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Coaching prise de parole

           

Mois AprÈS Mois

Festival d'Avignon

26 juillet 2007 4 26 /07 /juillet /2007 18:15
RÉCIT D’UN CHOC

Trois semaines après le paradis. Le titre choisi par le radical Israël Horovitz, dramaturge américain contemporain reconnu, désigne une destinée particulière, tout en ménageant le mystère. Celui de la tragédie du 11 septembre 2001 qui voyait les deux tours du Wall Street Center s’écrouler et le monde vaciller.


Des images bouleversantes diffusées en boucle sur nos téléviseurs. Un moment terrible défile dans nos têtes. Pour l’auteur, qui a cru durant quelques heures que son fils était l’une des victimes, ce moment fut sans doute, intérieurement, une descente aux enfers.

Le texte a été écrit dans les trois semaines qui suivirent les événements. La mise en scène choisie par Ladislas Chollat est dépouillée. Sobre. Au début, seul un visage est visible ainsi qu’une main tournée vers le ciel. Il s’agit d’un homme, un New-Yorkais. Il parle de ce qui n’est plus. Puis, un rythme s’impose d’emblée au spectateur entre la course du comédien Daniel San Pedro et les lumières placées frontalement, figurant les tours au moment du drame. Le public est aveuglé par la violence des éclairages. Comme hypnotisé par un jeu de lumières qui laisse imaginer ce que l’explosion d’un avion s’écrasant contre une tour à pu être au cœur d’une mégalopole comme New-York. Sans aucun doute, quelque chose d’insupportable. 

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Cet homme qui nous donne sa version des faits s’interroge sans cesse sur l’état du monde et notamment sur celui que nous allons léguer à nos enfants. Il se sent inutile, comme dans l'impossibilité soudaine de protéger sa descendance.  Il se prend parfois pour un héros, un super papa qui voudrait sauver le monde. Pur fantasme. Il donne des chiffres, annonce 2.000 disparus, ne cesse de courir pour fuir la douleur du désespoir. Et le récit des événements invite à côtoyer la mort. Depuis les bombes lancées sur Bagdad jusqu’à l’amputation des deux tours jumelles portées comme un deuil par les Américains, toutes les questions sont posées. Et puis, il y a l’histoire de ce petit garçon de 4 ans qui envoie des messages à son père dans des ballons gonflés à l’hélium parce qu’un papa au ciel, c’est pas facile à atteindre…

Cette pièce, très applaudie, a doublement touché le public, car elle est à la fois réaliste et tendre. Elle porte en elle un questionnement sur le monde et sa survie. Non sans fermeté. Elle est encore une réflexion sur la guerre et une sombre page de l’histoire. Une réponse picturale a été donnée à l’intensité dramatique du personnage, joué par Daniel San Pedro qui entre dans ce rôle à la perfection, par le peintre Carlos Torres, ce qui pousse le spectateur à aller plus loin. A n’en point douter, un moment fort du Off.

Christelle ZAMORA
www.ruedutheatre.info


Texte d’Israël Horovitz
Mise en scène de Ladislas Chollat
Avec Daniel San Pedro
Décor de  J-F Servigne
Lumières  Alban Sauvé

Avignon OFF
Théâtre du Petit Louvre
Chapelle des Templiers - 3, rue Felix Gras
Tel : 04 90 86 04 24

Photo © DR
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26 juillet 2007 4 26 /07 /juillet /2007 17:57
UN PEU DE CAP' ET BEAUCOUP D'EFFET

Même sans épée laser ni  super-pouvoir, le renard masqué fait encore recette auprès des plus jeunes. Un spectacle de capes et d’épées pour faire rêver bien des bambini.

Cape sur le dos, masque et chapeau noir, l’épée bien calée dans son fourreau, Zorro est de retour. Et s’il n’est plus, à la ville, le Don Diego des incontournables feuilletons de notre enfance, il reste un fils de bonne famille. Qui cache sa quête de justice et d’équité derrière une façade de chanteur de tango.

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Et si l’on peut regretter la disparition de Bernardo, le serviteur muet, dans la version théâtrale que nous offre la compagnie « Dans les décors », le légendaire justicier se prête plutôt bien à la scène. Essentiellement grâce à une mise en scène énergique qui donne un rythme soutenu au spectacle. Les courses poursuites sont alertes et bien conduites. Et les combats d’épée, de vrais moments de bonheur. Ajoutons à ça une jeune fille de bonne famille, intrépide et maniant aussi bien l’épée que la provocation, un propriétaire terrien aveuglé par son pouvoir. Et surtout, surtout, un sergent Garcia à l’humour bien trempé. Et si les enfants se laissent volontiers séduire par Zorro, les parents succombent davantage au talent de comédien de Laurent Mantec qui incarne un Sergent Garcia absolument délicieux. Et qui apporte l’essentiel de la magie du spectacle. Même si l'on ne comprend pas bien pourquoi son supérieur est ici un propriétaire terrien.

Au final, seul le décor n’est pas tout à fait à la hauteur de la prestation. Sa simplicité est, sans conteste, un atout. Mais il ne brille ni par son originalité, ni par son exécution. Autre réserve : l’utilisation des micros. Si ces derniers s’avèrent utiles pour que les voix ne soient pas couvertes par la musique durant les chansons, leur utilisation durant tous le spectacle est surabondante…

Reste cependant que ce « Zorro ! » donne à rêver aux plus jeunes, avec un héros que l’on ne croise pas bien souvent au théâtre. Le faire passer du stade du petit écran à celui de la scène n’était pas chose aisée. Et la compagnie le fait finalement fort brillamment.

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

Zorro !
Au théâtre du Monte Charge, les jours impairs, à 10h30
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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 10:19
MIRACLE TOUT COURT

Le cirque et la guerre : deux univers diamétralement opposés pourtant réunis pour un miracle que l’on voudrait voir durer plus longtemps.


Intrigants, effrayants et tendres, les étranges personnages de Court-miracles nous mènent sur des chemins hors du commun. Le cirque à la guerre, c’est un peu la fleur qui éclôt sur le pavé. Même abîmés par la guerre, cette cul-de-jatte depuis peu, ce duo de bidasses manchots, tous ces infirmes nous font rire jaune d'une situation très sombre.

courts-miracles--Rapha--l-Kann.jpg
Jonglage, ballet sur roulettes ou encore acrobaties à plusieurs sur un fil, toutes les disciplines du cirque nous font rêver d’une autre époque au son d’un piano rétro tout au long de la pièce. La mort omniprésente, on rit pourtant ! On se laisse prendre au jeu des miracles de courte durée en retenant son souffle avec cet homme très maladroit qui se lance dans l’entreprise périlleuse de marcher sur un fil… électrique ! Tombera ? Tombera pas ? Quelqu’un relèvera-t-il par accident le levier pour mettre l’électricité ? Le spectateur est aussi sur le fil : entre loi de la jungle et vraie solidarité, ça tangue.

Les réalités de la guerre tranchent davantage avec le plaisir léger et frais du cirque : avarice, nécrophilie, travail des enfants, tous les vices humains mettent en valeur ces rats acrobates et ce travail brillant de marionnettistes.

Les comédiens font preuve d’une grande agilité et jouent parfois deux rôles en même temps. Evidemment, le spectateur cherche, s’interroge sur les mécanismes, les illusions. Mais se laisser porter à cet instant, se fondre dans l’illusion, c’est aussi l’échappatoire à la réalité et à la guerre. La violence est là : jets de pétard, reproductions de bombardement (avec projection de terre et effets pyrotechniques !). Mais qu’importe : cette beauté éphémère et fragile s’apprécie comme un souvenir d’enfance retrouvé.

Nathalie ASTRUC
www.ruedutheatre.info
Court-miracles
Création collective mise en scène : Christian Coumin
Interprétation : Loîc Apard, Lucie Boulay, Johanna Ehlert et Matthieu Siefridt
Régie technique : Thomas Maréchal
Création lumière : Arno Veyrat

Compagnie Le Boustrophédon
31 rue de Cugnaux - 31300 Toulouse
Diffusion : Dominique Strée (06 16 90 81 36 - fax : 05 61 59 93 40
Visiter le blog de la compagnie.

Jusqu’au 27 juillet à l’Espace Vincent de Paul-Ile Piot à 19h.

Photo © Raphaël Kann
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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 09:56
UN GRAND "OUI" POUR ARTURO

Prenez la grande satIre de Bertold Brecht, dénonçant à l’époque l’ascension du fascisme et d’Adolf Hitler, cinq personnages peu engageants, des marionnettes à gogo et vous obtiendrez un florilège de surprises en tout genre. Cette version libre de La Résistible Ascension d’Arturo Ui est une farce à savourer sans plus attendre.


Sortis de la nuit, des personnages difficiles à cerner décident de nous conter l’histoire d’Arturo Ui, chef d’un réseau d’assassins, de voleurs et d’escrocs. A mi-chemin entre fous du roi, clochards, et forains, Malbouk, Sistite, Gribiche, Javelle et Scorbut donnent le meilleur d’eux-mêmes pour rassembler sur scène les éléments nécessaires à la reconstitution de l’histoire. Ils racontent le parcours d’une bande de filous qui va faire main basse sur le Trust du chou-fleur. Partis d’un rien, ils vont obtenir par l’intimidation, la force et la violence la totalité du marché, envahissant un secteur de plus en plus étendu. La police, les tribunaux, la presse, ils mettront tout le monde de leur côté, même les âmes les plus innocentes… Conservant toujours leurs premiers rôles d’intrigants, les comédiens transforment cette pièce en délicieuse absurdité qui conserve sa force dénonciatrice et un humour délicieusement sombre.

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Instruments de musique improvisés, marionnettes, masques, la troupe de bouffons nous fait le grand jeu. Grimaçants tout au long de la pièce, ils nous laissent le souvenir de personnages qu’on ne voudrait pas croiser dans la rue. Sales, méchants, les yeux cernés, les dents en avant, les dos cabossés, les démarches étranges, ils ont toute la panoplie pour faire peur.

Pourtant ce spectacle charme par son originalité et son travail scénique. On plonge parfois dans un univers proche de celui d’Al Capone, avec des passages de cabaret noir, ou des tribunaux constitués de personnages en bois corrompus. Certaines marionnettes sont bluffantes, les autres conservent volontairement leur côté absurde. Jusqu’au bout les comédiens conservent leur étrangeté, et jouent à fond leurs rôles de bouffons. Nul besoin de masque, les travaux de maquillage et d’expression du visage époustouflent. On n’imagine pas une pièce de Brecht jouée par cette bande de malfrats, ils sont pourtant parfaits dans les divers rôles que propose le texte.

« Boucheries, crimes, menaces, trahisons », ces mots résonnent dans la salle et les faciès des comédiens restent dans les mémoires. Cette version gentiment effrayante est un régal. Dans son originalité, ses dérives, ses délires, la troupe de farceurs en guenilles nous en fait voir des vertes et des pas mûres pour un spectacle digne de Bertold Brecht et de son désir de distanciation du spectateur. Un bonheur à l’état brut et brutal !

Jennifer MAYEUR
www.ruedutheatre.info

Arturo Ui, farce bouffonne
Mise en scène et adaptation : Patrick Rabier
Interprétation : Sylvain Mouly, Isabelle Pan, Cédric Pera, Caroline Puyet, Frédérique Souloumiac
Costumes et marionnettes : Cédric Pera
Musique : Sébastien Smither
Lumières : Vincent Guibal
Scénographie : Caroline Selig

Le Collège de la salle à 22h.
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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 09:39
MACBETH MADE IN TAIWAN

Une compagnie taiwanaise s’en prend au très grand Shakespeare pour le mettre à la délicieuse sauce aigre douce orientale. Un spectacle plein de poésie, une mise en scène fabuleuse et pleine d’inventivité… Un seul regret : l’absence de sous-titrage.


Treize scènes de la pièce shakespearienne ont été sélectionnées, autour des personnages intrigants des sorcières. Simplifiée mais fidèle à l’originale, cette pièce retrace la longue agonie de Macbeth et de son épouse dans la folie totale, jusqu’à la tragique fin connue de tous. A son retour de bataille, Macbeth rencontre trois sorcières qui lui prédisent son ascension au pouvoir qui passera par l’obtention des titres de Duc de Glamis, Duc de Cawdor et Roi d’Ecosse. Apprenant cela, son ambitieuse épouse l’encouragera à accomplir ce présage en exécutant le roi, puis son ami Banquo, duc de Glamis. Accomplissant ces atrocités, Macbeth en devient fou, revoit les spectres de ses victimes, entend des voix, et retourne voir les sorcières qui lui prédiront sa chute. Pendant ce temps, son épouse devient à son tour folle à lier, ne pouvant laver ses mains entachées du sang d’innocents que son mari a exécutés sous son impulsion. Elle se suicidera peu avant que son mari soit à son tour assassiné par Macduff, descendant légitime du trône. 

La-sonate-des-sorcieres.jpg
Réunies autours du triangle que forment Macbeth, les sorcières et Lady Macbeth, ces échantillons de pièce décrivent bien les corrélations entre ces quatre femmes. Mais dans cette version, aucune erreur n’est possible : Macbeth devient fou bel et bien à cause des sorcières. La tradition occidentale veut une certaine dualité dans la traduction de ce drame, les prédictions des sorcières n’ayant pas nécessairement la première place dans la mise en scène. Ici ce sont elles qui content l’histoire et l’orientent. Elles en sont des éléments actifs et essentiels. Le résultat tient plutôt bien la route, et la mise en scène ainsi que le jeu des acteurs sont impressionnants de qualité.
Les décors varient en fonction de différents tableaux. Ils s’enchaînent entre les noirs, passant de l’extérieur à l’intérieur, au sein d’une maison typiquement asiatique munie de ses fameuses portes coulissantes.
Les comédiens font ressortir toute les émotions de Macbeth : l’ambition, la peur, le désespoir, la pure folie… De quoi avoir des frissons tout au long de la pièce.
Le travail d’éclairage est particulièrement bien appliqué, avec des jeux d’ombres et de lumières qui remplacent parfois les décors matériels. Enfin, les douces voix des sorcières ponctuent la pièce, avec des sonates orientales d’un charme saisissant.

Traduite en taiwanais, mieux vaut connaître l’histoire de Macbeth sur le bout des doigts, ou avoir lu le résumé avant le début de la pièce. Hormis la langue, dont le charme finit un peu par lasser, ce spectacle donne à rêver (ou à cauchemarder). L’énergie qui est déployée est à coup sûr une invitation au voyage dans un théâtre oriental trop peu connu des occidentaux et qui est pourtant une source étonnante et intarissable de créativité.

Jennifer MAYEUR
www.ruedutheatre.info

La Sonate des sorcières – Macbeth revisité
Mise en scène : Lu Po-Shen
Interprétation : Yao Kun-Chun, Tsai Pao-Chang, Hung Yi-Lin, Ma Ying-Ni, Dai Huei-Lin
Traduction en taiwanais : Chiu Teng-Pang
Musique : Chang Wen-Tou
Lumières : Ho Chih-Chieh
Costumes : Li Yu-Shen

Le Funambule à 12h45.
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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 07:49
LA BEAUTÉ D'UN DRAME

Une compagnie guadeloupéenne faisant parti des TOMA, théâtres d’outre-Mer en Avignon, narre avec une grande beauté une histoire d’amour dure et dramatique. Ce spectacle rythmé à souhait laisse le public bouche bée d’émotions.


Philémon est un époux modèle, amoureux de sa femme, Matilda, qu’il considère comme un trésor et qu’il cajole adorablement. Mais sous l'apparence du couple parfait se cache un terrible secret, celui de l’adultère que Matilda entretient depuis des mois… Lorsqu’il l’apprendra par un ami, Philémon entrera dans une profonde colère et contraindra Mathilda à faire face à son péché. Un ménage à trois va alors prendre place, et le couple devra vivre avec le costume de l’amant qui sera dorénavant considéré comme un invité d’honneur.

le-costume.jpg
La dureté de la situation installe un grand froid dans la salle. La déception du mari, la détresse de l’épouse prise au piège… On commence par haïr cette femme qui avait tout et qui a déchiré le cœur de son époux, mais qui ne cherche finalement qu’à exister en dehors de sa vie de femme au foyer… On en vient à la plaindre de son sort de femme adultérine.

Rythmée de sons d’ailleurs, cette pièce nous égare dans nos sentiments. On sourit puis on pleure. Cette compagnie nous donne à voir l’aspect froid et le ton grave de ce texte remanié avec poésie. Chaque minute qui passe nous fait sombrer un peu plus dans la folie, celle du désespoir de ce couple à la dérive. D’un début encourageant et chaleureux, on parvient à une tragédie qui nous laisse sans voix.
La mise en scène ne nécessitant pas de grands moyens, la place du costume qui y est attribuée s’avère prendre une importance considérable. A première vue simple et banale, cette scénographie apporte néanmoins une grande puissance au jeu des comédiens qui manient le costume avec une chorégraphie poétique. Les lumières révèlent de leur côté brillamment la solitude du couple.

Par le biais de leur culture et leurs chants émouvants, les comédiens nous donnent goût à ce théâtre exotique. Amour, souffrance, passion, drame, tout est relaté avec un réalisme déconcertant. Une pièce déchirante d’une rare beauté.

Jennifer MAYEUR
www.ruedutheatre.info

Le Costume
Mise en scène : Harry Kancel
Texte de Can Themba adapté par Mothobi Mutloatse
Interprétation : Philippe Calodat, Harry Baltus, Kristel Kenounjah Nedeljkovic, Gilles Minéas et Esther Myrtil.

A la Chapelle du verbe incarné, 12h10.
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23 juillet 2007 1 23 /07 /juillet /2007 20:46
UN MONDE À VOMIR

Lee Hall, scénariste du film à succès Billy Elliot, et auteur dramatique britannique d’à peine quarante ans ne laisse pas indifférent comme l’illustre cette pièce violemment grinçante sur la société d’hyperconsommation et l’impérialisme américains. C’est trash, inconvenant, violent, percutant, souvent tordu. C’est anglais. Et ça réveille.


La scène est coupée en deux, côté jardin, la cuisine, côté cour, le salon. La cuisine est le lieu idéal où se jouent les tragédies, aimait à dire Antoine Vitez. Chez Elvis, on y charcute les sentiments, on y exhibe les corps prêts à se consommer, on y dépèce le tréfonds de l’âme. Une mère anorexique et nymphomane, un père « elvicisé » et quasi empaillé à la suite d’un accident, une enfant boulotte avide de bouffe et de sexe, un minable représentant de commerce en pâtisseries au corps d’éphèbe, forment le cocktail de baltringues un tantinet frappés qui s’agite dans l’appartement aux couleurs flashies.

cuisinedelvis.jpg
Peu importe l’histoire de cette famille finalement, peu importe que la gosse se tape l’amant de sa mère qui ne déteste pas son mari, qui ne sert plus à rien, sinon à montrer un monde à genoux, qui porte en lui les germes de sa fin. Car si la satire est anglaise, la cible est américaine. Les obèses qui s’empiffrent, les moeurs qui se délitent, les beaufs dont la cervelle vaut celle d’un steack haché, les reliquats d’un pouvoir évanoui et la nostalgie ironique d’un monde en vestiges qui promettait un ordre nouveau et libérateur à base de sexe et rock’n roll et qui n’offre aujourd’hui que la misère (sociale et culturelle) et les larmes (de la guerre). Cet Elvis triomphant qui reprend vie entre les saynètes pour apporter un discours de paix pontifiant et ubuesque est un fantoche bien fantomatique, incarnation persistante de l’Amérique donneuse de leçons, Bible à la main.

À l'anglaise

Dans cette comédie noire et acide, Lee Hall fait penser à son émérite confrère Ken Loach dans l’art et la manière dont la réalité sociale sans fard est dépeinte à travers la vie du vulgaire. Mais Hall est moins intéressé par le réalisme de la dimension sociale et politique que par le souci de concocter sa cuisine à l’anglaise, qu’il veut pimentée à l’extrême, déroutante à souhait, à la fois écoeurante et roborative. Hall donne à manger tout ce qu’il semble vomir.

La mise en scène de Jean Maisonnave nous apparaît ainsi d’une fidélité sans faille, faisant de nous de parfaits voyeurs, provoquant la nausée – pour de vrai – rendant épidermique la relation qui nous lie à des personnages crûment brossés.

L’ensemble de la distribution est à niveau, qui met les bouchées doubles.
Sébastien Foutoyet (Stuart, l’amant), bronzé et bien gaulé, donne vite l’impression de devenir un morceau de céréale broyé dans des histoires qui le dépassent, lui-même consommé par les femelles comme un objet, jeté et mis aux ordures.
Rainer Sievert (Elvis) ne détient pas un rôle phare en termes de répliques mais chacune de ses apparitions vocales nous laisse sans voix – d’autant que l’hilarant comédien ressemble à Laurent Gerra imitant Elvis.
Si Valérie Moinet (la mère) ne manque pas de talent – et de charmes -, Pascale Oudot phagocyte la scène et ses partenaires. Elle incarne une gamine repoussante dans ses manières et amorale dans ses états d’âme, mais dotée  d’une fragilité béante et attendrissante.

Auteur, compagnie, metteur en scène et comédiens nous offrent de cette cuisine d'Elvis une belle mise en bouche qui donne envie de suivre leur travail.
Stephen BUNARD
www.ruedutheatre.info

Texte de : Lee Hall
Traduction : Louis-Charles Sirjacq et Frédérique Revuz
Mise en scène : Jean Maisonnave
Avec : Sébastien Foutoyet, Rainer Sievert, Valérie Moinet, Pascale Oudot et la tortue Stanley.

Grenier de Bourgogne – 94 bd de Mansart 21000 Dijon – 03 80 63 83 33
Images, recherche musicale : François-Xavier Delarue
Costumes : Brigite Pillot
Lumières : William Lambert (création) et Lilan Renaud (régie)
Décor : Jean Maisonnave

Espace Roseau 8, rue Pétramale 84000 Avignon – 04 90 23 96 05 – jusqu’au 28 juillet à 11h30.

La pièce est éditée par l’Arche éditeur (2002).

L’auteur :
Lee Hall, scénariste, auteur dramatique, est né à Newcastle (Grande-Bretagne) en 1966. Il écrit en 1997 sa première pièce Face de cuillère. http://www.ruedutheatre.info/article-3015773.html
En 1999, il écrit le scénario de Billy Elliot (cinéma), réalisé par Stephen Daldry et nominé aux Oscars pour le meilleur scénario. En 1999-2000, il est invité en résidence d’écriture à la Royal Shakespear Company dans le cadre du prix Pearson. Il écrit La Cuisine d’Elvis en 2000, adaptée de la pièce radiophonique écrite pour un programme de la BBC. Il réside et travaille aujourd’hui pour le cinéma à Hollywood.

Photo © DR
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23 juillet 2007 1 23 /07 /juillet /2007 18:34
MOZART REVISITÉ

Création 2007, La Flûte enchantée de la troupe de Comédiens et compagnie, d’après le célèbre opéra de Mozart mêle le chant, la danse, le théâtre, les marionnettes... Le divertissement familial par excellence.


La Flûte Enchantée est avant tout un conte de fée classique. Un prince, Tamino, part dans le royaume de l’énigmatique Sarastro où la princesse Pamina, est gardée captive. Avant de pouvoir libérer sa belle, le prince, charmant comme il se doit, devra se défaire d’une série d’épreuves et affronter une série d’ennemis tous plus méchants les uns que les autres. Il est accompagné de Papageno, l’ami gaffeur et bavard que tout héros se doit d’avoir à ses côtés.

Mais la Flûte enchantée, c’est aussi un opéra populaire mythique de Mozart et Shikaneder, dont certains airs, le solo de la Reine de la nuit et le duo de Papageno et Papagena, ont traversé les siècles. Adapter un tel opéra est une lourde charge que les épaules de Jean Hervé Appéré et Gil Coudène ont supporté sans crainte, avec souplesse et décontraction.

LaFl--teenchant--e.jpg
Tout est une question de partis pris. Samuel Muller et Vincent Manac’h, chargés de l’adaptation musicale, ont sélectionné les airs les plus connus de cet opéra. Hervé Appéré et Gil Coudène ont pour leur part raccourci les dialogues et les ont enrichis de répliques propres à la commedia dell’arte et à la culture populaire contemporaine. Car les anachronismes volontaires ne manquent pas. Les références se bousculent, en vrac James Brown, Ghostbusters et des chansons démodées du top 50. L’influence du cinéma est appuyée aussi, avec l’utilisation du ralenti, la course poursuite burlesque ou le duel façon western.

Les comédiens sont véritablement enthousiasmants. Fred Barthoumeyrou campe un Tamino tout en sourcils épais et mâchoire carrée, Antoine Lelandais est un Papageno plus bondissant et loquace que jamais, Bérangère Mehl incarne la pendant féminin de Papageno à la perfection et Stéphane Debruyne donne corps à la méchanceté de Monostatos avec beaucoup de fantaisie. Paula Lizana et Anne-laure Savigny en Pamina et en Reine de la nuit mettent leur belle voix en valeur dans des passages chantés plutôt réussis.

La difficulté de cette adaptation était de respecter l’esprit populaire de cet opéra tout en ne sombrant pas dans la vulgarité ou la facilité. Le pari est réussi : cette Flûte enchantée est à mettre entre toutes les mains.

Morgan Le MOULLAC
www.ruedutheatre.info

La Flûte enchantée, d’après Mozart et Shikaneder

Metteur en scène, Jean Hervé Appéré
Direction et adaptation musicale, Samuel Muller et Vincent Manac’h
Décors, Stefano Perocco di Meduna
Costumes, Delphine Desnus
Interprètes : Fred Barthoumeyrou (Tamino), Paula Lizana (Pamina), Antoine Lelandais (Papageno), Bérangère Mehl (Papagena), Anne-Laure Savigny (la Reine de la nuit), Pierre Audigier (Sarastro), Stéphane Debruyne (Monostatos), Marie Némo, Ana Isoux, Agnès Mir, Lucy Samsoën.
Musiciens : AnaIsoux, Vincent Boisseau, Jonathan Jolin, Bruno Luiggi.

Au Théâtre des Béliers, 53 rue du Portail Magnanen, Avignon.
Du 6 au 28 Juillet, 15h30

Photo © DR
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23 juillet 2007 1 23 /07 /juillet /2007 18:17
AVIS DE TEMPETE CONJUGALE

Marianne et Marc sont en voiture. Il pleut. Face au mouvement hypnotique des balais d’essuies-glaces, elle avoue qu’elle voit un autre homme. Le couple survivra-t-il à ce bouleversement ?


« Marc, j’ai quelque chose à te dire ». Ces mots résonnent comme une oraison funèbre dans l’univers conjugal. Marianne aurait un amant. Marc est bouleversé, sonné, lessivé et se dit, comme au rythme des essuies-glaces : « C’est grave, ce n’est pas grave, c’est grave, ce n’est pas grave ».

Essuieglaces.jpg
Si Marc dégouline de tous les sentiments engendrés par cette terrible annonce (stupeur, colère, violence, cynisme et jalousie), Marianne est totalement opaque. Rien ne transparaît de cette jeune femme. Peut-être même que cet amant n’existe pas et qu’il s’agit tout simplement de faire réfléchir, d’appeler au secours Marc pour sauver ce couple à la dérive. Les essuies-glaces, fil conducteur de cet ordre après le désordre, chassent les ennuis conjugaux pour arriver à une réconciliation autour d’un berceau.

La mise en scène est sobre : un fond noir, des lignes blanches qui délimitent la scène et deux comédiens. Mais le vidéaste sur scène est, lui aussi, élément à part entière du spectacle et donne un ton particulier à la pièce. Entre film et aparté, la caméra permet une mise en scène originale. La vidéo projetée en fond de scène occupe plusieurs fonctions : réflexions profondes et regard de cet homme blessé sur cette compagne qui ne lâche pas ses mystères mais aussi « film » instantané où le jeu de scène devient un vrai travail sur l’image, avec ces regards fous de douleur, figés de malaise, ces bouches entrouvertes sur la blessure. La caméra permet aussi de « voler des images » et entre jusque dans les draps et dans les plaies de ce couple. Intrusive , elle vient même déranger le spectateur bien calé sur son siège. Yohann Quëland de Saint-Pern, vidéaste performer, avance ici une réflexion sur la télé-réalité : notre voyeurisme nous est ainsi renvoyé en plein dans le pare-brise...

Nathalie ASTRUC
www.ruedutheatre.info

Changer les essuies-glaces
Texte et mise en scène : Christine Guérin
Interprétation : Valérie Cros et David Erudel
Vidéaste performer : Yohann Quëland de Saint-Pern
Création et régie lumières : Nicolas Henri

Compagnie M Comme c/o Christine Guérin
24 chemin des Ravenals 97411 Saint-Paul / Ile de la Réunion
Tel : 06 23 74 01 85

Jusqu’au 28 juillet à la Chapelle du Verbe Incarné à 13h50.

Photo © DR
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23 juillet 2007 1 23 /07 /juillet /2007 18:00
TABLEAU RASANT

Spectacle visuel, conçu comme une succession de tableaux au cours desquels une femme s’ouvre au monde, « La Robe escargot » déroute. Plus ennuyant qu’esthétique.


Un bruit de vagues. Une forme qui s’anime doucement, au rythme de la lumière qui monte lentement. Petit à petit, la forme s’agite, se relève, se débat dans sa coquille de tissu. L’introduction semble bien longue. La comédienne n’en finit pas de ne pas vouloir sortir de sa coquille d’escargot. On attend que quelque chose se passe enfin. Mais rien.

robe-escargot.jpg

La bande-son continue de diffuser ses clapotis, entrecoupés parfois d’une parole. La comédienne finit par se relever, sortir de sa robe coquille pour la retrousser en un costume qui hésiterait entre robe de pénitent gris et combinaison de cosmonaute. Elle esquisse quelques pas d’une danse mal définie. Et on a du mal à comprendre où elle veut en venir. Au clown ou au poétique peut-être. Mais l’effet n’est pas forcément des plus réussis. On ignore où elle va et on a bien du mal à la suivre. Quelques sourires, de-ci de-là, viendront bien égayer les visages. Mais l’ennui prend le pas sur l’étonnement. On l’observe sans se laisser convaincre. Plus incrédule qu’hostile d’ailleurs.

Car, incontestablement, le travail est là. Il y a, à n’en pas douter, une réelle recherche artistique sur les costumes. Mais l’intérêt de la prestation s’arrête là. Et c’est bien mince pour quarante cinq minutes de spectacle. Quarante cinq minutes drôlement longues…

Karine PROST
www.ruedutheatre.info

La Robe escargot
De et avec Bertille
Au théâtre des Lucioles, à 13 heures
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Chronique FraÎChe