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Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

22 juillet 2007 7 22 /07 /juillet /2007 16:50
COMÉDIE ESTHETIQUE

Comédie douce amère dénonçant les excès d’une société qui pose le jeunisme en valeur, « Jeune à tout prix » se pose comme du boulevard moderne. Drôle, mais inégal.


Geneviève, la belle cinquantaine, élégante et friquée, a laissé, sans s’en rendre compte, les ans alourdir ses rondeurs.  Et les choses en seraient sans doute restées là si un fatidique : « Mais madame, ce modèle n’existe pas en taille 44 ! » n’avait fait basculer les choses. Le reflet de la société, bien plus que celui du miroir, commence alors à distiller son insidieux venin. Et le recours au bistouri d’un chirurgien esthétique sans scrupule semble être l’unique solution.

Comédie légère et enjouée, qui puise son inspiration dans les diktats de la mode, « Jeune à tout prix » prend le parti de rire des oukases sociaux conduisant au hors norme toute personne dépassant la taille 40 et/ou les 35 ans. Et il est vrai que l’on rit de bon cœur à cette évocation caricaturale et pourtant crédible. Les affres de Geneviève, on les a toutes (enfin… presque !) connus un jour ou l’autre. Ou on les connaitra bientôt. Un ventre qui se ramollit, un cou devenu flasque, des paupières qui tombent, des hanches épaissies. La solution chirurgicale peut être séduisante. Mais est-ce bien le corps qu’il faut changer ?

Muriel Jarry propose, par le rire, de plutôt modifier le regard de la société. C’est peut-être plus long. Mais à coup sûr plus efficace. D’évidence, on adhère au propos.

Mais si le début de la pièce commence fort bien, le texte s’essouffle un peu dans le dernier tiers du spectacle. La caricature du chirurgien esthétique et de sa clinique vire même au facile. Voire au contestable : la mise en scène associe la chirurgie esthétique à une sorte de boucherie ou de torture. Ne laissant même pas entrouverte la porte à une chirurgie réparatrice parfois véritablement rédemptrice.

L’ensemble mériterait par ailleurs une mise en scène plus alerte. Muriel Jarry, qui cumule les casquettes d’auteur, metteur en scène et comédienne, est fort talentueuse dans son jeu comme dans l’écriture,  mais elle manque sans doute de recul pour la mise en scène.

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

Jeune à tout prix, de Muriel Jarry
Mise en scène de M. Jarry
Avec : M. Jarry, D. Rolland, I. Hiessler, A. Colombo

Avignon Off tous les jours - Atelier 44 à 20 heures.

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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 23:34
PIÈCE BIEN FAITE, PIÈCE BIEN VIDE

Sans conteste, la création est de qualité. Le jeu est précis, la mise en scène au scalpel. Mais la vacuité du texte rend l’ensemble assez vide.


Fin de journée, fin de semaine. Une psychiatre est sur le point de quitter son froid cabinet, quand un homme surgit. Inattendu et inopportun, oublié semble-t-il dans la salle d’attente, l’homme s’incruste, bouleverse les projets de soirée musicale du médecin et ouvre la voie à un étrange huis clos. Au terme duquel la psychiatre ressortira finalement psychanalysée.

visite.jpg
On a beau chercher, l’intérêt du texte semble bien mince. Et la célébrité comme le talent de son auteur ne garantit pas à coup sur le génie. Et si « La Visite » n’est pas une pièce pour laquelle Victor Haïm a été récompensé, cela n’est peut être pas tout à fait un hasard. Ni porteuse de grande idée, ni accusatrice, ni même divertissante. Encore moins drôle. Elle ne met même pas quoi que ce soit en perspective.

Alors, même si la scénographie cherche à creuser le filon du psychique à travers l’utilisation d’une caméra et d’un écran télé, même si la froideur du décor joue aussi la carte du psychologique, même si les comédiens défendent bien leur rôle… Comment adhérer au projet ?

Mise en scène, direction d’acteur et décor ont pris le parti de la froideur et de la distance. Faisant résonner ce texte dans un écho visuel gris. Froid. Et vide. Fort bien fait. Mais sans intérêt.

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

La Visite
De Victor Haïm
Mise en scène de Robert Plagnol
Avec : Stéphanie Lanier et Alain Dumas

Au Lucernaire – Théâtre Notre Dame à 15h45

Photo © DR
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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 23:18
HISTOIRE POUR GRANDIR

Une équipe de comédiens à la belle énergie fait vivre une histoire rocambolesque à souhait. Entre roi, reine, prince, princesse, sorcière et dragon. Une épopée de petit prince pour apprendre à devenir grand.


L’histoire du Prince Pipo commence par celle d’un roi, malheureux de n’avoir pas de fils. Et par celle d’un fils à venir, qui veut choisir son père. Et de fée en sorcière, de  dragons en rat blanc de bibliothèque, de cheval rouge en verte grenouille, le jeune Prince va découvrir la vie. Et apprendre à porter un regard d’adulte sur le monde qui l’entoure.

Histoire-Prince-Popi.JPG
Suffisamment mouvementées et invraisemblables pour flatter l’imaginaire des plus jeunes, les aventures du prince Pipo séduisent leur auditoire fort rapidement. L’histoire, agréablement personnifiée, perd parfois son propre fil. Les personnages, hauts en couleurs, offrent une jolie palette d’émotions. Et on se laisse assez volontiers embarquer dans cette extravagante équipée. Et si, comme dans tous les contes, l’histoire se termine bien, elle ne cède pas à la facilité du divertissement vain. Comme dans tous les « vrais » contes, se dessine en filigrane un enseignement. Un enseignement que les enfants ne peuvent évidemment pas appréhender directement. Mais qui les marque inconsciemment et, sans doute, les aide à assumer le fait que leurs parents ne sont pas les êtres aussi parfaits qu’ils croyaient.

L’ingéniosité de la mise en scène permet de faire défiler les univers avec grâce, et le fil de l’histoire suit indéfiniment son cours. Le tout, gai, enjoué et vif, donne un spectacle des plus agréables.

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

Histoire du Prince Pipo, du cheval Pipo et de la Princesse Popi, de Pierre Gripari
Par la compagnie Dottie
Adapation et mise en scène : Avela Guilloux
Au Théâtre du Bourg Neuf, à 11 heures

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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 20:44
VERTIGE DU MOI

Monologue d’une femme en errance. Une comédienne se confond dans les mots pour se trouver. Une voix étouffée qui surgit enfin pour crier sa révolte, sa peine, ses fantasmes.

Sur la scène s’éparpillent de longs panneaux suspendus, la même photo de son visage morcelé. Sur scène, une femme solitaire. Elle déambule, s’arrête, recule, reprend son chemin entre les éclats de son moi fragmenté. Sa marche sans but est rythmée par des morceaux de paroles, les siens qui se heurtent et se mélangent dans un flot confus.

Tout d’un coup, elle prend la parole, répète à l’infini un texte de théâtre comme pour ne pas perdre pied. Les mots écrits noir sur blanc ont quelque chose de rassurant : ils n’attendent qu’à être exprimés, ils cherchent une voix pour s’incarner, ils ancrent dans le réel. Le texte est là donner une voix à ce qui ne peut se dire. Il sert à s’oublier pour ne pas se perdre. C’est pour tout cela qu’elle est comédienne. Mais cette fois-ci, elle ne planque pas sa fragilité derrière un rôle. Elle est là nue, écorchée  vive, en proie à ses révoltes et à ses rêves. Elle s’abandonne troquant sa peau de comédienne contre sa peau de femme, avec son lot de blessures et d’espoirs. Elle brise sa façade de fille bien assurée et nous emmène dans son univers fracturé, tantôt amer tantôt naïf.

D’anectodes en aveux, elle nous plonge dans son intimité. Une conscience ouverte qui ne connaît plus de frontières et qui nous submerge de pensées, de réflexions en interrogations, de futilités en émotions. Un monde intérieur qui s’ouvre progressivement en quête de soi. Reconstituer le moi éparpillé en miettes, trouver le lien entre les paroles qui se déversent. Sur sa route chaotique, un homme, une rencontre, qui va bouleverser son errance.

Une mise en scène sobre et profonde pour une belle performance de Marie Bastide qui incarne une féminité en mal d’amour, pétillante et fragile, maladroite et forte.

Elsa ASSOUN
www.ruedutheatre.info

Mise en scène : Damien Chardonnay-Darmaillacq
Assistant mise en scène : Luc Cerutti
Interprète : Marie Bastide

Au Pulsion théâtre jusqu’au 27 juillet à 15h40.
157/161 rue Carreterie 84000 Avignon
Téléphone réservation : 04 90 85 37 48
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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 20:19
LE BONHEUR EST DANS L’CAFE

Tranquillement mais sûrement, Dany Bar, tragédie musicale de comptoir, dénonce les travers d’une société marchandisée où le succès se mesure à l’audience audiovisuelle et aux évolutions du CAC 40. Une drôle de fable contemporaine, qui fait un bien fou !


Un petit bistrot propre et tranquille. Refuge de Sandra, Martine, Odette et Gilles. Sous l’œil bienveillant de Dany, la patronne. Chacun dans ses habitudes. Le demi de Gilles, le monaco de Martine, le blanc cass’ d’Odette… et le courant d’air de Sandra. Des êtres qui, à force de se croiser dans le café du coin, histoire de tromper leur solitude,  finissent par nouer une amitié de comptoir. Dont la solidité sera mise à l’épreuve de la gloire et de son succès de pacotille.

Dany-bar.jpg
Avec des costumes à la Deschiens et un jeu qui s’en approche un peu au début, la compagnie du Voyageur Debout nous ouvre les portes de ce bistrot de quartier avec tendresse, humour. Et respect. Car si l’on craint un peu, au début de la représentation, une caricature facile et moqueuse, on se rend vite à l’évidence : la compagnie évite le sarcasme. Grossissant seulement le trait afin de mieux dépeindre une réalité par toujours facile à vivre. Et cet univers  kitsch et suranné nous happe vite. On est dans ce bistrot, on entre dans le jeu de la soirée à thème que propose Dany chaque semaine. On s’attache étonnamment vite aux personnages, à leurs petites vies, à leurs émois. On les regarde se donner en spectacle sur le tapis rouge du bar, piste aux étoiles, scène de fortune d’un improbable radio crochet. Et on rit.

Car le spectacle est drôle. Il jongle avec la vie, la chanson et le rire. Avec les couleurs, les colères, les jeux télévisés et le public. Et au jeu de la vérité que la douce Dany conduit en virtuose, toutes les vérités sont bonnes à entendre. Par toutes les oreilles. En urgence.

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

Dany Bar
Mise en scène : Jean-Luc Bosc,
Avec : Sandrine Gélin, Marie-Emilie Nayrand, Claudine Lebegue et J-Luc Bosc.

Au Luna-Buffon Théâtre  à 20h30, jusqu'au 27 juillet 2007.

Photo © DR
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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 11:24
Claude Semal, trublion surréaliste et anarchiste belge - appellation d’origine (in)contrôlée - était ce mercredi 18 juillet l’invité des Apér’auteurs d’Emile Lansman. L’éditeur  organise en effet des rencontres informelles autour d’un auteur belge, à l’heure de l’apéritif, dans les jardins du théâtre des Doms. Une façon de mettre à l’honneur ceux sans qui le spectacle n’existerait pas.
 
Claude Semal, auteur connu et reconnu en Belgique, ne fait assurément pas partie des compositeurs de l’ombre. Récemment à l’affiche du film de Lucas Belvaux, « La Raison du plus faible », il est en effet  également interprète. Un artiste complet, qui sait se remettre en question, n’hésitant pas partager la vedette, lors de cet apéritif littéraire, avec deux autres artistes, Pie Tshibanda et Sam Touzani. Tous les trois font partie de la même compagnie, la Charge du Rhinocéros, collectif belge de coopération artistique. Une initiative unique au plat pays, qui, à la suite de son instigateur et administrateur, Olivier Blin, établit une collaboration Nord-Sud par le biais du théâtre. 

cabaretje-2-200.jpg
Parmi les nombreux sujets abordés par les invités d’Emile Lansman, l'un d'entre eux importait particulièrement à Claude : celui du lien avec le public. Issu de la longue tradition du cabaret, il ne se considère pas comme un auteur dramatique à proprement parler, de ceux qui écrivent pour une scène fermée par un quatrième mur. Lui ne condamne pas ce style, mais use plus volontiers d’une écriture frontale. Il juge en effet qu’il est plus qu’essentiel, pour que vive le théâtre, que les auteurs contemporains n’oublient pas pour qui ils écrivent… leur public. Que monter sur une scène, c’est d’abord parler aux gens.

Voilà pour la forme. Mais le fond aussi s’est invité à l’heure du pastis, ce jeudi… Celui que beaucoup disent être « un vrai gentil dans la vie et un faux méchant sur scène » fut aussi l’engagé rédacteur en chef du magazine militant Pour. Une étape de sa vie qu’il décrit comme une chance qu’il souhaite à tout artiste : celle d’avoir l’espace d’une parole publique et pouvoir y renoncer pour s’investir dans un travail collectif.  Les soucis belges, la difficulté de vivre ensemble dans un si petit pays, ce besoin de se confronter sans arrêt à l’autre pour pouvoir trouver son « modus vivendi », richesse sans prix et apprentissage d’une vie pour le futur de notre Humanité sont donc aussi ses chevaux de bataille… D’ailleurs, sous la première couche très « moule-frite », surréaliste et hilarante de son spectacle Cabaretje pointent quelques attaques tantôt caustiques tantôt graves sur le devenir de la Belgique et, partant,  de notre monde. Même si ce bon vivant offre souvent des spectacles où le rire est roi ( … pardon... où le rire est président, il risquerait de ne pas aimer l’allusion monarchique !), il n’en oublie jamais ses luttes pour un monde plus juste et plus tolérant, un monde où chacun de nous puisse vivre au mieux au côté de son voisin.

Si la gouaille belge et intelligente vous tente, courez donc l’applaudir ce mois-ci à Avignon, dans l'un de ses spectacles… Et vous n’avez pas d’excuse quant à l’horaire. Il en présente deux par jour ! Quand on vous disait qu’il était homme généreux !!!
                                                                                                 Isabelle PLUMHANS
www.ruedutheatre.info


Cabaretje,
De et avec Claude Semal et Eric Drabs
Jusqu’au 27 juillet
Au théâtre des Doms à 22H30

Œdipe à la ferme
De et avec Claude Semal et Ivan Fox
Jusqu’au 27 juillet
Au Gilgamesh Théâtre, à 15h45

Photo © Cassandre Sturbois - Claude Semal dans Cabaretje
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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 09:52
COUP DE COEUR RUEDUTHEATRE

SOUS LE VERNIS


La Compagnie Lux in Tenebris se penche depuis plusieurs années sur l'oeuvre de Vaclav Havel et réussit, en renouvelant son casting de comédiens, à toucher l'essence et à faire surgir les dimensions cachées d'un petit bijou de comédie absurde ; Vernissage ou comment substituer à la dictature des idéologies celle du bonheur parfait.

Milieu des années 70, mais ce pourrait être à notre époque, en Tchécoslovaquie, un couple de trentenaires, Véra et Mickaël, épanoui, de prime abord, invite son meilleur ami Ferdinand, dissident, à prendre part au vernissage de son appartement. Antiquités et tableaux de maîtres, clams au four, caresses sensuelles, rien n’est épargné à l’ami médusé pour lui vanter les mérites d’un bonheur extatique, qui devrait prendre le pas sur la politique. Avec une angoisse tout de même pour le couple, c’est que l’ami tourne les talons et les laisse comme deux marionnettes inanimées.

vernissage.JPG
L’ancien président de la République tchèque, conscience politique européenne s’il en est, en dépit de ses allégeances à Bush lors de la guerre en Irak, aurait écrit Vernissage pour divertir ses amis. Mais quel divertissement ! Des trois pièces de la trilogie qui composent le recueil : Audience, Vernissage, Pétition, elle est la mieux écrite, la moins politiquement pesante, la plus fine, la plus drôle, et aussi la plus cruelle. C’est un pamphlet politique sur la subsistance des idéologies, le rôle des intellectuels dans les sociétés modernes, une satire sociétale du nouveau monde et de son matérialisme, de ses codes, de ses standards, une comédie grinçante sur le couple et la recherche de la perfection…
Mais aussi une fable désillusionnée sur l’amitié et la fidélité, ce qui la construit, la cimente et la délite, une dénonciation du grotesque du prêt-à-porter culturel et du conformisme philosophique bourgeois. On retrouvera ces deux dernières thématiques plus tard dans Art, de Yasmina Reza. Bref, Vernissage est un petit bijou du théâtre de l’absurde dans la plus pure tradition du théâtre d’Europe centrale et orientale.

Un monde qui change

Si Anouilh dans Une Vie montrait le spectacle d'une famille bourgeoise, un monde finissant donné en pâture aux yeux de la Révolution victorieuse, ici c'est un monde qui commence qui se montre sans pudeur. Mais si l’on gratte le vernis sage de cet univers, révélant sa superficialité, tout n’y est que malaise, mal être et fausseté. L’argent, la réussite à tout prix, la rutilance de la vitrine occidentale, le passage sans transition au marchand, l'impossibilité d'identifier des valeurs, tels sont les diktats d’un monde neuf qui substitue à la dictature des idéologues une dictature sous d’autres formes et avec d’autres moyens.

Que peuvent les intellectuels quand les idéologies par eux-mêmes combattues sont mises au tapis et qu’ils n’ont pas les armes adéquates pour combattre un mal plus insidieux et sans visage ? Lutter, s’adapter, abdiquer ?
Ferdinand, qui est un peu Vaclav Havel, tente de nous apporter sur scène des éléments de réponse face au monde qui change.

Les trois comédiens ont la gueule de l’emploi, c’est peu de le dire.
Roger Contebardo bouillonne d’euphorie sur toute la pièce, parfois pris de bouffées politiques délirantes qu’il évacue vite. Il s'applique à être le Monsieur Jourdain du Nouveau Monde.
Céline Perra, joue avec nos nerfs, tantôt bourgeoise discrète inféodée à son mari, tantôt impudique raffinée, elle inspire et respire un ordre nouveau. Elle l'incarne d'une certaine façon et, si l'on prend ce parti, justifie le tempérament si illuminé de son mari. Le duo nous transforme en Ferdinand, nous aspire dans le cyclone et c’est là une part de son immense talent, reste à savoir les sentiments qu’ils font naître en chacun de nous.
Face au duo qui déjante crescendo, Éric André est parfait d’impavidité inquiétante et de candeur vite déniaisée.

La mise en scène de Marie-France Soulaget exploite à fond le filon de l’exhibitionnisme sensuel et cocasse et fait habilement monter la tension dans ce couple au bord de l’explosion, dont les emballements et les déplacements sont réglés avec la précision d’une horlogerie suisse.

Havel bien servi, spectateurs vernis.

Stephen BUNARD
www.ruedutheatre.info


Vernissage
Texte : Vaclav Havel
Mise en scène : Marie-France Soulaget
Avec : Céline Perra, Roger Contebardo, Eric André

Jusqu’au 27 juillet 2007 au Théâtre du Vieux Balancier à (jours impairs) à 12h15.
2 rue d’Amphoux - Téléphone réservation 04 90 82 41 91

La Compagnie Lux in Tenebris présente également dans le Off :
- Audience, au Théâtre des Vents 63 rue Guillaume Puy à 21h15
- Pétition, à 12h15 au Vieux Balancier les jours pairs.

Photo © Philippe Girardi
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20 juillet 2007 5 20 /07 /juillet /2007 19:45
RETOUR AU THÉÂTRE POPULAIRE

Cette troupe adepte de Molière et de la commedia dell’arte nous offre un spectacle digne du 17e siècle. Un joli interlude fidèle aux valeurs de l’époque et qui nous entraîne sans difficulté dans la Cour de Versailles…


Solitaire et insensible aux avances de ses prétendants, la Princesse d’Elide se voit contrainte à choisir un époux parmi les propositions de son père. C’est alors qu’un de ces nobles, le prince d’Ithaque, pourtant fou amoureux d’elle, ne va rien laisser paraître de ses sentiments. La princesse, peu habituée à ce genre de dédain, va donner le meilleur d’elle même pour le faire succomber à ses charmes, et tombera elle-même dans une passion proche de l’amour… Une intrigue simple mais qui rassemble tour l’art de Molière…

la-princesse-delide.jpg
Cette pièce écrite en vers et en prose permet de se reconnecter avec toutes les valeurs de l’époque. Chevaleresque, romantique, burlesque, ce spectacle est un réel hymne au théâtre traditionnel. Mais Comédiens et Compagnie ne voulait pas s’arrêter là. Pour donner un dynamisme supplémentaire au texte, des coupures permettant des improvisations ont été introduites tout au long du spectacle. Cela donne des passages d’humour et d’aventure accessibles à tous, avec un Moron plus Arlequin qu’Arlequin, des combats à l’épée, des démonstrations de danses et des chants d’époque plutôt rafraîchissants. Les anachronismes parsemés dans le texte et dans le jeu des comédiens forment des petits clins d’œil savoureux.
La mise en scène quant à elle reste aussi fidèle aux spectacles de l’époque : des planches entourées de bancs, un rideau dans le fond, des musiciens sur le côté et le tour est joué.

Que la langue de Molière est douce lorsqu’elle est dite avec passion. Cette troupe de troubadours reflète bien ce que devaient être ces pièces inoubliables. Avec une touche de dérision, une pointe de satire politique, on en vient facilement aux temps des rois avec des clowneries chaudement applaudies. Les masques de la commedia dell’arte et les sons de la flûte à bec, de la théorbe et de la guitare baroque sont des bonus de plus à découvrir sans attendre.

Jennifer MAYEUR
www.ruedutheatre.info


La Princesse d’Elide
Les jours pairs au théâtre des Béliers 17h25

Mise en scène : Jean Hervé Appéré
Interprétation : Lucy Samsoën, Marie Némo, Agnès Mir, Jean Hervé Appéré, Pierre Audigier, Stephan Debruyne, Frédéric Barthoumeyrou, Antoine Lelandais, Ana Isoux, Kira Shveyn, Léonardo Lorédo
Collaboration artistique : Carlo Boso
Costumes : Delphine Desnus


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20 juillet 2007 5 20 /07 /juillet /2007 19:38
L'AFRIQUE AU COEUR ET AUX TRIPES

Richard Demarcy est un auteur et metteur en scène prolifique dont l'oeuvre explore  depuis plus de trente ans bien des aspects parmi les plus représentatifs, les plus parlants, de l'état du monde d'aujourd'hui. Avec Vies courtes, c'est l'Afrique urbaine postcoloniale et la vision que peuvent avoir les Africains des relations plus que troubles de  leur continent avec les néo-colonisateurs comme avec l'Occident tout entier.


Deux adolescents sont morts, l'un, tué par un policier dans une manifestation, l'autre de froid dans le train d'atterrissage d'un avion en partance pour l'Europe. Ils se rencontrent post -mortem et vont chercher à découvrir comment tout cela est arrivé...  Tonique et bouleversant...

Vies.jpg
Tout au long d'une sorte de tragi-comédie musicale très colorée, ponctuée de chants  africains, de danses, dans cette relation permanente entre le visible et l'invisible entretenue  par les deux adolescents, on assiste à une foultitude de scènes très contrastées, tour à tour  bouleversantes ou drôles, sinistres ou loufoques, qui se déroulent en des lieux très différents,  y compris et d'abord l'intérieur d'un avion en plein ciel, avec de nombreux personnages  souvent truculents et hauts en couleurs, mais qui nous donnent surtout à voir l'état de l'Afrique urbaine d'aujourd'hui : camps de vacances pour occidentaux rupins, tourisme sexuel, road movies plus ou moins improvisés vers d'incertaines tractations ou corruption,  « guerre des trottoirs », misère et révoltes populaires contre ces arrangements à l'éthique  plus que douteuse, etc.

Constituée d'artistes – neuf ici sur le plateau - venus de nombreux pays et de trois continents  (Afrique, Amérique du Nord, Europe), le Naïf Théâtre qui interprète ces Vies Courtes  est  très cosmopolite. Son spectacle n'en est pas pour autant moins dense ni moins porteur de  significations et d'émotions essentielles. En témoigne avec toute la force possible ce bouleversant choeur final qui nous prend au coeur et aux tripes... Une oeuvre plus que nécessaire, décidément.

Henri LÉPINE
www.ruedutheatre.info

La Manufacture, rue des Ecoles, jusqu'au 25 juillet à 20h45. 
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20 juillet 2007 5 20 /07 /juillet /2007 12:26
INSOMNIE

Un huis clos sous tension inspiré de la dernière scène de l’Idiot de Fiodor Dostoïevski. Rogogine et le Prince Mychkine, les deux protagonistes se confrontent une dernière fois. Un dialogue intense, véritable réflexion sur l’existence, dans une mise en scène sous le signe de l’expérimentation.

Ultime rencontre  entre le prince Mychkine, personnage naïf et sublime, et Rogogine, figure passionnée et impulsive, deux hommes sous la coupe d’une femme, Nastassia Philippovna. L’heure est à l’épilogue, la fin cruelle d’un trio torturé. Le prince pénétre dans la sombre demeure de Rogogine. Où est-elle? Que signifie cette obscurité? Tapi dans l’ombre, le sinistre Rogogine l’invite à s’asseoir. Mychkine ignore que dans une pièce voisine git le corps de Nastassia, poignardée de la main de Rogogine. Voilà donc une scène finale bouleversante pour laquelle Dostoïevski l'avouait lui-même avoir conçu le roman.


Pour la mise en scène de Pascale Oyer, c’est aussi le point de départ d’une réflexion sur le passé des deux individus : la scène inquiétante se répète comme un refrain donnant l’impulsion à un retour au vécu. De souvenirs en anecdotes,  le fil de l’histoire est reconstitué : de la première rencontre des deux personnages dans le train en direction de Pétersbourg à leur séparation. Jusqu’à la découverte du corps qui marque, l’apogée de la folie des personnages, tout se révèle : amour de Mychkine pour Nastassia, jalousie de Rogogine, fraternité des deux hommes.

Ascension vers la folie

La mise en scène traduit une lente ascension de la folie cristalisée en un épilogue. La lumière faible qui joue sur des effets d’ombre et de lumières participe à créer une atmosphère de plus en plus inquiétante, accentuant les contrastes. Les scènes s’enchaînent avec une frénésie palpable : un système de paravents permet aux comédiens de créer un nouvel univers, franchissant les frontières temporelles, effaçant les contraintes spatiales.

Simon Boyle incarne un Mychkine pétri d’innocence, Roland Abbatecola, un Rogogine sombre. Le duo intrigant nous intègre dans une dimension onirique. Plus intéressant encore, la gestuelle mise en valeur : les mouvements s’accélèrent tandis que le songe s’immisce dans le réel, jetant la confusion sur les scènes représentées : s’agit-il de souvenirs réels ou de délires malades de Mychkine ? La fragmentation de la mémoire s’intensifie par une confrontation physique: dos à dos ou face à face, les corps se heurtent ou fusionnent à l’image d’une fraternité passionnée et tendue, sur le fil du rasoir. Progressivement les deux figures antagonistes se rapprochent étroitement liées par l’amour, la mort et la folie. L’atmosphère s’alourdit, se dégrade jusqu’à l’ébranlement final des deux protagonistes.

Cette interprétation originale d’un texte complexe rend hommage à  la force du regard de Dostoïevski sur l’homme.

                                Elsa ASSOUN  
                                www.rueduetheatre.info

Texte de Zéno Bianu d’après Dostoïevski
Mise en scène : Pascale Oyer
Interprètes : Roland Abbatecola et Simon Boyle
Décors et costumes : Pascale Oyer, Ir Kjaer, Laïla Monnet, Sabine Bouvier
Lumière : Miguel Acoulon

Jusqu'au 28 juillet à l'espace Alya à 22h30.

Photo © DR

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Chronique FraÎChe