27 octobre 2008
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MORTELLE(S) DANSE(S)
Dans le cadre du Festival d'Automne à Paris, le Théâtre de la Bastille accueille le Théâtre-laboratoire Sfumato. Cette compagnie bulgare propose avec sa Trilogie August Strindberg une plongée angoissante et complexe dans l'univers de l'auteur dramatique suédois.
Première des pièces proposées, Mademoiselle Julie dépeint en un acte l'affrontement entre trois êtres et trois esprits. Julie, fille du comte, Jean, le valet ambitieux et Kristine, réfugiée dans la religion. La nuit de la Saint-Jean, la première séduit le deuxième pourtant fiancé à la troisième. Une fois possédée, et sans espoir pour elle d'échapper au déshonneur, Julie se suicide.
L'ambiguïté de l'oppression
En choisissant volontairement de renommer la pièce Julie, Jean et Kristine, le Sfumato souligne l'ambiguïté des liens unissant les trois personnages. Dans le jeu complexe auxquels ils se livrent, les rapports de pouvoir ne se situent pas nécessairement là où ils devraient être, et Julie, sa position sociale supérieure mourra de ses faiblesses.
À travers cette pièce à l'écriture nerveuse et resserrée, le combat qui est à l'œuvre est une guerre de l'esprit. L'opposition des classes et des sexes se révèle dans une mécanique des discours implacable et tranchante, à l'image de la mise en scène proposée par Margarita Mladenova. La metteuse en scène installe, en effet, l'action dans une cuisine toute d'inox aux lumières cliniques. Dans cet espace où l'on hache la viande et lave à grandes eaux, les protagonistes confrontent leurs convictions religieuses et sociales sans parvenir à se comprendre. Le meurtre psychique de Julie, qui la pousse au suicide physique, éclaire chacune des solitudes des trois personnages. Le texte, interprété avec un réalisme énergique mais sans excès par les trois comédiens nous est transmis avec d'autant plus de violence.
Étouffement mortel
Deuxième pièce de la Trilogie, La Danse de Mort partage selon Margarita Mladenova avec Mademoiselle Julie « un regard non romantique, impudiquement cruel, sur l'homme ». Dans ce texte très sombre les personnages sont encore trois. Edgar, sa femme Alice et le cousin de cette dernière Kurt. Les deux premiers qui ne se sont jamais aimés s'apprêtent à fêter leur noce d'argent, et le troisième (qui a un temps aimé la deuxième) partage pour quelques heures leurs haines.
Comme dans Mademoiselle Julie, les personnages se jettent aux visages reproches et désillusions. Mais à la différence de la précédente pièce, point ici de combat d'esprit ni d'amour, qui s'est depuis bien longtemps tari. Les cœurs sont secs, aigris. Les propos amers et sans espoirs, d'un pessimisme sombre, sont la seule monnaie d'échange de la sinistre maison.
Dans cette atmosphère étouffante, pesante, le jeu des comédiens aux accents parfois hystériques accentue le sentiment de décomposition mortifère. La scénographie funèbre, les faibles lumières, les costumes épais et empesés, tout concourt à souligner l'absence totale d'échappatoire. Le ballet tragique des désillusions ne mène qu'à la mort, qui seule délivrera les esprits. Et tout comme le trio on étouffe, pris dans la chape de plomb de leur danse hostile.
Julie, Jean et Kristine (Mademoiselle Julie)
théâtre de la Bastille, du lundi 20 octobre au dimanche 26 octobre, 19h, dimanche 15h
La Danse de mort - photo 2
théâtre de la Bastille, du lundi 20 octobre au mercredi 22 octobre, 21h
Strindberg à Damas
théâtre de la Bastille, du vendredi 24 au dimanche 26 octobre, 17h
Théatre de la Bastille, 76 rue de la Roquette, 75011 Paris. Tél: 01 43 57 42 14. www.theatre-bastille.com
Julie, Jean et Kristine (Mademoiselle Julie) - photo 1
de August Strindberg
adaptation et mise en scène Margarita Mladenova
avec Albena Georgieva, Hristo Petkov, Miroslava Gogovska
scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova
lumière Daniela Oleg Liahova et Margarita Mladenova
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival dAutomne à Paris.
manifestation présentée dans le cadre de la Saison culturelle européenne en France (1er juillet – 31 décembre 2008).
La Danse de mort
de August Strindberg
adaptation et mise en scène Margarita Mladenova
avec Svetlana Yancheva, Vladimir Penev, Tzvetan Alexiev
scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova
lumière Daniela Oleg Liahova et Margarita Mladenova
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival d'Automne à Paris.
Strindberg à Damas
de Georgi Tenev et Ivan Dobchev
mise en scène Ivan Dobchev
avec Roumen Traikov, Snezhina Petrova, Hristo Petkov, Elena Dimitrova, Malin Krastev,
scénographie Ivan Dobchev et Daniela Oleg Liahova
costumes Daniela Oleg Liahova
musique originale Assen Avramov
vidéo film Lubomir Mladenov
lumière Ivan Dobchev
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival d’Automne à Paris.
Photo © Simon Varsano
Dans le cadre du Festival d'Automne à Paris, le Théâtre de la Bastille accueille le Théâtre-laboratoire Sfumato. Cette compagnie bulgare propose avec sa Trilogie August Strindberg une plongée angoissante et complexe dans l'univers de l'auteur dramatique suédois.
Première des pièces proposées, Mademoiselle Julie dépeint en un acte l'affrontement entre trois êtres et trois esprits. Julie, fille du comte, Jean, le valet ambitieux et Kristine, réfugiée dans la religion. La nuit de la Saint-Jean, la première séduit le deuxième pourtant fiancé à la troisième. Une fois possédée, et sans espoir pour elle d'échapper au déshonneur, Julie se suicide.
L'ambiguïté de l'oppression
En choisissant volontairement de renommer la pièce Julie, Jean et Kristine, le Sfumato souligne l'ambiguïté des liens unissant les trois personnages. Dans le jeu complexe auxquels ils se livrent, les rapports de pouvoir ne se situent pas nécessairement là où ils devraient être, et Julie, sa position sociale supérieure mourra de ses faiblesses.
À travers cette pièce à l'écriture nerveuse et resserrée, le combat qui est à l'œuvre est une guerre de l'esprit. L'opposition des classes et des sexes se révèle dans une mécanique des discours implacable et tranchante, à l'image de la mise en scène proposée par Margarita Mladenova. La metteuse en scène installe, en effet, l'action dans une cuisine toute d'inox aux lumières cliniques. Dans cet espace où l'on hache la viande et lave à grandes eaux, les protagonistes confrontent leurs convictions religieuses et sociales sans parvenir à se comprendre. Le meurtre psychique de Julie, qui la pousse au suicide physique, éclaire chacune des solitudes des trois personnages. Le texte, interprété avec un réalisme énergique mais sans excès par les trois comédiens nous est transmis avec d'autant plus de violence.
Étouffement mortel
Deuxième pièce de la Trilogie, La Danse de Mort partage selon Margarita Mladenova avec Mademoiselle Julie « un regard non romantique, impudiquement cruel, sur l'homme ». Dans ce texte très sombre les personnages sont encore trois. Edgar, sa femme Alice et le cousin de cette dernière Kurt. Les deux premiers qui ne se sont jamais aimés s'apprêtent à fêter leur noce d'argent, et le troisième (qui a un temps aimé la deuxième) partage pour quelques heures leurs haines.
Comme dans Mademoiselle Julie, les personnages se jettent aux visages reproches et désillusions. Mais à la différence de la précédente pièce, point ici de combat d'esprit ni d'amour, qui s'est depuis bien longtemps tari. Les cœurs sont secs, aigris. Les propos amers et sans espoirs, d'un pessimisme sombre, sont la seule monnaie d'échange de la sinistre maison.
Dans cette atmosphère étouffante, pesante, le jeu des comédiens aux accents parfois hystériques accentue le sentiment de décomposition mortifère. La scénographie funèbre, les faibles lumières, les costumes épais et empesés, tout concourt à souligner l'absence totale d'échappatoire. Le ballet tragique des désillusions ne mène qu'à la mort, qui seule délivrera les esprits. Et tout comme le trio on étouffe, pris dans la chape de plomb de leur danse hostile.
Caroline CHÂTELET (Paris)
Julie, Jean et Kristine (Mademoiselle Julie)
théâtre de la Bastille, du lundi 20 octobre au dimanche 26 octobre, 19h, dimanche 15h
La Danse de mort - photo 2
théâtre de la Bastille, du lundi 20 octobre au mercredi 22 octobre, 21h
Strindberg à Damas
théâtre de la Bastille, du vendredi 24 au dimanche 26 octobre, 17h
Théatre de la Bastille, 76 rue de la Roquette, 75011 Paris. Tél: 01 43 57 42 14. www.theatre-bastille.com
Julie, Jean et Kristine (Mademoiselle Julie) - photo 1
de August Strindberg
adaptation et mise en scène Margarita Mladenova
avec Albena Georgieva, Hristo Petkov, Miroslava Gogovska
scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova
lumière Daniela Oleg Liahova et Margarita Mladenova
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival dAutomne à Paris.
manifestation présentée dans le cadre de la Saison culturelle européenne en France (1er juillet – 31 décembre 2008).
La Danse de mort
de August Strindberg
adaptation et mise en scène Margarita Mladenova
avec Svetlana Yancheva, Vladimir Penev, Tzvetan Alexiev
scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova
lumière Daniela Oleg Liahova et Margarita Mladenova
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival d'Automne à Paris.
Strindberg à Damas
de Georgi Tenev et Ivan Dobchev
mise en scène Ivan Dobchev
avec Roumen Traikov, Snezhina Petrova, Hristo Petkov, Elena Dimitrova, Malin Krastev,
scénographie Ivan Dobchev et Daniela Oleg Liahova
costumes Daniela Oleg Liahova
musique originale Assen Avramov
vidéo film Lubomir Mladenov
lumière Ivan Dobchev
production Teatro Sfumato/Sofia.
coréalisation Théâtre de la Bastille et Festival d’Automne à Paris.
Photo © Simon Varsano