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Festival d'Avignon

9 mai 2009 6 09 /05 /mai /2009 15:30
LAURÉATS DU CONCOURS « JEUNES CRITIQUES » DE PROMOTION THÉÂTRE

127 jeunes entre 15 et 20 ans ont tenté l’aventure de la critique en 3 étapes : sur une pièce de leur choix, puis parmi 4 proposés et enfin sur un spectacle surprise imposé. L’association Promotion Théâtre et la revue littéraire Indications ont soutenu le projet. Voici les chroniques des deux lauréats.

UN INTÉRESSANT MONOLOGUE DE L’ABSURDE


Une lumière neutre baigne une scène dénudée où sont sobrement disposés plusieurs objets hétéroclites, au nombre desquels des valises, un tapis d'enfant et des souliers noirs, bientôt chaussés par un homme déboulant sur scène, l'air paniqué et vaguement ahuri. S'ensuit un vertigineux monologue emmené par la faconde à la fois drôle et grave, absurde et satirique, d'Eric Durnez.


Débutant comme une conférence, l'homme n'aura de cesse d'énumérer, de raconter des faits et anecdotes glanées dans son entourage, sa vie. Bien divers, les faits ont cependant pour fond commun leur absurdité et sont ponctués par de la musique jazzy ou le flot sonore d'un vieux transistor. On nous parle autant du Paraguay que de papillons Kazakhs, de licenciement ou encore de la nécessaire trépanation de toutes les parties romantiques de cerveau. Et l'homme frénétique appuie toujours ses propos par l'utilisation inhabituelle et décalée d'objets quotidiens : ainsi un fer à repasser devient soudain combiné téléphonique ou un jet de confettis devient le meilleur moyen d'exprimer le désespoir. Ces objets, comme autant de "ready-made" dadaïstes nous invitent à porter notre attention sur le dérisoire et l'absurde de la vie moderne et tranquille.


L'homme, en énumérant, en confiant tour à tour taquin, mélancolique ou abasourdi ces faits, s'en libère et cherche à exorciser, à (s')analyser (lui et) ce qui l'entoure, ce à quoi il fait face.
Pris à témoin, le spectateur est vite amené à se perdre dans son étrange (absence de) logique au risque d'en ressortir fatigué ou confus. Eric Durnez, Une Compagnie et la Compagnie Kiroul affichent clairement leur goût prononcé pour le décalé en nous livrant une création théâtrale contemporaine atypique et burlesque, qui se fait peut-être aussi satire avant-gardiste de l'homme moderne, stressé et pressé, préoccupé par tout et rien à la fois, aux prises avec une incontrôlable logorrhée verbale et l'angoisse de son existence même.


 Krisztina KOVÁCS



BIENVENUE EN ABSURDIE


C'est à un voyage rigolo que nous invite Eric Durnez, à travers un florilège d'histoires, de petits contes et d'instantanés tous plus absurdes les uns que les autres. Grave ou comique, à la frontière du rationnel, émouvant parfois, décalé toujours, l'auteur, comédien et metteur en scène Eric Durnez nous entraîne dans un monde fait de surprises et d'étrangeté.

Si la générosité et la bonne humeur de l'homme-orchestre aux mille accessoires sont évidents, le spectacle ne fait pas vraiment mouche pour autant : c'est lent, long et un peu vide. Le texte est fin, bien écrit – et on se plaît à savourer les nombreux contes comme autant de friandises acidulées – mais porté à la scène, ce qui ressemble davantage à un recueil de courtes nouvelles qu'à un texte de théâtre (par la littéralité, la beauté très "écrite" des phrases et l'élégance rare du vocabulaire) peine à se déployer avec suffisamment de richesse dramaturgique pour occuper l'espace scénique, toucher le spectateur et l'emporter : c'est trop narratif pour être captivant et la lassitude gagne bien vite le spectateur à qui l'on donne beaucoup à entendre mais peu à voir – et peu à vivre. Reste l'humour, piquant et très noir ou carrément absurde, savoureux en tout cas et qui sauve le spectacle de l'ennui complet. Et passée la drôlerie, eh bien il ne reste rien… ou pas grand-chose : quelques mots, des bribes de phrases, un pot-pourri de sensations fugaces. C'est maigre, pour une pièce de près d'une heure trente.


Le comédien, juste et discret, a l'intelligence de laisser vivre ses histoires : il les raconte avec pudeur sans forcer le trait ; elles prennent leur envol avec douceur ; il souffle à peine sur elles comme pour les pousser vers nous, l'œil complice. Son pupitre, dont il sort de nombreux accessoires, évoque la malle à jouets de notre enfance : semblant ne pas avoir de fond, elle recèle les plus beaux trésors et nous entraîne de surprise en surprise. Du jeu de cartes au fer à repasser, de la loupe aux feuilles mortes… le grand déballage de bibelots hétéroclites n'a pas de fin – pas beaucoup  de sens non plus, d'ailleurs, ce qu'on excusera sans peine puisque rien n'en a dans cette conférence ludico-tragique.

Signalons une toux un peu dérangeante, quelques gestes parasites et deux ou trois bredouillements : de tout petits accrocs qui n'enlèvent rien à la finsse du jeu d'Eric Durnez et aux quelques belles trouvailles de mise en scène (un visage vu à travers une loupe, une carte d'Europe revisitée ou la matérialisation d'un cadavre par une robe posée au sol).

Les éclairages et la musique, due à Renaud Grémillon, concourent habilement à créer intimité et émotion – malgré la chanson finale, sans doute trop longue –, que le comédien nourrit par ses nombreuses interactions avec le public.

"Les Contes à réchauffer" sont donc un spectacle drôle et attendrissant, interprété avec finesse mais non dénué de défauts. Un bon moment à passer, sympathique sans être exceptionnel, pour un plaisir fugace ; ne le boudons pas : par les temps qui courent, c'est toujours ça de pris !

Thibaut RADOMME

Spectacle vu le 22 mars 2009 à l'Espace Molière du Collège Cardinal Mercier à Bruxelles.

Les Contes à réchauffer
Texte : Eric Durnez (éd. Lansman)
Interprétation, mise en scène : Eric Durnez
Assistance à la mise en scène et accessoires : Laura Durnez
Musique : Renaud Grémillon
Régie : Bruno Porterie

Production : Compagnie Kiroul & Une compagnie
Coproduction : Théâtre de Thouars / Scène Conventionnée; Circuits Scène conventionnée Auch Gers Midi Pyrénées; Ville de Chinon.

Photos © Emile Lansman
 


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