COMPRENDRE POUR MIEUX RENAITRE
Troisième spectacle de la saison du Tarmac, ce duo joliment interprété repose sur un texte tout en nuances d’une jeune auteur croate qui évoque une guerre qui ne dit pas son nom sans demeurer dans un total anonymat toutefois. Finesse et grâce sont au rendez-vous. Laissez le charme agir.
Sonia Ristic a le cœur entre Belgrade et Zagreb, les capitales de ces deux états de l’ancienne Yougoslavie qui se livrèrent une guerre fratricide au début des années 90. Dans sa pièce, cette jeune auteur de 35 ans ne cite pourtant aucun lieu particulier, préférant laisser à son texte son caractère universel. Il en va de même avec les personnages. « Il » et « Elle ». Nous ne les connaîtrons pas autrement.
Ils ont la trentaine. Ils se connaissent depuis longtemps. Ils se retrouvent pour évoquer cette folie des hommes qui a entrainé leur pays dans le chaos. Souffrances non dites, culpabilités larvées mais aussi partage des mots pour trouver la voix de l’aveu et de la liberté.
Reconstruire à tout prix
La linéarité n’est pas de mise ici. Peut-on en effet exorciser une douleur autrement que par bribes, sans idée de chronologie ? La reconstruction de ces deux êtres, métonymie de celle de ces pays ravagés par dix ans de conflit, s’opère sous nos yeux. Les éléments essentiels émergent du propos et, comme se pansent les blessures, ils reconstituent ce drame pour mieux aider les personnages à le comprendre et le dépasser. L’écriture, vive et alerte, ne s’embarrasse pas du superflu. Entre le réalisme des situations (soulignées également par des images vidéo) et la grâce poétique des chorégraphies, le juste équilibre qu’atteint ce spectacle lui évite de sombrer dans un pathos existentiel et une impression de déjà vu.
Sur scène, deux splendides comédiens défendent ce texte. Dans un décor minimal, ils occupent le grand plateau du Tarmac avec une mise en espace très ordonnée. Comme le suggère le titre, et même s’il ne s’agit pas d’un spectacle de danse et qu’il ne dure pas quatorze minutes, quelques moments de pure chorégraphie ponctuent le propos. Ils sont superbes, même si mieux maîtrisés par Vincent Cappello que par sa partenaire, et apportent cette salvatrice bouffée d’air à cette histoire difficile. La danse c’est la vie, dit-on souvent. Ici plus que jamais, elle ne va pas juste favoriser le rapprochement de deux corps. Elle va aussi aider à oublier ce qui les a séparés.
Franck BORTELLE (Paris)
14 minutes de danse
Ecrit et mis en scène par Sonia Ristic
Avec Vincent Cappello et Salomé Richez
Musique et son : Stéphane Monteiro
Vidéo : Carine Chichkowsky
Chorégraphie : Tamara Saphir
Tarmac de la Villette, Parc de la Villette, 75019 Paris (Métro : Porte de Pantin)
Réservations : 01 40 03 93 95
Du mardi au vendredi à 20 heures, le samedi à 16 heures
Jusqu’au 9 mai
Durée : 1h10