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Festival d'Avignon

7 mai 2006 7 07 /05 /mai /2006 03:26
UNE BLONDE DANS LA PEAU... D'UN AUTRE

Dans la pénombre de la petite scène repose un décor sobre. Une chaise et deux fenêtres laissant percer le bleu d'une nuit foncée. Le grondement d'un train électrique marque l'entrée de la jeune fille. Joseph Rosenblath, vieux juif de 77 ans, rescapé d'Auschwitz, est enfermé dans le corps de Sophie, jeune adolescente au teint porcelaine, aux parents cathos et golfeurs à l'Ile de Ré. Comment faire bon ménage dans un seul et même amas de chair? Ils vivent une sorte de colocation à double tranchant. Mais qui, des violons yiddish qui hantent les oreilles de Joseph et qui « font pousser les larmes dehors », ou de la chemise de nuit rose imprimée avec des porcs que doit porter Sophie, sont les vrais imposteurs? Alors qu'elle devrait être en pleine crise d'adolescence classique, Sophie se retrouve confrontée à des problèmes d'arthrose. Au lieu d'avoir ses règles, on doit la traiter pour incontinence, au grand désespoir de sa mère qui l'aurait préférée noire, à la limite juive, tout, sauf "vieux juif".


La comédienne passe, avec une agilité désarmante, d'un personnage à l'autre, recréant tour à tour ses échanges avec son psy et sa famille. La parole avance sur un fil entre survie et humour incisif. La jeune Sophie persévère, amusée, protégée par son vieux compagnon intérieur, affirmant sa judéité en semant sarcastiquement une belle zizanie dans sa famille, à coups de souvenirs concentrationnaires et sentimentaux d'un autre temps, quand son corps de jeune fille n'existait pas. Et de dire, malicieusement : «Est-ce qu'une blonde qui se respecte a des souvenirs?». Le jeu de Mélanie Thierry est parfait de subtilité pour nous permettre d'éclaircir les raisons de son acharnement à vouloir cohabiter avec Joseph Rosenblath. Seule sur cette petite scène des Mathurins, elle irradie le public de sa beauté diaphane et de son jeu intelligent. Ce petit corps au cheveux d'anges assure solidement ce monologue où sont justement titillées les zones d'ombres de chacun, le renversement des bien-pensances, le devoir de mémoire revisité avec des mots pour rire plutôt que d'en pleurer. Tout cela est justement installé dans cette intrigue qui évolue du surréalisme à la réflexion psychanalytique.

Le style de l'auteur, Amanda Sthers nous transporte vite vers des frontières où l'on ne saurait plus dire où est la vérité dans tout cela, à l'instar des mots de Sophie : « Ils disent que je suis fou parce qu'ils ne me comprennent pas, mais bientôt, c'est eux qu'on traitera de fous, parce qu'ils ne comprendront pas ».
Partant d'un sujet aussi austère qu'ubuesque, faisant le pari d'un titre insolite, Amanda Sthers, nous offre une écriture mêlant humour juif habilement dosé et une gravité qu'épouse idéalement la jeune comédienne. Du rire franc aux larmes acides, Mélanie Thierry se donne et nous donne, malgré sa jeune expérience, un beau moment de theâtre.

Olivia MICHEL (Paris)

Lire aussi la critique de notre reporter : Maia ARNAULD.

Le Vieux juif blonde
Une pièce d'Amanda Sthers, mise en scène par Jacques Weber et interprétée par Mélanie Thierry.
Théâtre des Mathurins - 36, rue des Mathurins,   75008  Paris
Jusqu'au 31 mai 2006 à 19h00.
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