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Coaching prise de parole

           

Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

6 janvier 2009 2 06 /01 /janvier /2009 10:09

QUAND CLOUZOT RENCONTRE CLOUSEAU


Une enquête policière déjantée dans le milieu des trafiquants d’art avec pour toile de fond une soirée anniversaire qui vire au cauchemar, tel est le cocktail hilarant que propose ce spectacle à l’écriture alerte et défendu par des comédiens en grande forme. Du rire assuré, sans autre prétention que de divertir.

S’apprêtant à fêter dignement son anniversaire dans un restaurant chic avec sa nouvelle épouse Nathalie, Alain voit débarquer coup sur coup sa fille, les bras chargés d’un couffin garni du lardon qu’elle veut faire garder, sa concierge qui vient de se voir pousser des cornes et veut quitter les lieux illico en laissant son canari en pension et deux flics pitoyables qui élisent domicile dans l’appartement du couple pour observer les allées et venues de voleurs dans le cadre d’un trafic d’œuvre d’art.


L’ensemble peine un peu à se mettre en route, même si les rires fusent rapidement après le lever de rideau. Mais l’entrée en scène de la commissaire, à laquelle Sandra Biadalla apporte une drôlerie mêlée d’une psycho rigidité de fausse coincée absolument délicieuse, va mettre de l’ordre à tout cela ou plutôt tout le désordre nécessaire pour que le spectacle décolle vraiment.


C’est alors un festival où s’enchaînent calembours et jeux de mots dans des répliques qui cinglent avec vivacité et rythme, le tout dans des situations les plus loufoques que rehausse un comique de répétition aussi classique qu’efficace, décliné sous diverses formes, accents à couper à la tronçonneuse ou poêle à frire à travers la figure. Sans la moindre vulgarité mais avec une intelligence du texte (voire une pertinence dès qu’il s’agit de brosser le pléonastique crétinisme des flics) et une excellente interprétation collégiale, ce spectacle haut en couleurs, aussi pétillant qu’une soirée au champagne et  au chevet duquel on pourrait croire qu’ont été convoqués Clouzot (le cinéaste aux scénario hyper chiadés) et Clouzeau (l’inspecteur barge de Blake Edwards) est un antidote assuré contre la morosité ambiante. Salvateur par les temps qui courent…


Franck BORTELLE (Paris)


Faites comme chez vous

De Bruno Charles Lugan

Direction artistique : Jacques Décombe

Mise en scène : Delphine Gustau et Bruno Lugan

Avec Bruno Lugan, Stéphanie Dentone, Sandra Biadalla, Julie Jacovella, Alexandre Delimoges, Bertrand Nadler, J.Prieure (en alternance avec Yves Roux)

Comédie de Paris, Rue Fontaine, 75009 Paris (Métro Blanche ou Pigalle)

Locations : 01 42 81 00 11

Les dimanches et lundis à 20h30 jusqu’au 8 mars puis en tournée (www.faitescommechezvous.com)

Durée : 1h20

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4 janvier 2009 7 04 /01 /janvier /2009 17:00
ARLETTY, MARLENE ET LES AUTRES…

Caroline Loeb, tout en poursuivant son travail de metteur en scène de spectacles musicaux qui font un tabac, remonte sur scène. Et revisite à sa manière les chansons d’avant-hier, hier et aujourd’hui. Avec une bonne dose d’humour et surtout d’autodérision.

Rien ne semble pouvoir l’atteindre, Caroline Loeb. Sa meilleure défense, c’est la contre-attaque, autrement dit l’autodérision. Moyen efficace de faire taire les langues vipérines qui auraient la mauvaise idée de lui chercher des nœuds dans le coton. Ou dans la ouate qui la rendit célèbre dans toute l’Europe. Son succès des années 80, elle le revendique haut et fort. Et de quelle manière ! On n’en dira que ce qu’il faut en dévoiler à savoir que c’est d’une irrésistible drôlerie.


Cette drôlerie est le fil rouge de ce spectacle qui sonne le retour sur scène de cette femme pas comme les autres. Des chanteuses d’un tube, il y en a eu pléthore à la même époque. Mais ce qui différencie Caroline Loeb des Corynne Charby et autres Desireless, c’est surtout une forme d’arrogance ravageuse et une vivacité d’esprit qu’un franc parler traduit par un sens inné de la répartie.

Gainsbourg toujours

Rien d’étonnant qu’avec ce bagout elle se sente proche de toutes ces femmes qui n’ont pas leur langue dans la poche. Mae West, Marlène, Régine, Annie Cordy, Yvette Guilbert, Joséphine Baker sans oublier la reine de la gouaille, l’inoubliable Arletty, la Garance des « Enfants du Paradis » et la Madame Raymonde d’ « Hôtel du Nord ».

Les hommes seront aussi présents car le féminisme n’est guère de mise chez Miss Loeb. Un hommage à Fred Astaire qui en dit long sur les capacités de certains individus se propulsant « découvreurs de talents », à Aristide Bruant, figure incontournable des années folles et bien sûr à Gainsbourg, très présent grâce à Régine, Bardot et surtout Jane Birkin dans une très jolie version de « Di dooh dah » où Caroline, dans le pull rouge vif de l’album « Ex fan des sixties » fait revivre l’homme à tête de chou.

Cette femme qui se raconte à travers ses idoles nous offre un bien joli moment de vie, un parcours tellement atypique loin des standards prédigérés de son époque et de celles qui ont suivi. Déformant à l’envi certaines chansons pour en extraire la substantifique drôlerie ou, pour l’hommage à Madonna qui clôture le spectacle, la pluralité des lectures, Caroline Loeb, sans nous éloigner de nos chères références, nous en propose une version. Sa version. Personnelle et forcément attachante.

Franck BORTELLE (Paris)

Mistinguett, Madonna et moi
Un spectacle musical de et avec Caroline Loeb
Accompagnée à l’accordéon par  Patrick Brugalières
Ecrit et mis en scène avec Nicolas Vallée
Chorégraphies : Cécile Proust et Jelly Germain
Mise en voix : Nausicaa Meyer
Collaboration artistique : Laurent Balandras


Du jeudi au samedi à 22 heures
Théâtre des Blancs Manteaux, 15 rue des Blancs Manteaux, 75004 Paris (Métro : Hôtel de Ville)
Tél : 01 48 87 15 84
Durée : 1h20

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4 janvier 2009 7 04 /01 /janvier /2009 16:57

PAR LA GRACE DE L’ABSURDE


Ovni théâtral à plus d’un titre, cette « Page 157 » ravira les esprits épris de vagabondages délurés où l’on aime à perdre pied dans les méandres d’un récit baroque et surréaliste. Les cartésiens purs et durs auront plus de mal à entrer dans cet univers où l’absurde est érigé en règle d’or. La mise en scène et le jeu des comédiens pourraient en revanche mettre tout le monde d’accord.


La scène est plongée dans un noir total. Une voix à la radio annonce en l’espace de quelques minutes une hausse des températures de 50 degrés. Il est quatre heures du matin. Phil reçoit la visite de sa voisine qui veut lui emprunter son aspirateur. Phil est de ces êtres éreintés par la vie : sa femme est partie, il n’a plus de boulot, son appartement s’enfonce, son frigo est HS et envoie des fax…



En quelques minutes, le décor est planté. Nous n’allons pas naviguer sur un long fleuve impassible avec dans une main la rame du cartésianisme et dans l’autre celle du réalisme, apanages du genre policier duquel ce spectacle se revendique pourtant. L’imaginaire va submerger les quelques balises auxquelles on espérerait se raccrocher. Il faut accepter de se laisser mener dans cette histoire de mémoire incertaine, d’attraction des corps et de confusion des sentiments.


Entre « Un jour sans fin » et « La Rose pourpre du Caire »


Pour peu que l’on accepte cette règle implicite que propose ce récit plutôt déroutant, le plaisir est réel. Un univers nous ouvre ses portes. Fantasque et absurde dans lequel il est bon de s’enfoncer pour mieux revenir à la surface lorsque une relative logique vient soudain nous remettre sur pieds. Courte trêve, bien sûr…


Au milieu de cet univers fantasmatique que souligne d’ailleurs un décor en trompe l’œil, les personnages apportent en revanche un solide réalisme, qu’incarne notamment le magnifique Wilfried Romoli, danseur étoile de l’Opéra de Paris. Jamais démonstratif de son savoir-faire dans ce domaine en se contentant de quelques mouvements chorégraphiés, il offre un jeu de comédien d’une virilité et d’une puissance surprenantes. Ses partenaires féminines lui donnent joliment la réplique.


Sans les citer, ce spectacle fait allusion à « Un jour sans fin » et « La Rose pourpre du Caire », deux films auxquels il ressemble plus qu’il n’y paraît, tant par sa drôlerie que son inventivité, son décalage que l’impression durable qu’il laisse dans les esprits. Positivement ou négativement durable ? C’est à chacun, avec ses capacités à se laisser emporter loin des rivages du convenu, d’en décider.


Franck BORTELLE (Paris)


Page 157

D’Emmanuel Dupuis et Bruno Dallaporta

Mise en scène conçue par Serge Lalou et réalisée par Valérie Berman et Serge Lalou

Avec Agathe Berman, Karine Huguenin, Claire Lise et Wilfried Romoli

Lumières : Jeanne Lapoirie

Décors : Laure Lepelley

Costumes : Valérie Berman

Musique originale : Baptiste Houssin


Théâtre de l’Essaïon, 6 rue Pierre au Lard, 75004 Paris (Métro : Hôtel de Ville ou Rambuteau)

www.essaion.com

Réservations : 01 42 78 46 42 et points de ventes habituels

Du 17 novembre 2008 au 20 janvier 2009

Les lundis et mardis à 21h30

Durée : 1h20



Photo Alberto PITOZI

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4 janvier 2009 7 04 /01 /janvier /2009 16:54
UNE COMEDIE ETHYLIQUE

Lenglumé est englué dans une sale affaire.  Et ce n’est pas sa gueule de bois matinale qui va le remettre d’aplomb. Il suffit d’un fait divers sanglant pour faire vaciller les bonnes mœurs de la bourgeoisie et plonger dans un chaos carnavalesque jubilatoire…

Quand l’alcool est dans l’alcôve, les idées sont brumeuses et les matins douloureux… Rien ne va plus dans le petit intérieur bourgeois de Lenglumé. Pendant que Norine, femme aimante, s’agite dans tous les sens, pour préparer le baptême du dernier né du cousin Potard, Justin, le domestique flegmatique, découvre les indices de culpabilité d’un Lenglumé, qui a passé sa nuit dehors. Celui-ci, la bouche pâteuse et le cerveau encore imbibé des liqueurs de la veille, essaie de retrouver ses esprits en se demandant comment il a pu ramener de sa nuit d’ivresse Mistingue, un vieux camarade de classe. Un flou aviné qui laisse la pièce en flottement jusqu’à la lecture du fait divers, relatant le terrible assassinat d’une jeune charbonnière, rue de Lourcine qui relance l’action. Oui, mais le journal date d’il y a vingt ans ! Les coïncidences servent les quiproquos cocasses, Lenglumé et Mistingue noient leur chagrin dans l’alcool et leurs doutes en chansons.


Boulevard du crime…


Le vaudeville part à vau-l’eau et commence à voguer dans la fantaisie pour tanguer au final dans un absurde qui dépoussière un texte parfois un peu daté.  L’excentricité, pleine d’ivresse, évolue en folie furieuse d’un petit meurtre entre amis. Les bons mots sont mis en valeur par une mise en scène qui redonne à Labiche ses lettres de noblesse d’auteur satirique. L’Affaire de la rue de Lourcine est avant tout une critique des bonnes mœurs bourgeoises de l’époque.

Le décor est d’ailleurs mouvant, comme les mœurs finalement. Norine fait trembler les portes quand elle passe, et la scène, qui tourne au rouge et penche dangereusement comme une façade prête à s’écrouler,  finit par être vue à travers les yeux avinés du duo d’ivrognes. Jérémie Lippmann, en grossissant le trait des personnages qui virent au grotesque, offre une lecture novatrice du théâtre de Labiche qui finit par flirter avec Becket dans un univers où l’absurde devient le fil conducteur. Le duo Mistingue (Pierre Berriau)/Lenglumé (Yann Collette) ouvre le bal d’une exubérance clownesque riche en couleurs.

Le texte de Labiche s’accorde sur les chansons composées par Ours et  Lieutenant Niholson et renforce sa modernité au rythme d’un reggae endiablé. Le carnaval de personnages continue grâce à la présence pétillante de Christine Pignet en Norine, qui a des allures de petite fille qui cache une bêtise. Sans oublier la double interprétation tout en subtilité d’Alexandre Michel (Justin et Potard) qui canalise l’énergie tourbillonesque de ses partenaires de farce.
 

Ange LISE (Paris)

L’affaire de la rue de Lourcine
De Labiche
Mise en scène de Jérémie Lippmann
Avec Pierre Berriau, Yann Collette, Alexandre Michel et Christine Pignet
Musique originale : Ours et Lieutenant Niholson
Décor et costumes : Laura Léonard
Lumières : Vincent Millet

A la Pépinière Théâtre,
7 rue Louis Le Grand, 75002, Paris

Du 19 décembre au 31 janvier, du mardi au samedi à 21h, matinée du samedi à 16h
Réservations : 01 42 61 44 16
Durée : 1h10



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26 décembre 2008 5 26 /12 /décembre /2008 22:39
L'AMOUR A MORT

Salle comble. Public fortement jeune et passionné. C'était il y a quelques jours au théâtre du Gyptis à Marseille où Françoise Chatôt présentait sa mise en scène des "Caprices de Marianne" d'Alfred de Musset. Une production pleine de surprises bientôt de retour sur les planches. Le romantisme qui traverse la pièce n'a rien perdu de sa vigueur et de son sens chez les jeunes de ce XXIe siècle naissant.

Pas mort le romantisme. Son vocabulaire peut-être, deux siècles après. Mais c'est bien une semblable désespérance à mordre pleinement sa vie qui explose dans ce monde toujours bordé par autant de réglementations que de préjugés. Françoise Chatôt, qui co-dirige le théâtre du Gyptis à Marseille, en fait une démonstration particulièrement pertinente dans sa mise en scène des "Caprices de Marianne" d'Alfred de Musset.


D'abord ce décor, cubiste et amovible. Il se transforme en deux ou trois pichenettes pour devenir place publique, ruelle ou villa bourgeoise. Les costumes restent discrets sur les dates ou l'époque. Et puis il y a ces séquences de musiques et danses hip hop que l'on pouvait craindre et qui s'intègrent joliment et renforcent le rythme déjà soutenu de la mise en scène. Elles viennent aussi rappeler que ces "Caprices" se développent sur fond de carnaval napolitain plein de masques, de mouvements et de surprises.

Ces partis pris scéniques fonctionnent avec bonheur à la langue directe de Musset. Les jeux de l'amour portent ici, sans pudeur, leur poids de mort. Coelio est déjà totalement désespéré lorsqu'il entre en scène. C'est un rêveur triste incapable de déclarer sa passion à la belle et toute jeune Marianne. Celle-ci reste encapuchonnée par son barbon de mari (Claudio) qui lui laisse comme seules sorties de se rendre aux Vêpres. Le noir domine. Octave est bien l'ami fidèle de Coelio mais comme son double inversé : un libertin convaincu, un noceur qui risque sa vie comme on joue à la roulette. On sait que le premier, Coelio, demande au second, Octave, d'intervenir pour lui auprès de Marianne....

Musset ne cache rien du drame qui se joue, de ces amours qui tournent mal. La scène où Hermia raconte à son fils Coelio cette aventure d'un  jeune et bel homme qui était fou d'elle et qui, éconduit, se suicida, est l'une des clés évidentes de la pièce. Françoise Chatôt réussit son pari de nous faire entendre cette parole toujours présente dans nos sociétés du XXIe siècle. D'autant mieux réussi qu'il est porté par des comédiens très percutants et des danseurs de talent.

Guillaume Clausse (Octave) jongle avec son personnage de façon remarquable. La voix et le corps épousent les variations troublantes de sa mascarade jusqu'au moment de la vérité. Grégoire Roger (Coelio) campe superbement cet homme blessé par nature. Un bémol quand même pour la belle Alice Belaïchi (Marianne) qui, l'autre soir, a mis du temps avant de trouver le ton juste de cette femme loin d'être soumise par son vieux mari. Et coup de chapeau aux danseurs.


Jean-Pierre BOURCIER (Paris)

"Les Caprices de Marianne"d’Alfred de Musset. La pièce créée en novembre-décembre dernier au Théâtre GYPTIS de Marseille, sera reprise dans les prochaines semaines et partira en tournée.

Mise en scène : Françoise Chatôt.
Chorégraphie : David Llari / Compagnie Sun of Shade.
Scénographie : Claude Lemaire.
Lumières : Roberto Venturi.
Costumes : Éliane Tondut.
Musiques : Dominique Viger.

Coproduction Compagnie Chatôt-Vouyoucas / Théâtre Gyptis
& Compagnie Sun of Shade / David Llari.


Avec Agnès Audiffren, Alice Belaïdi, Guillaume Clausse, Cathy Darietto, Pierre-François Doireau, Grégoire Roger, Philippe Séjourné et les danseurs Christophe Lepage, Fouad Mansouri et Nassir Moktari

Théâtre Gyptis 136, rue Loubon 13003 Marseille
Réservations 04 91 11 00 91
www.theatregyptis.comxa

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26 décembre 2008 5 26 /12 /décembre /2008 22:30
RIRE OU MOURIR, IL FAUT CHOISIR
 
Il paraît qu'on va tous mourir et que ça n'arrive pas qu'aux autres. Une rumeur qui a tendance à se vérifier autour de soi. Alors, puisque c'est inéluctable, quoi de mieux que fêter ça au théâtre, en compagnie de joyeux lurons prêts à transgresser tous les tabous ?
 
Ca commence par une chanson grivoise débitée par une chanteuse impassible qui va subir un mauvais quart d'heure et ça finit par un enterrement pour le moins inoubliable. Du berceau au caveau, comme dans « Le Sens de la vie » des Monty Python dont certaines saynètes semblent s'inspirer, les six protagonistes, trois garçons, trois filles, promettent un moment hors du temps et bourré d'un humour corrosif. De prime abord, on peut craindre le côté succession de sketches avec pour seul fil conducteur cette idée de la mort qui plane. En général, ce genre de spectacle ne tient pas la route, s'essouffle, s'étire, surtout quand il dure près de deux heures et qu'il commence fort. Car les premières scènes sont tout simplement irrésistibles... Notamment grâce à une mémorable parodie des émissions télévisées enfantines à base de ventriloque et de marionnette chargée de répandre le bonheur. Sauf que... Monsieur Pipo, la marionnette en question, est plutôt polissonne et bourrée de mauvaises intentions. A coups de répliques bien senties, elle dézingue les enfants handicapés, les personnes âgées, les ratons-laveurs et... la ventriloque qui finira étranglée par son Pipo devenu incontrôlable et qu'on retrouvera lors d'une autre séquence hilarante.


 
La mort leur va si bien...
 
Bien sûr, les sketches ne sont pas tous de la même volée. Mais les baisses de régime sont si peu nombreuses et durent si peu longtemps, qu'elles sont à peine perceptibles. Et le spectacle de continuer à travers des danses ridicules et hystériques, Franck Sinatra, un polar des années 50, une petite fille adepte du Burkina Faso et dont la mère est transformée en donneuse d'organes par un chirurgien cynique... Tout y passe et trépasse. Jusqu'au clou du spectacle, bourré de dynamite : Guignol, Gnafron et le gendarme enquêtent sur une impératrice chinoise qui a dérobé les bottes velues de Dick Rivière. Ainsi annoncé, cela peut sembler banal. Mais il faudrait rajouter que Guignol est violent et membre du Ku Klux Klan, que Gnafron est alcoolique et le gendarme, complètement stupide. Et que ça se termine en charpie pour le moins foutraque...
 
Outre des textes ciselés, une mise en scène au couteau (dans tous les sens du terme), c'est la cohésion des comédiens qui emporte l'adhésion. Aucun ne tire la couverture à soi (même s'il est à souligner la performance vocale et physique de Nicolas de Canteloube alias Mister Pipo et Rosabelle Forzy alias Gnafron, entre autres), on sent le groupe soudé, qu'il s'amuse et s'investit de toutes ses tripes. Et heureusement que l'on ne meurt pas de rire durant cet ovni théâtral : on n'aurait hélas pas l'occasion d'y retourner.
 
Julien WAGNER (Paris)
 
On va tous mourir (et autres saynètes désopilantes)
Texte : Olivier Benaddi.
Mise en scène : Olivier Benaddi.
Avec : Olivier Benaddi, Nicolas de Canteloube, Camille Champagne, Anaïs Fabre, Rosabelle Forzy et Cédric Le Gallo.
Décors : Patrick Lalanne.
Costumes : Clémentine Monsaingeon.
 
Du 8 décembre 2008 au 20 janvier 2009, chaque lundi et mardi, à 21h.
 
Théâtre de Nesle, 8 rue de Nesle, 75006 Paris. Métro Odéon.
Réservation au 01.46.34.61.04.
Tarifs: de 12 à 16€.

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20 décembre 2008 6 20 /12 /décembre /2008 15:54
LE BEL INVENTAIRE QUE VOILA

Près de deux heures durant, son timbre vocal à la Nougaro doublé d’une indiscutable élégance scénique hypnotise un public à sa cause acquise. Immense interprète de Prévert depuis des années, Jean Guidoni consacre au poète un complet tour de chant où la noirceur s’invite sous une ironie mordante saupoudrée du surréalisme.

Avec la simplicité des grands, Guidoni arrive sur une scène meublée seulement des instruments de ses musiciens et éclairée dans des tons à dominantes rouge et bleu. Les émanations de fumée qui le précèdent et qui « starifient » celui qui va débouler sur la scène ne trompent personne et semblent déjà un clin d’œil goguenard du chanteur à ce show-biz où depuis toujours sa place n’est guère sous les flashs des photographes et moins encore dans les pages des tabloïds.


Avec l’élégance du dandy, complet noir du meilleur (parce que du plus simple) goût, il donne immédiatement le ton. L’univers de Jacques Prévert qu’il connaît sur le bout des vers sera ici décliné dans son acception la plus noire, les titres choisis résonnant résolument du côté de la mort, des réprouvés, de la guerre, du meurtre. Cet univers des rues coupe-gorges que Prévert immortalisa avec ses scénarios des films de Renoir et Carné à l’époque du réalisme poétique, âge d’or du cinéma français.

Sous la noirceur, le rire

Mais Guidoni n’a pas la veine tragique abrupte de l’écorché vif qui prend le spectateur pour un déversoir de ses névroses. A cela, il colle au plus près avec l’auteur de « Barbara » qui vous fera rire en évoquant la famine  («Grasse matinée ») comme pour vous dire que la faim n’est pas la fin et que la vie, notre seul luxe ici-bas cher à Brassens, continue c(r)oûte que c(r)oûte. Le tour de chant se tourne donc résolument vers l’humour - forcément décalé, parfois grinçant- et la plaisanterie. Les mélodies, dont il faut souligner l’éclectisme, existent sans dénaturer le texte, ce qui constitue un vrai gage du talent des compositeurs, la versification de Prévert, tout en  ruptures, ne se prêtant pas si aisément que ça à une mise en musique. Le chanteur, de sa voix grave, parfois caverneuse, proche de Nougaro, s’approprie tout cela avec une confondante aisance et diablement expressionnisme.

Le jeu de scène ne se décline pas en chorégraphies endiablées outrancièrement théâtralisées mais les déplacements, moins improvisés qu’ils n’y paraissent, confèrent à cette prestation vocale impressionnante, à laquelle il convient d’associer les quatre musiciens, cette élégance infinie qui inscrit ce chanteur hors norme dans la droite ligne des Sheller, Nougaro et autres Souchon et Le Forestier. Un inventaire à lui tout seul.

Franck BORTELLE (Paris)

L’album  « Etranges étrangers » dont sont extraites la plupart des chansons de ce tour est en vente partout.

Jean Guidoni chante Prévert
Avec sur scène Fabrice Ravel-Chapuis, Manu Feramus, Serge Utgé-Royo, Julien Amédro

Durée : 1h50

Vu à l’Européen, Rue Biot, 75017 Paris

Photo : Anne-Marie PANIGADA

Tournée
Janvier : le 16 au Sabot d’Or à Saint Gilles (35), les 24 et 25 au Cadran à Evreux (27)
Février : les 5 et 6 à la Reine Blanche (Paris 18ème)
Mars : les 16 et 17 au Vingtième Théâtre (Paris 20ème), le 24 au  
Festival Le Quesnoy enChanteur(s) à Le Quesnoy (59), les 27 et 28 à la  
Salle des Rancy à Lyon (69)
Mai : le 14 au Théâtre d’Aurillac (15), le 13 ou 15 (à confirmer) à la  
Baie des Singes à Cournon (63)
Juin : le 16 à  Arras (62)
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20 décembre 2008 6 20 /12 /décembre /2008 15:48

Vice comique de fabrication


Peut-on rire de tout ? Non, il ne s’agit pas d’un sujet de bac, juste une question qui s’impose à la vision de Kebab.com. Humour potache, blagues à deux balles et réparties de bas étage… Un spectacle oubliable et contournable, à rater absolument.

 

Le pitch, qui tient du théâtre de boulevard, est pourtant relativement séduisant. Pascal vient d’emménager à Barbès dans un petit studio minable. Son père, producteur de cinéma, débarque à l’improviste (à ne pas confondre avec « Alain Proviste », voir explications plus bas), accompagné de sa nouvelle épouse, Carole. C’est sans compter sur l’arrivée de Franck, vendeur de kebabs, et de Patricia, qu’il a draguée pour Pascal sur le net. La soirée doit alors s’improviser autour d’un plat de raviolis en boîtes, entre quiproquos et révélations.

Voilà pour ce que dit le dossier de presse.

 

Force est de constater que ce spectacle est à mourir de rire, si l’on en croit en tout cas les spectateurs présents dans la salle. Un doute s’installe : une contre-pièce invisible serait-elle en train de se jouer dans un monde parallèle ? « Alain Proviste » - entre tant d’autres qu’on a préféré oublier - est-il un jeu de mot digne de crampes abdominales provoquées par un fou rire retentissant ? Des gaz hilarants sont-ils savamment dispersés dans la petite salle du Guichet Montparnasse ?


Aïe, aïe, aïe et aïe


Selon la théorie de Bergson, le rire n’est autre que de la mécanique plaquée sur du vivant. C’est ça : le rire est mécanique, suranné, comme automatique. Rire pour rire. On est en plein dans la théorie béhavioriste du conditionnement : un stimulus (une blague sans esprit) appelle une réponse attendue (un gloussement incompréhensible). Les éclats des spectateurs ne semblent rien d’autre que des réactions médicalisées, émises sans recul, provoquées machinalement et artificiellement par des blagues cousues de fil blanc et tellement entendues qu’on peine à croire qu’elles fassent l’objet d’un spectacle en 2008. Il est également possible que nous soyons très exigeants. Mais tout de même.


Franck Buresi, auteur et metteur en scène, a d’après nos sources recherché ses comédiens jusqu’à la dernière minute. Peut-être aurait-il dû en faire autant pour son texte.


Faustine AMORE (Paris)


Kebab.com

Texte et mise en scène : Paul Buresi, assisté d’Antoinette Bounine-Cabalé

Interprétation : Eric Belkheir (Franck), Brigitte Lo Cicero (Patricia), Pierre Marthos (Pascal), Olivia Gotanègre (Cécile), Francis Lacotte (Alexandre), Delphine Brosset (Carole)

Décor : Thierry Daire

Production : Paul Burési et Valérie Roumanoff (D.F.Q.M. Productions)


Au Guichet Montparnasse du 5 novembre au 10 janvier 2009

15 rue du Maine, 75014 Paris

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20 décembre 2008 6 20 /12 /décembre /2008 15:28
DU PLOMB DANS LE CANCAN

Monter La vie Parisienne est loin d’être un exercice facile, en dépit de sa grande popularité. Les calembours de ce galopin d’Offenbach, les frous-frous frétillants des filles au cri strident, la respectabilité du Baron Gondremark à s’en fourrer-fourrer jusque là !- sont autant de pièges capables de vieillir le genre. Or, Gilbert Lemasson a fait le choix d’une mise en scène d’époque pour ce célèbre opéra-bouffe. Au risque de s’en étouffer.

Quoi de plus typique que d’amener un ami en visite dans la capitale voir La Vie Parisienne ? Vous savez, cet opéra-bouffe entré dans notre patrimoine culturel, faisant que chaque américain est persuadé que toutes les Françaises pratiquent le french-cancan comme un banal exercice de style ; la cuisse haute, fière et dénudée... Cet opéra où la France de la Belle-Epoque, tout en fanfreluches, en champagne pétillant et où l’ingénierie automobile balbutiait, est encore présentée aux touristes comme la genèse de notre art de vivre. Voire notre état perpétuel d’euphorie. Oh oui, La vie Parisienne a cet inégalable parfum désuet, un peu chypré, un peu poudré, comme l’était celui de nos grands-mamans. On vous aura prévenus. Vous et votre ami risquez de vous retrouver au milieu d’un parterre de cheveux blanchis à en sucrer les fraises. Même pas peur ? Allons donc !

La nostalgie de Jérôme


Indéniablement, tout est impeccable : costumes virevoltants, voire outranciers pour la plantureuse Baronne suédoise, décors dans le ton, tableaux charmants, le talent des chanteurs, mais il manque au spectacle des éléments extérieurs.

On aurait aimé un peu plus d’audace, un peu plus de piquant pour ranimer le genre au pamphlet titillant. A l’inverse de Jérôme Savary qui n’aurait pas manqué d’y mettre son grain de sel à coup d’allusions complices au climat ambiant (et même un panneau Ikéa derrière le Baron suédois…), Gilbert Lemasson, passionné par son métier, se love dans les décors rassurants de sa vie parisienne. Une France encore pétulante de joie de vivre malgré la terre qui ne tourne pas rond, les attentats menaçants et le pays qui-fout-le-camp. Oh, oui, La Vie Parisienne est un bien doux rempart. Mais on l’aurait adorée plus critique, moins ancrée dans son jus.

Bien sûr les polissonneries suédoises du Baron, la beuverie bon enfant et le romantisme de midinette ont épaté belle-mamie. Mais la précieuse grand-maman n’a pas osé trop battre des mains en rythme. Malgré tout ce qui se passait sur scène, l’enthousiasme des comédiens n’a, excusez le terme, déridé personne. Sauf mon ami en visite, ravi de toute cette chair si délicieusement frivole et de cette vie parisienne que l’on contemple telle une fleur fanée avec beaucoup de tendresse et de regrets.

 
                                                                                Marie-Pierre CREON (Paris)


La vie Parisienne

Musique interprétée par : Bernard Thomas et Laurent Zaïk d’après l’œuvre originale de Jacques Offenbach.

Montée par : Gilbert Lemasson
Avec : Florence Barbara, Jose Luis Barreto, Lauredana Bernardini, Rachel Brichler, Cybèle Castoriadis, Marguerite Chotard, Delphine Doriola, Emmanuel Frecon, Alain Giron, James Godet, Jean Goyetche, Jean-Marie Juhel, Nora Ketir, Marie-Pierre Laurent, Didier Loze, Isabelle Mallet, Denise Muller, Michèle Plocoste, Jean-Louis Raymond, Catherine Simon-Vermot, Claude Teyssedre, Danielle Tourrier, Lucrèce Vincente


A l’affiche du : 10 au 21 décembre 2008. Soirée 20h30 Matinées samedi 15h00 et Dimanche 15h30. Au théâtre Trianon : 80 boulevard Rochechouart, 75 018, Paris. Renseignements et réservation au : 01.44.92.78.03 ou sur www.theatreletrianon.com



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20 décembre 2008 6 20 /12 /décembre /2008 15:14
TOUT FEU TOUT STRAMM

Trois courtes pièces  en huis clos pour une mise en scène sur les traces d’une œuvre originale et  méconnue, tantôt sombre tantôt onirique, parfois cruelle, toujours poétique. Cinq comédiens  qui troquent avec facilité une peau de dérangé pour une autre. Une découverte d’une écriture en quête d’autres formes, à la rencontre de l’univers étrange et intimiste d’August Stramm.

Rudimentaires, premier épisode de l’univers ravagé de Stramm, est d’un réalisme cruel. Sur scène, un appartement moderne en longueur, des portes-fenêtres coulissantes laissent voir par transparence un couple dans son quotidien. La misère, le désordre, puis la folie. Entre les déchets, la vaisselle sale et les amas de fringues, un bébé mort est découvert. Pourtant pas de ton dramatique. Au contraire la situation tourne à la blague, les comédiens jouent dans le burlesque sur fond d’un humour noir franchement sadique. C’est un trio de cinglés, qui s’agite entre coup de gnôle, hallucinations, inepties et crises d’hystérie drolatiques. Un enchaînement de sketchs incongrus, absurdes et impitoyables.


Puis, la lumière s’assombrit, on passe à un tout autre registre . Un vent étrange siffle, enveloppant la scène d’un nuage onirique. On est au cœur du cauchemar de La fiancée des Landes, qui résonne comme un écho au fantasme de l’enfant du Roi des Aulnes :  c’est un combat avec des fantômes aux voix serpentines, figures parentales malfaisantes qui tentent d’ attirer la jeune fille dans leur monde merveilleusement inquiétant. La claustrophobie s’installe, l’angoisse s’intensifie puis tout s’évapore subitement laissant place à la torpeur d’une angoisse nocturne.

L’énigme tourne carrément au délire dans le dernier acte de la mise en scène. Forces est un scénario loufoque, deux couples où les partenaires s’échangent et mènent une danse perverse orchestrée par Dominique Reymond, maîtresse de maison irrésistiblement démoniaque qui terrorise à la maisonnée à coups de rires hystériques. Les dialogues syncopés laissent les personnages se comprendre à demi-mots, communiquent dans une espèce poésie psychotique surréaliste au service de scènes désopilantes. Reymond met le paquet dans la déjante, la pièce s’éternise, l’histoire qui vire au morbide ne semble jamais se finir...La lenteur du  détraquement joue avec nos nerfs mais ce comique d’usure sur fond de cruauté a quelque chose de savoureux. En réhabilitant Stramm, Daniel Jeanneteau et Marie-Christine Soma signent là une mise en scène et une scénographie hors du commun entre du rêve agité et farce noire.

 
Elsa ASSOUN (Paris)

Feux d’August Stramm

Mise en scène, scénographie et lumières : Daniel Jeanneteau et Marie-Christine Soma
Costumes : Olga Karpinski
Avec : Axel Bogousslavsky, Jean-Louis Coulloc’h, Julie Denisse, Mathieu Montanier, Dominique Reymond.

Au Théâtre de la Cité Internationale du 27 novembre au 20 décembre 2008.

 
Photo Ó Elisabeth CARECCHIO

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