiance de corrida avec trucida, effeuillage avec sanguinolents barbouillages.
En dehors de la prestation très charnelle des acteurs, l’importance de la bande son est capitale. Comme la mise en scène, elle crée les climats, elle permet des chorégraphies pastiches du ballet traditionnel, elle revisite le baroque et la variété, le polar et le concert classique, le burlesque et le solennel, le sacré et le vulgaire. Elle donne le rythme du spectacle et réanime quelques moments où l’action s’étire et se répète.
Michel VOITURIER (Bruxelles)
Présenté aux Écuries du Théâtre de l’Ancre à Charleroi du 3 au 6 juin 2009. Durée : 1h15
Snuff/Index 1
Conception, mise en scène : Stef Lernous
Interprétation : Ruth Becquart, Chiel van Berkel, Tine Van den Wyngaert
Dramaturgie : Nick Kaldunski, Nathalie Tabury
Musique : Kreng
Scénographie : Leo de Nijs
Lumières et technique : Sven Van Kuijk
Production : Abattoir fermé (Malines)
Coproduction : Kaaitheater, kc nOna, L’Ancre (Charleroi), Campo
En tournée : le 24 aout 2009 au Waves-festival à Vordingborg (DK) (www.cantabile2.dk)
Photo © Stef Lernous