25 février 2009
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MOISISSURE AMOUREUSE
Franz Xaver Kroetz ne s’est pas contenté d’écrire une tragédie du quotidien, dans laquelle deux sous-héros se déchirent un plat de boulettes et les fesses de leur négresse : il s’est aussi attaqué, avec une poigne naturaliste, à mettre en scène son propre texte, traduit de l’allemand. Qui d’autre en aurait eu l’audace ?
Un appartement miteux accueille un début de scène érotique, puis voit arriver l’ancien mari, déchet ambulant qui vient réclamer son dû – des slips propres – et prouver qu’il sera encore vivant tant qu’il pourrira l’existence misérable de son épouse. Cette dernière, princesse d’un royaume pitoyable, fière et soumise à la fois, balaie le plateau de cour à jardin, de sa nouvelle conquête au mari, sans trouver ni tendresse ni réconfort.
Mère de cinq enfants qu’elle entretient seule ainsi que son intérieur (« tout est propre »), battue, ridiculisée par sa chtouille (MST), prise comme bout de viande indésirable, elle accepte ce cauchemar sans force, à moitié nue, la cigarette au bec. Quant au petit dernier, jeune prince machiste et violent, il joue à l’invisible mais se délecte de la barbarie conjugale et de boulettes-purée. Et si le prince charmant n’existait pas ?
Grandeur et décadence
Tout est dit, vu, vécu en temps réel. Le public plonge dans les profondeurs de la misère sociale à travers des dialogues torchés mais criants de justesse, ou reste insensible face à un jeu qui s’étend trop, dans l’espace et le langage. Si nos trois acteurs sont brûlants de ce réalisme cru qui secoue notre conscience, ils se détournent de l’horreur par un parler lent, des accents populaires poussés à l’extrême, un faux contact entre les comédiens.
Finis les jeunes premiers et le langage de Racine : populisme, vulgarité et petitesse humaine sont le lot de notre vie, que le théâtre se doit, parfois, de représenter. Voilà qui est fait. Une pièce dont le sujet parlera à tous, dont l’expression scénique choquera certains.
Au Théâtre National (Studio) du 11 au 21 février 2009 à 20h30, Boulevard Emile Jacqmain, 111-115, Bruxelles (02 203.41.55 – www.theatrenational.be)
Negerin
Texte et mise en scène : Franz Xaver Kroetz assisté de Tatjana Pessoa
Traduction : Danielle De Boeck
Lumières : Joël Bosmans
Costumes et accessoires : François Lefebvre
Interprétation : Laurent Caron, Didier De Neck, Anne Tismer
Durée du spectacle : 1h30.
Coproduction : Festival de Liège / Théâtre National
Photo © DR
Franz Xaver Kroetz ne s’est pas contenté d’écrire une tragédie du quotidien, dans laquelle deux sous-héros se déchirent un plat de boulettes et les fesses de leur négresse : il s’est aussi attaqué, avec une poigne naturaliste, à mettre en scène son propre texte, traduit de l’allemand. Qui d’autre en aurait eu l’audace ?
Un appartement miteux accueille un début de scène érotique, puis voit arriver l’ancien mari, déchet ambulant qui vient réclamer son dû – des slips propres – et prouver qu’il sera encore vivant tant qu’il pourrira l’existence misérable de son épouse. Cette dernière, princesse d’un royaume pitoyable, fière et soumise à la fois, balaie le plateau de cour à jardin, de sa nouvelle conquête au mari, sans trouver ni tendresse ni réconfort.
Mère de cinq enfants qu’elle entretient seule ainsi que son intérieur (« tout est propre »), battue, ridiculisée par sa chtouille (MST), prise comme bout de viande indésirable, elle accepte ce cauchemar sans force, à moitié nue, la cigarette au bec. Quant au petit dernier, jeune prince machiste et violent, il joue à l’invisible mais se délecte de la barbarie conjugale et de boulettes-purée. Et si le prince charmant n’existait pas ?
Grandeur et décadence
Tout est dit, vu, vécu en temps réel. Le public plonge dans les profondeurs de la misère sociale à travers des dialogues torchés mais criants de justesse, ou reste insensible face à un jeu qui s’étend trop, dans l’espace et le langage. Si nos trois acteurs sont brûlants de ce réalisme cru qui secoue notre conscience, ils se détournent de l’horreur par un parler lent, des accents populaires poussés à l’extrême, un faux contact entre les comédiens.
Finis les jeunes premiers et le langage de Racine : populisme, vulgarité et petitesse humaine sont le lot de notre vie, que le théâtre se doit, parfois, de représenter. Voilà qui est fait. Une pièce dont le sujet parlera à tous, dont l’expression scénique choquera certains.
Julie LEMAIRE (Bruxelles)
Au Théâtre National (Studio) du 11 au 21 février 2009 à 20h30, Boulevard Emile Jacqmain, 111-115, Bruxelles (02 203.41.55 – www.theatrenational.be)
Negerin
Texte et mise en scène : Franz Xaver Kroetz assisté de Tatjana Pessoa
Traduction : Danielle De Boeck
Lumières : Joël Bosmans
Costumes et accessoires : François Lefebvre
Interprétation : Laurent Caron, Didier De Neck, Anne Tismer
Durée du spectacle : 1h30.
Coproduction : Festival de Liège / Théâtre National
Photo © DR